À ce rythme-là, nous nous dirigeons vers un nouveau confinement

Depuis près de deux semaines, nous devons nous conformer à des mesures plus strictes pour lutter contre le coronavirus, comme la bulle des cinq. Mais l’effet de ces nouvelles règles prend toujours un certain temps à se concrétiser dans les chiffres. “Dans une première phase, les chiffres augmentent moins rapidement. C’est ce que nous voyons maintenant”, explique le professeur Van Ranst (KU Leuven). “Dans la prochaine phase, il faut que ces chiffres se stabilisent, et j’espère que ce sera le cas cette semaine. C’est pour cela que cette semaine est si cruciale. Et dans une troisième phase, les chiffres devraient baisser.”

“L’évolution de l’épidémie ne dépend pas des mesures prises par le gouvernement, mais de la façon dont les gens respectent les règles. Je ne sais pas comment la situation va évoluer. Je n’ai pas de boule de cristal. Il ne s’agit pas de mathématiques, mais de l’addition des comportements de chacun. Si les chiffres ne se stabilisent pas la semaine prochaine, on se rapprochera de mesures telles qu’un “lockdown”, et personne n’en veut.”

Mais cette fois-ci, la baisse des chiffres au niveau national ne sera pas un indicateur suffisant. Geert Molenberghs, biostatisticien aux universités de Hasselt et de Louvain, explique: “Ce qui nous inquiète en tant que scientifiques, c’est que, dans notre pays, on n’a pas affaire à une grande épidémie comme ce fut le cas lors de la première vague. Cette fois, on constate onze petites épidémies: une dans chaque province et une en région bruxelloise. Et dans chacun de ces endroits, l’épidémie évolue différemment. Actuellement, le chiffre global pour notre pays est fortement influencé par ce qui se passe à Anvers: si les chiffres y diminuent, les chiffres pour la Belgique baissent. Mais entre-temps, l’épidémie se propage dans les autres provinces.”

M. Van Ranst souligne que seules les provinces d’Anvers, du Limbourg et de la Flandre occidentale commencent à maîtriser l’épidémie. Dans les provinces wallonnes, dans le Brabant flamand et wallon et surtout dans la ville de Bruxelles, le nombre d’infections continue d’augmenter de façon spectaculaire. “Nous devons faire attention à ne pas nous laisser influencer par les seuls chiffres nationaux”, déclare M. Molenberghs. “De plus - et c’est le deuxième problème - le nombre réel de personnes infectées est environ cinq fois plus élevé que le nombre de personnes qui subissent un test Covid-19 positif.”

“Si les chiffres continuent d’augmenter et si vous tenez compte du fait qu’en réalité il y a cinq fois plus d’infections que de tests positifs, vous vous retrouverez avec plus d’infections avant la fin du mois d’août que pendant le pic de mars et d’avril. Il est possible que le pic soit cette fois-ci plus élevé, du moins en termes de chiffres. La différence est qu’il y a maintenant plus de jeunes infectés, donc le nombre d’hospitalisations est toujours sous contrôle. C’est la bonne nouvelle, mais aussi la seule bonne nouvelle. Si l’épidémie continue à se propager, des mesures supplémentaires devront être prises.”

Le professeur Molenberghs ne veut pas non plus se prononcer sur les mesures à prendre: “C’est une question qui concerne les politiciens. Aucun virologue ne dira qu’un couvre-feu est nécessaire, mais il dira qu’il faut réduire le nombre de contacts sociaux.”

“Même l’obligation de porter un masque buccal me semble un peu exagérée. Il serait préférable de faire appel au jugement des gens: ils peuvent décider eux-mêmes que c’est nécessaire. Comparez avec le code de la route. Il stipule également que vous devez adapter votre vitesse lorsque la surface de la route est glissante. Personne n’a décrit exactement ce qu’est une route mouillée. D’ailleurs, avec une mesure comme l’obligation de porter un masque buccal, l’épidémie ne pourra pas être maîtrisée. Ce doit toujours être un ensemble de mesures.”

“Si les règles plus strictes actuelles ne fonctionnent pas, nous retournerons en confinement. Nous savons que cela a fonctionné, même si cela nous a fait du mal. Mais personne n’a dit que le confinement devait être aussi strict que la dernière fois. La prochaine fois, les écoles et les magasins pourraient rester ouverts, par exemple. C’est aussi une possibilité.”