La proposition du décret "aide à la presse" adoptée en Commission

La Commission de l'Audiovisuel du parlement de la Communauté française a adopté mardi matin la proposition de décret prévoyant, pour cette année seulement, le versement anticipé de 85% des aides 2008 à la presse quotidienne. Il conditionne la liquidation des 15% restant au maintien de l'emploi dans les entreprises concernées. L'opposition MR et Ecolo s'est abstenue.

Réponse à la crise du secteur
Le texte proposé initialement par le PS a toutefois été amendé par la majorité, à l'initiative d'Anne-Marie Corbisier (cdH). Ici aussi, l'opposition s'est abstenue. Il prévoit de réserver ce dispositif exceptionnel aux groupes de presse qui en font la demande expresse par écrit avant le 15 mai. Cela devrait répondre aux prises de position de certains éditeurs, qui ne seraient pas intéressés par une telle aide anticipée mais placée sous condition.

La proposition fait cependant suite aux difficultés économiques auxquelles sont confrontés les éditeurs de presse quotidienne, à la suite de la crise et de la diminution de leurs ressources publicitaires. Ainsi, le texte fait suite aux appels qu'ils ont lancés, demandant le doublement de l'aide de 6,2 millions annuellement octroyée par la Communauté à la presse.

Les subsides tombent pus tôt cette année
Mais le gouvernement n'a pu accéder à cette demande, arguant d'un budget 2009 déjà voté et de l'incertitude planant sur la situation financière future de la Communauté. A l'occasion d'une concertation avec toutes les parties concernées (éditeurs, journalistes, gouvernements des entités, syndicats), elle a toutefois proposé le versement anticipé d'une partie de l'aide habituellement versée en fin d'année, en raison d'une procédure d'attribution et de contrôle particulièrement longue.

Le reliquat de 15% restera versé en fin d'année mais les éditeurs qui auraient réduit le nombre de leurs journalistes seraient sanctionnés en perdant un tiers de ce reliquat, sauf si cette réduction est opérée en accord avec les syndicats.

Peu d'enthousiasme des éditeurs
Repris sous forme d'initiative parlementaire (pour raccourcir la procédure d'adoption, en raison de la proximité des élections), le dispositif n'a pas suscité l'enthousiasme des éditeurs, qui considèrent la condition mise au versement du reliquat comme particulièrement intrusive et pressentent une remise en cause du décret de 2004 qui règle l'aide à la presse.

Certains d'entre eux ont même récemment fait savoir que le système proposé par le gouvernement ne les intéressait guère, à l'instar de l'administrateur délégué du groupe Rossel Bernard Marchant, le matin même sur les ondes de la RTBF-radio.

États généraux
Mardi matin, la chef de file cdH Anne-Marie Corbisier, qui n'avait pas cosigné le texte, a voulu rencontrer cette situation en présentant son amendement. Ce dernier une fois adopté, le cdH s'est joint au PS pour voter la proposition, tout en s'accordant avec les autres partis sur le fait que les véritables problèmes que connaît la presse quotidienne seront abordés lors des États Généraux qu'organisera le prochain gouvernement.

Sur les bancs réformateurs, Philippe Fontaine a relayé la position des éditeurs, parlant de remise en cause du décret de 2004 et dénonçant la liaison entre aide financière et maintien de l'emploi, un "bâton derrière la porte" doctrinaire qui ne lui plaît guère.

"Bâton derrière la porte"
Chez Ecolo, Yves Reinkin et Marcel Cheron ont constaté n'avoir aucun élément permettant de juger des difficultés de trésorerie des différents groupes de presse. Appuyés par le MR, ils ont réclamé en vain l'audition par la Commission de représentants des éditeurs.

La ministre de l'Audiovisuel Fadila Laanan a convenu que le but du décret n'était pas d'améliorer celui de 2004 (ce sera l'affaire des Etats Généraux) mais bien de répondre à une demande ponctuelle des éditeurs. Elle a aussi précisé la juste valeur du rabotage éventuel sur le reliquat: une centaine de milliers d'euros par entreprise de presse. (belga/th)