“En rangeant le garage, j’ai découvert que ma mère a participé aux JO”: le parcours olympique atypique de Claire Michel
Un nettoyage de garage prolifique. À 12 ans, Claire Michel apprend totalement par hasard la participation de sa maman aux JO de 1976 à Montréal. La naissance d’un rêve olympique finalement exaucé à Rio en 2016, quatre ans seulement après avoir découvert sa discipline, le triathlon. “Mon objectif de disputer les JO a toujours été très clair, la façon d’y arriver a été un peu particulière”, reconnaît l’athlète belge de 32 ans. Portrait.
Anthony MarcouDernière mise à jour:25-07-21, 11:14
Début des années 2000, dans un garage de l’Oregon. Claire Michel met la main sur une vieille manchette de journal. Le cliché qui accompagne l’article laisse apercevoir le visage de sa maman, un bonnet de bain vissé sur la tête. “Je pensais que c’était une compétition de natation amateure. Il s'agissait en réalité d’une photo prise lors des JO de 1976 à Montréal”, entame la Bruxelloise qui a grandi aux États-Unis.
“Jusque-là, dans mon esprit, les athlètes olympiques étaient assimilés à des super-héros que je voyais à la télé. Là, j’en avais une juste devant moi. Tout de suite, cela m'a paru plus concret. Cela ne signifie pas que ma maman n’est pas exceptionnelle hein (rires). Mais c'était la première fois que je me rendais compte que c’était possible. C’est à ce moment que je lui ai demandé si je pouvais débuter la natation."
Dès le premier jour dans son nouveau club, l’adolescente affiche ses ambitions. “Bonjour, je m’appelle Claire Michel et je veux aller aux JO”, lance-t-elle à son néo-coach. “Il m’a répondu: ‘On va d’abord apprendre les quatre nages”. Un échange similaire intervient quelques années plus tard, à l’université de l’Oregon où la jeune Belge entame ses études et bénéficie d’une bourse grâce à ses performances... en athlétisme. “Dans mon club de natation, un ami m’avait une fois convié à essayer le cross-country. C’est comme ça que j’ai découvert l’athlétisme. J’avais un peu plus d’aptitudes dans ce domaine.”
2012, le tournant
Claire se spécialise dans le 3.000 m steeple, boucle son cursus universitaire et revient en Belgique en 2012, après plus de vingt ans passés outre-Atlantique. “Je suis revenue au pays car je voulais me qualifier pour les JO dans cette discipline et que je n’étais pas trop loin du minimum imposé.” Mais l’objectif s’envole rapidement, la faute à une double fracture de stress. Un tournant. Lassée par les blessures, elle décide d’abandonner le sport de haut niveau et d’embrasser une vie professionnelle plus classique.
“J’ai tout arrêté pendant huit mois et j’ai commencé à travailler à temps plein dans l’import-export. Puis je me suis inscrite dans un club de triathlon pour garder la forme et surtout pour avoir une vie sociale. Je ne connaissais pas grand monde à Bruxelles. Dans ce club, on m’a dit “tu cours bien, tu nages bien, on va te prêter un vélo. Tu verras, c’est chouette. Effectivement, cela m'a plu.”
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Fin de l’année 2012, elle prend part à sa première course avant de disputer les championnats de Belgique l'année suivante. Un baptême qui ne passe pas inaperçu. “Des entraîneurs de la ligue francophone de triathlon m’ont repéré lors de ces championnats et m’ont ensuite conviée à un stage. J’avais 24 ans, je venais d'accepter un emploi et je n’étais pas sûre de vouloir m’investir à nouveau dans le sport de haut niveau. Mais j’ai finalement accepté avec les JO au Brésil en ligne de mire. J’avais 3,5 ans devant moi pour préparer cet objectif. Mon premier stage était vraiment bizarre. J’étais entourée d’adolescentes âgées entre 16 et 18 ans et c’est moi qui posais toutes les questions."
Le billet pour Rio est décroché et Claire Michel réalise son rêve olympique en 2016 avec comme objectif... le top 16. Mais rien ne se passe comme prévu. Elle est contrainte de quitter la course après avoir été doublée dans la partie cycliste. “Quand l’officiel est arrivé à ma hauteur et m’a dit ‘Tu dois t’arrêter là’, c’était très embarrassant.” Le long de la célèbre plage de Copacabana et devant de nombreux spectateurs, elle accomplit “la pire performance” de sa carrière. Un moment à oublier? Non.
“Tous les spectateurs ont commencé à m’applaudir, c’était vraiment beau. Je l’ai pris comme une reconnaissance d’’être arrivée jusqu’ici, aux JO. Je me suis dit “dans quatre ans, je vais revenir et je ferai ça mieux.” Le lendemain, son entraîneur personnel décide de mettre un terme à leur collaboration. Une longue réflexion s’engage.
Après Rio, je ne voulais même pas me considérer comme une olympienne”
Claire Michel
“Je ne voulais même pas me considérer comme olympienne. J'avais le sentiment d’être un imposteur. J’ai entamé un travail avec mon coach mental et me suis demandé ce que je voulais faire, si ça valait la peine de continuer. Mon père me disait ‘Tu ne veux pas un vrai travail?”. Le triathlon, ce n’est pas le foot. Tu pratiques ce sport pour la passion, pas pour l’argent. Il voulait que je mène un train de vie confortable.”
Claire Michel décide finalement de poursuivre sa carrière sportive et opte pour un mode de fonctionnement radicalement différent. “J'ai rejoint un groupe indépendant d’une quinzaine d’athlètes issus du monde entier. Je voulais davantage de partenaires d’entraînement. Avant Rio, j’étais épaulée par un coach général, mais j’avais un spécialiste pour la musculation, un autre pour la technique, etc. Je passais beaucoup de temps dans ma voiture pour rencontrer des experts à gauche, à droite. C’était une perte d’énergie, surtout que j’organisais moi-même le programme.”
Désormais, la fille de Colette Crabbé passe moins de temps dans sa voiture et ... en Belgique. “On est en stage dix ou onze mois par an, basé en Espagne ou au Portugal. Je suis très peu en Belgique, mais heureusement j’ai un compagnon qui est très compréhensif (sourire).”
À Tokyo, Claire Michel prendra part à l’épreuve individuelle et au relais mixte, nouveau venu dans le programme olympique. “Une médaille? C’est jouable. On n’est pas les favoris, on n’a pas le palmarès de la France, des États-Unis ou de l’Australie, mais on est souvent en embuscade à la 4e, 5e ou 6e place. On est toujours là. Cette course va se jouer sur des détails. Dans un bon jour, on peut être candidat au podium.” Et à titre personnel? “Cette fois, je veux aller au bout. Cela peut paraître cliché de dire cela, mais je veux faire une bonne course dans les trois disciplines. Je serai contente si je ne commets pas d’erreurs.”
Verdict le 27 juillet prochain. Issue attendue quatre jours plus tard pour le relais.