Ces restaurateurs campent sur leur position et rouvriront le 1er mai: “Il va y avoir une véritable révolution du secteur!”

Fabrice Vande est brasseur dans la Basse-Meuse. Avec quelques restaurateurs de la région, il a lancé un collectif qui regroupe une trentaine de professionnels de l’horeca. Hier, mercredi 14 avril, suite à l’annonce du Codeco de rouvrir les terrasses le 8 mai, au lieu du 1er mai, les appels ont fusé: “On trouve ça tout bonnement inacceptable!”, fustige le Bassimosan. “On s’est mis d’accord: peu importe les conséquences, on rouvrira le 1er mai comme c’était prévu. Ne fut-ce que symboliquement.”

Pour Fabrice, il est impensable d’attendre une semaine de plus. Cela fait trop longtemps que le secteur attend de pouvoir reprendre ses activités, plusieurs mois qu’il galère. “Sincèrement, je ne vois pas ce qu’une semaine va changer. Ils avancent plein d’excuses stupides, mais voient-ils à quel point les indépendants souffrent et meurent à petit feu?”, s’interroge-t-il. 

Ce que craint le brasseur, à présent, c’est que la réouverture des terrasses soit à nouveau repoussée, comme le suggère le tableau du Codeco où l’on peut voir un astérisque précisant: “À condition que la situation au sein des soins intensifs ne soit améliorée durablement”.

“Les cours vont reprendre, les métiers de contact aussi. Les chiffres vont alors légèrement augmenter, les politiques vont paniquer et s’en servir pour empêcher, une nouvelle fois, le secteur de rouvrir”, pressent Fabrice. Un sentiment partagé par Pascal Palm, patron du restaurant Les Terrasses, à Liège: “Les chiffres vont s’envoler dès le 4 ou le 5 mai, et il n’y aura pas de réouverture le 8 mai. Sauf si la pression populaire, de l’horeca et de nos élus locaux arrive à faire changer d’avis ces politiciens complètement déconnectés de toutes réalités.”

En tout cas, si cette date est encore repoussée, Fabrice l’assure: “Il va y avoir une véritable révolution du secteur! On est à bout. On a fait des efforts, on a investi pour des aménagements respectant les mesures sanitaires, mais rien n’a changé. Les aides promises sont ridicules. Et encore, quand on y a droit. Parce que ce n’est pas le cas de tout le monde.”

Valentino, chef à la Trattoria Maccheroni, n’est pas surpris par l’annonce du Comité de concertation. “Les décisions ne vont jamais dans notre sens. Je pense qu’ils se sont dits qu’il fallait une date pour nous calmer. Mais ça n’a pas fonctionné, loin de là”, commente-t-il. “Depuis octobre, je le disais qu’on n’allait pas ouvrir avant la fin des vacances de Pâques... J’avais visiblement raison.”

Quelles que soient les conséquences, il rouvrira le 1er mai, et ce, “dans le respect des règles sanitaires”. Même si ce n’est que pour une journée, même si c’est simplement symbolique. 

Il dispose d’une terrasse, mais celle-ci, située devant le restaurant, le long de la rue Feronstrée, est plutôt petite. C’est pourquoi il est en train de réfléchir à autoriser ses clients à s’attabler à l’intérieur. “Il ne faut pas se foutre de nous. On vit en Belgique où la météo est rarement au beau fixe, alors rouvrir les terrasses en premier, c’est vraiment ridicule”, ajoute le restaurateur liégeois.

“L’idée n’est pas d’être des rebelles, mais de marquer le coup, faire comprendre que là, c’en est trop. Ça fait cinq mois d’affilée que l’on est fermé, mais rien ne bouge. Alors qu’il est très clair, vu la situation qui ne s’est pas forcément améliorée depuis, que l’horeca n’est pas le problème”, estime Valentino. “Si les gens ne se voient plus dans les bars ou dans les restaurants, ils le font ailleurs. Et en plus, sans respecter les gestes barrières, sans jamais respecter la fameuse bulle d’une personne. Alors que dans un restaurant, ils pourront se voir de manière encadrée.”

Indéniablement, pour Valentino, ainsi que de nombreux restaurateurs, les problèmes financiers sont importants. Surtout que, comme ils sont nombreux à nous l’avoir déjà signalé, les aides sont dérisoires par rapport aux besoins réels des indépendants. Toutefois, ce qui manque le plus au chef de la Trattoria Maccheroni, c’est l’aspect humain. “Pas forcément pour moi, mais plutôt pour la population. Je vois que les gens sont cruellement en manque, qu’ils ont besoin de sortir, d’aller boire un verre ou manger un bout en famille ou entre amis”, explique Valentino.

Tout comme Fabrice, le Liégeois trouve la décision du gouvernement de reporter la réouverture de l’horeca d'une semaine ridicule:

En début de semaine, le gouverneur de la Province de Liège, Hervé Jamar, a déclaré qu’il ne s’opposerait pas à la réouverture des terrasses le 1er mai. Le bourgmestre de Liège, Willy Demeyer, avait alors embrayé, indiquant qu’il était plutôt favorable à cette idée. Mais tout ça, c’était avant que le Comité de concertation ne se réunisse mercredi. On l’a répété maintes et maintes fois ici, les terrasses ne pourront rouvrir avant le samedi 8 mai.

À la sortie du Codeco, la ministre de l’Intérieur, Annelies Verlinden, a expliqué au micro de nos confrères de LN24 que les établissements qui rouvriraient malgré tout le 1er mai s’exposeraient à des amendes, tout comme leurs clients. Les gouverneurs, quant à eux, pourraient être sanctionnés s’ils venaient à camper sur leurs positions et autorisaient la réouverture des terrasses une semaine plus tôt que prévu. 

Du côté de la Province de Liège, on annonce une réunion avec les forces de l’ordre, notamment, mais aussi avec les bourgmestres représentant les trois arrondissements de la province et la communauté germanophone, “comme c’est le cas après chaque Comité de concertation”. Celle-ci n’aura pas lieu avant le début de la semaine prochaine, puisque le gouverneur attend que soit publié l’Arrêté ministériel.

“Il est donc prématuré de s’exprimer au sujet de la réouverture le 1er mai annoncée par les restaurateurs liégeois”, commente Jean-Yves Segers, porte-parole du gouverneur de la Province de Liège. “Il est toutefois important de préciser que, contrairement à ce qui a été relayé plusieurs fois, monsieur Jamar s’est simplement adressé au gouvernement fédéral pour proposer des pistes et des solutions pour encadrer au mieux la réouverture des terrasses. C’était plutôt une alerte qu’un positionnement en faveur de la reprise des activités le 1er mai.”

Malgré tout, il est important de noter que le bourgmestre de Liège a avoué, mardi dernier, que la police n’avait pas assez d’effectifs pour surveiller tous les restaurateurs s'ils maintenaient bel et bien leur réouverture dans un peu plus de deux semaines.

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