Comment les mouches doivent permettre de déterminer la date de la mort de Jürgen Conings

Dimanche, des gens vêtus de blanc étaient à genoux dans les fougères du Dilserbos, collectant les larves sur le corps de Jürgen Conings avec pince à épiler et cuillère en plastique. Au sol, un grand bac en plastique avec du sable au fond. À l’intérieur, un pot en plastique transparent avec du cœur de bœuf haché.

“Au fil des ans, nous avons essayé différents types de viande. Les larves survivent mieux lorsque le cœur de bœuf est moulu”, selon Sofie Vanpoucke, entomologiste à l’INCC, citée mardi par HLN. La spécialiste n’était pas présente sur le terrain dimanche, mais elle fait partie des meilleures dans son domaine en Belgique. Quand le médecin légiste n’arrive pas à préciser le moment de la mort (la fourchette est à ce stade entre une et quatre semaines, pour Conings), Vanpoucke entre en scène. En raison du secret de l’instruction, elle ne peut pas donner de détails sur ce dossier en particulier.

Si une personne est retrouvée morte peu après son décès, le légiste peut déterminer quand la victime est décédée en fonction de la température corporelle. Mais la méthode a ses limites et n’a plus de sens si le cadavre repose longuement à un endroit jusqu’à atteindre la température ambiante, explique Sofie Vanpoucke. C’est là qu’elle intervient, en comptant sur les mouches. “Les mouches viennent sur le corps et pondent de petits œufs dans les plaies et dans tous les orifices du corps (...) À un moment donné, des larves sortent et commencent à manger le corps. Nous en collectons le plus possible sur place, car nous avons besoin des plus anciennes”, expose-t-elle.

La partie la plus high-tech de l’équipement des spécialistes est une sonde de température. Elle permet de comparer les informations enregistrées sur place et celles reçues des stations météorologiques de l’IRM. Il faudra tenir compte des différences, car plus il fait froid, plus il faut de temps pour qu’une larve se transforme en une nouvelle mouche. “Pour le reste, on travaille avec une simple pince à épiler, une cuillère et un pot de viande. Nous avons toujours des portions de cœur de bœuf au congélateur, au bureau comme à la maison. Quand nous recevons une mission, nous décongelons une portion et on est partis”, révèle Mme Vanpoucke.

Les larves se nourrissent du cœur en question. “Du coup, elles ont moins de stress, ce que nous devons absolument éviter. Le stress influence le cycle. En conséquence, notre travail ne serait plus précis. Une fois les larves sur la viande, nous veillons à ce qu’elles atteignent le laboratoire le plus vite possible. Ensuite, nous les plaçons dans des incubateurs, où nous simulons la température sur la scène de crime. Le tout aussi pour ne pas perturber le développement de la larve.”

Reste à vérifier chaque jour et attendre les mouches. La durée de l’opération varie en fonction de la phase où elles se trouvent, ce qui va de quelques jours à deux ou trois semaines. Selon l’espèce, déterminée au microscope sur base de clés d’identification, on peut calculer quand les œufs ont été pondus, moment où la victime était déjà morte. “Nous prenons toujours une marge d’un jour”, répond Sofie Van Poucke, interrogée sur la précision des calculs. “Parce que nous travaillons avec des êtres vivants. Comparez-le à une grossesse chez la femme: elle dure normalement neuf mois, mais elle dure un peu plus longtemps chez certaines. Notre marge est plus ou moins d’un jour.”

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