La Cour constitutionnelle suspend le traité de transfèrement avec l'Iran
La Cour constitutionnelle a suspendu jeudi la loi d'assentiment au traité permettant le transfèrement de personnes condamnées conclu entre la Belgique et l'Iran.
"La disposition attaquée semble violer le droit à la vie des victimes en ce qu'elle permet de transférer en Iran une personne qui a été condamnée en Belgique pour avoir commis une infraction terroriste avec le soutien de l'Iran. En effet, la Belgique sait ou doit savoir que l'Iran n'exécutera pas effectivement la peine dans ce cas", déclare la Cour dans un communiqué accompagnant l'arrêt.
Le traité a suscité une vive controverse en Belgique, mais aussi ailleurs dans le monde, ses détracteurs y voyant la porte ouverte à la remise à Téhéran, et à une possible grâce, d’Assadollah Assadi, un diplomate iranien condamné en 2021 à 20 ans de prison à Anvers pour “tentatives d’assassinat terroriste”. Sa remise à Téhéran avait été gelée par la justice belge après le vote du Parlement.
Le gouvernement belge avait défendu le projet comme le seul moyen d’obtenir la libération d’Olivier Vandecasteele, un travailleur humanitaire arrêté le 24 février à Téhéran.
Assadi, l’exemple d’un terrorisme d’Etat mené par l’Iran, selon les opposants au régime
Assadolah Assadi a été condamné en février 2021 à 20 ans de prison par le tribunal correctionnel d’Anvers pour un projet d’attentat terroriste. L’attaque visait un rassemblement de l’opposition iranienne en juillet 2018 à Villepinte, près de Paris, et a été déjouée au dernier moment. Officiellement diplomate attaché à l’ambassade d’Iran à Vienne, l’homme est un agent des services de renseignement iraniens qui a organisé l’attentat et recruté ses complices. Aux yeux des opposants au régime des mollahs, il est le parfait exemple d’un terrorisme d’Etat mené par l’Iran.
Né le 22 novembre 1971, fils d’un Gardien de la révolution, M. Assadi a été enrôlé dans ce corps paramilitaire dépendant directement du Guide suprême dans les années 1980 avant de rejoindre le ministère du renseignement iranien, selon les informations délivrées par le Conseil national de la résistance iranienne dans un livre présenté à la mi-septembre. Il a été en poste à Bagdad dans les années 2000 et a été transféré à Vienne en 2014.
Le complot terroriste a été ourdi dans un contexte tendu en Iran. Les années 2017-2018 ont secoué le pays. Des manifestations populaires ont visé le pouvoir en place qui a rapidement accusé des forces étrangères de les guider. Un projet d’attentat contre l’opposition iranienne avait déjà été déjoué en Albanie en mars 2018. Le 30 juin 2018, c’est la réunion annuelle du Conseil national de la Résistance iranienne qui était visée.
L’événement a rassemblé des milliers de personnes, dont plusieurs dignitaires étrangers, américains et européens, notamment les anciens ministres français Bernard Kouchner et Rama Yade ou l’ex-Premier ministre canadien Stephen Harper, et des figures emblématiques comme l’ex-sénatrice franco-colombienne Ingrid Betancourt, otage des FARC durant six ans.
La police belge a arrêté à Bruxelles deux suspects qui s’apprêtaient à se rendre à cette manifestation munis d’explosifs. Le cerveau de ce complot terroriste, Assadolah Assadi, a été interpellé le 1er juillet en Allemagne et extradé en Belgique malgré sa qualité de diplomate.
Dans une note de février 2020, la Sûreté de l’Etat a décrit l’intéressé comme un officier du ministère iranien du renseignement (MOIS) opérant sous couverture diplomatique, dépendant du département 312 dudit ministère considéré comme une organisation terroriste. Il était le commandant opérationnel du projet d’attaque qui “a été conçu au nom de l’Iran et sous son impulsion”.
Pression de l’Iran sur la Belgique
L’homme est important puisqu’il reçoit régulièrement la visite de l’ambassadeur d’Iran en prison et, d’après une note de la Sûreté, ce dernier a même été accompagné le 13 août 2019 d’une délégation de haut niveau venant d’Iran, comptant notamment un homme considéré comme le superviseur des opérations du MOIS au sein des ambassades.
