La bataille pour le Seize a déjà commencé

On ignore s’il y pense chaque matin en se rasant, mais Paul Magnette lorgne bien sur le 16, rue de la Loi. On le sait, le socialiste aurait aimé occuper le Lambermont à la place d’Alexander De Croo. Il avouera d’ailleurs ses regrets le jour-même de la prestation de serment de son co-formateur. Mais après une nouvelle nuit blanche de négociations, Paul Magnette avait finalement cédé la place au libéral flamand. Car, pour le bien du pays, la place devait revenir à un Flamand, expliquait le Carolo qui resta donc à la place Charles II et au boulevard de l’Empereur. Le Seize attendra, ce n'est que partie remise.

À seize mois des prochaines élections fédérales, Paul Magnette avance ses pions. Et à en croire les sondages d’opinion et les projections en sièges à la Chambre, la famille socialiste est bien partie pour demeurer la première force politique du pays. Celui qui sera assurément reconduit à la tête du PS - faute d’adversaire - semble idéalement placé pour diriger le futur gouvernement. Parfait bilingue et expérimenté, il coche toutes les cases pour occuper le poste.

Mais paradoxalement, son plus gros avantage constitue aussi son principal handicap. Un socialiste francophone peut-il résolument diriger le pays alors que la Flandre n’a jamais été aussi à (l'extrême) droite? La N-VA n’a d'ailleurs pas tardé à rejeter catégoriquement cette option, à moins d’obtenir ce “confédéralisme” dont elle rêve tant. Comme en 2020, Magnette et De Wever devraient logiquement se retrouver autour de la table en 2024 (voire 2025). Leur fameux accord de base estival, notamment sur le volet institutionnel, pourrait-il cette fois être définitif?

Quel prix Magnette serait-il prêt à payer pour s’allier à un parti qui ne souhaite, rappelons-le, ni plus ni moins que la fin de la Belgique? En l'état actuel des choses, la N-VA est incontournable et les francophones ne pourront écarter indéfiniment la représentation d'une majorité de Flamands au fédéral. Un sacré casse-tête politique s’annonce.

Paul Magnette n'est évidemment pas seul dans la course au Seize. Conner Rousseau, qui a brillamment remis les socialistes flamands sur le devant de la scène, pourrait revendiquer la fonction si Vooruit confirme sa renaissance. D’autant plus qu’une alliance avec la N-VA se profilerait au nord du pays. Et si la N-VA venait à réclamer le poste, Zuhal Demir serait une candidate crédible. Secrétaire d’État sous Charles Michel et à présent ministre flamande, l’ambitieuse Genkoise est désormais l’une des figures du parti.

Et Georges-Louis Bouchez? S’il ne l’a jamais déclaré ni même sous-entendu, le président du MR, qui jouit d’une belle cote de popularité en Flandre, se verrait sans doute bien accéder à la plus haute fonction politique du pays, marchant ainsi dans les pas de Charles Michel. C'est un scénario possible s’il parvient à mener son parti en tête en Wallonie et/ou à Bruxelles. Par ailleurs, il lui reste suffisamment de temps pour perfectionner son néerlandais. Et pour cause, les futures négociations s'annoncent encore plus difficiles qu’à l'accoutumée. Avec un nouveau (triste) record pour notre pays?

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