La solution des experts pour sauver l’économie: “Des tests pour déterminer qui est déjà immunisé”

Notre pays n’a pas encore de stratégie pour se remettre de l’épidémie de coronavirus. Mais certains milieux académiques pensent avoir la solution pour s’engager dans l’après-confinement sans susciter de nouvelle vague de la crise sanitaire. Quatre professeurs de l’ULB (deux économistes, un microbiologiste et un immunologue) lancent un appel au bon sens: la priorité est selon eux de déterminer au plus vite qui est immunisé contre le Covid-19 et constitue donc une force de travail potentielle pour relancer l’économie sans risque. 

Dans une proposition commune, Mathias Dewatripont, Michel Goldman, Eric Muraille et Jean-Philippe Platteau exhortent le gouvernement à revoir ses priorités rapidement en organisant l’après-pic: “Les premières mesures pour préserver l’économie étaient assez simples, notamment avec le chômage temporaire et des reports de crédits. Mais la seconde phase sera un défi plus important: comment faire redémarrer l’économie?”

Ils plaident pour des tests en masse, mais pas seulement pour savoir qui a le coronavirus. Leur idée est de déterminer qui l’a déjà eu - on le sait, souvent sans même s’en être aperçu - et est donc désormais immunisé. Cette démarche, personne ne la suit pour l'instant en Belgique ni en Europe. “Il faut ôter aux gens l’angoisse d’être contaminé et leur redonner confiance pour travailler”, argumentent-ils. Leur crédo: investir sur des tests d’immunité.

La logique est implacable: faute de symptômes, beaucoup de personnes qui ont contracté le virus mais n’y ont pas réagi sont actuellement assignées à résidence comme tous ceux qui sont réellement vulnérables. Or ces personnes immunisées sont une mine d’or pour l’économie: “si vous pouvez les identifier, vous pouvez les envoyer travailler sans risque”. 

Les laboratoires de l’université de Louvain planchent actuellement sur la question: “Nous ne travaillons pas à l’élaboration d'un tel test, mais nous évaluons ceux qui existent déjà et pourraient servir en ce sens”, explique Katrien Lagrou, chef du labo de microbiologie clinique. “Pour l'instant, les tests ne sont pas aussi fiables que ce que les fabricants veulent faire croire mais je pense que nous allons mettre la main sur l’un d’eux qui validera la méthode”. Et comme le test ne doit pas être créé, cela peut aller très vite.

En cas de feu vert scientifique, il reviendra à la task force du gouvernement d’agir bien et vite en concluant un accord avec le producteur des tests. Le ministre Philippe De Backer suit l’évolution de ces examens de très près afin d’intervenir. Les coûts seraient aussi moindres: un test d’immunité reviendrait entre 5 et 10 euros, tandis qu'un test de détection du virus coûte entre 20 et 30 euros. Et le prélèvement, sanguin, est simple et sûr: “Quelques gouttes de sang suffisent et certains réagissent comme un test de grossesse: une ligne indique si vous disposez des anticorps ou pas”. Encore une fois, les travailleurs à risques et essentiels seraient prioritaires: soins de santé, puis les employés de maisons de repos et des supermarchés, par exemple. Mais dans une seconde phase, le test pourra être étendu. 

En sachant quelles parties de la populations sont immunisées, l’assouplissement des mesures de confinement sera également plus proportionné et ciblé, réduisant l’impact sur l’économie. La question est aussi de savoir combien de temps un sujet reste immunisé contre le Covid-19, mais cela permettrait sans doute de tenir jusqu’au vaccin tant attendu.