Dès l’arrestation du diplomate terroriste, les autorités iraniennes ont fait pression sur la Belgique pour obtenir la libération de M. Assadi, a reconnu au parlement le ministre de la Justice, Vincent Van Quickenborne. Elles ont notamment dénoncé une violation des conventions de Vienne qui organisent l’immunité diplomatique. De leur côté, les autorités belges sont revenues avec le cas du Dr Djalali, citoyen irano-sudéois, professeur invité à la VUB arrêté en Iran en 2016 et condamné à mort l’année d’après.
“Dialogue ouvert” entre la Belgique et l’Iran
Une rencontre a eu lieu le 19 février 2022 entre la ministre des Affaires étrangères, Sophie Wilmès et son homologue iranien lors de la réunion annuelle de Munich consacrée à la sécurité. Selon les comptes-rendus officiels, il a été question de “dialogue ouvert” et de “coordination internationale”. Aucun des deux dossiers n’est cité.
Les événements ont pris une autre tournure le 24 février 2022. Les autorités iraniennes ont arrêté à Téhéran un travailleur humanitaire belge, Olivier Vandecasteele, qui s’était rendu dans ce pays - qu’il connaît bien- malgré les avertissements des Affaires étrangères. A ce jour, le motif de l’arrestation demeure obscur. L’homme est incarcéré dans des conditions inhumaines et n’a pu recevoir que quelques visites consulaires, au contraire de M. Assadi. Le 29 novembre, sa famille a annoncé qu’il avait entamé une grève de la faim.
Le dépôt au parlement d’un traité de transfèrement de prisonniers entre la Belgique et l’Iran a révélé l’affaire à la fin juin. Il ne fait guère de doute que la République islamique d’Iran, adepte de la diplomatie des otages depuis sa création, a fait du travailleur humanitaire une monnaie d’échange contre son “diplomate”. Le texte autorise le transfert de personnes condamnées afin qu’elles purgent leur peine dans leur pays d’origine. Il est le fruit d’une proposition de négociation faite par l’Iran à la Belgique en 2016 et acceptée par celle-ci en décembre 2017. Le document a été signé le 11 mars 2022, deux semaines après l’arrestation de M. Vandecasteele. Les services de renseignement et de sécurité ont soutenu la démarche car elle permet de négocier avec la République islamique sur la base d’un instrument de droit international classique. Le 4 juillet, la Sûreté de l’Etat a même rencontré les députés afin de les sensibiliser à l’importance du texte. Après de vifs et longs débats, le traité a été approuvé en séance plénière le 20 juillet.
Vague de protestation
L’initiative a provoqué une vague de protestation, non seulement d’une partie de l’opposition politique belge mais aussi dans le monde. L’opposition iranienne et de nombreuses personnalités étrangères, notamment américaines, ont dénoncé les effets que pourrait avoir ce traité. Il s’apparenterait à une forme d’amnistie d’un homme condamné pour des faits graves de terrorisme et risque de faire de la Belgique une forme de base opérationnelle des agents du régime iranien. A l’échelon des autres gouvernements, la discrétion est en revanche de mise. La France, première concernée, a indiqué en juillet qu’elle suivait “avec une attention particulière” l’affaire. Elle subit elle aussi la diplomatie des otages de l’Iran. Au total, sept Français sont détenus aujourd’hui en Iran. A la mi-mai, plusieurs médias outre-Quiévrain considéraient que ceux-ci pourraient constituer une monnaie d’échange contre Assadi.
La France est par ailleurs à l’origine de la désignation en janvier 2019 de la Direction de la sécurité intérieure du ministère du renseignement iranien et de deux individus directement impliqués dans le projet d’attentat sur la liste européenne des personnes et entités sanctionnées pour actes de terrorisme. Outre M. Assadi, cette liste comprend le nom de Hashemi Moghadam, à l’époque vice-ministre du renseignement iranien, accusé d’être le commanditaire du projet d’attentat.
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