364 jours et plusieurs vagues de Covid plus tard: les JO de Tokyo au rendez-vous

La détermination, la force de travail et la puissance économique japonaises, lié à un relatif contrôle du Covid-19 dans l'archipel nippon, ont réussi ce que peu d'autres auraient été capables de réaliser: organiser le plus grand événement planétaire dans un contexte sanitaire aussi fragile et avec une opinion publique plus que réticente.

Lorsque les membres du Comité international olympique (CIO), réunis à Buenos Aires le 13 septembre 2013, portent leur choix pour la troisième fois de l'histoire sur la capitale japonaise - après 1944 (les JO furent annulés en raison de Seconde guerre mondiale) et 1964 - de préférence à Madrid et Istanbul, tous les ingrédients sont réunis. Le pays est stable, riche, a une grande tradition sportive et à l'habitude des grandes organisations sportives (il a accueilli les JO d'hiver à Sapporo en 1972 et à Nagano en 1998, plus les Jeux Asiatiques à Tokyo en 1958 et à Hiroshima en 1994). Le budget conséquent est fixé à 7,5 milliards de dollars (6,13 milliards d'euros). 

Surgissent ensuite les problèmes plus ou moins importants, inhérents à ces grands barnums. Parfois en termes d'image (le plagiat du logo du théâtre de Liège, ou plus récemment la démission du patron des Jeux après des déclarations sexistes), parfois en termes de probité (démission du président du Comité olympique japonais après des soupçons de corruption pour l'attribution des Jeux) ou budgétaires. Le nouveau stade olympique pharaonique à plus de 2 milliards d'euros a été abandonné pour un stade plus modeste (1,12 milliard d'euros quand même) aux valeurs plus écologiques (il est recouvert de bois venant des 47 préfectures du pays). 

C'est alors qu'a surgi le Sars-CoV-2, à huit mois des Jeux, fin novembre 2019. La ville chinoise de Wuhan, inconnue ou presque jusque-là, était confrontée à une épidémie. Lorsqu'elle commença à se répandre à travers le monde, l'inquiétude grandit. Le comité d'organisation japonais exprima la sienne en février. A la mi-mars, toutes les grandes compétitions de sport étaient à l'arrêt et la question du report des Jeux s'est posée. Lorsque le Canada a annoncé que ses athlètes ne se rendraient pas à Tokyo, les dominos ont commencé à s'abattre. Le 24 mars, la décision logique était prise. Le gouvernement japonais, en accord avec le CIO, annonçait le report, à l'automne, à l'été 2021 ou à l'été 2022. Le 30 mars, les nouvelles dates étaient fixées douze mois, jour pour jour, plus tard, pour autant que la pandémie soit sous contrôle. 

C'est alors que la ville qui était "la mieux préparée" de l'histoire à organiser le grand rendez-vous olympique a dû se lancer dans un formidable contre-la-montre. Comment faire pour que tous les éléments prévus puissent être encore en place douze mois plus tard ? Village des athlètes, enceintes sportives, personnel de l'organisation n'étaient a priori plus disponibles. Un travail titanesque et un coût astronomique supplémentaire ont fait bondir de 22 % un budget déjà hors des clous (15,4 milliards de dollars/12,7 milliards d'euros). 

L'impopularité des Jeux s'est faite croissante dans le pays au fil des sondages. Car cette année de préparation se déroulait dans l'incertitude totale d'un point de vue sanitaire, certes plus à travers le monde qu'au Japon où les effets demeuraient proportionnellement limités. Tant est si bien qu'il a fallu pour calmer l'opinion décider de ne pas accepter la venue des spectateurs étrangers dans un premier temps. La décision sur la présence des spectateurs locaux, limitée à une jauge de 50% et 10.000 personnes au maximum prise le 21 juin était tout simplement annulée à deux semaines de l'ouverture. Les Jeux se passeront de spectateurs.

L'importance pour le Japon de réussir ses Jeux six mois avant ceux qui vont se dérouler l'hiver prochain à Pékin, celle pour le CIO de récolter la manne médiatique qui va permettre aux nombreuses fédérations sportives internationales de survivre jusqu'aux Jeux de Paris en 2024, et encore celle pour les athlètes qui ont consacré une partie de leur vie à atteindre cet objectif ultime de ne pas voir le rêve s'effondrer, ont prévalu à tout principe de précaution.