L’avocate qui a fait condamner l’État explique ce qui va changer pour le citoyen
La décision du tribunal de première instance de Bruxelles a fait l’effet d’une bombe juridique. La justice a en effet donné raison à la Ligue des droits humains (LDH) et à la Liga voor mensenrechten en déclarant illégales les mesures gouvernementales édictées pour contrer la propagation du coronavirus depuis plus d’un an maintenant. “Nous soulignons depuis un an que ces mesures sont fondées sur des sables mouvants juridiques, mais le gouvernement ne voulait pas nous écouter”, confie Kati Verstrepen, avocate et présidente de la Liga voor mensenrechten. Mais que change concrètement cette décision de justice pour le citoyen? Explications.
1) Le gouvernement ne peut plus restreindre vos droits sur base des lois en vigueur
La Liga voor Mensenrechten estime que le gouvernement fédéral outrepasse ses droits depuis le début de la crise. “Nous pensons tout de même que les mesures sanitaires sont extrêmement importantes - nous souhaitons évidemment en finir avec cette pandémie le plus tôt possible - mais si l’on restreint les droits des citoyens de manière aussi importante, il faut le faire correctement”, entame Kati Verstrepen. “Actuellement, les mesures sont fondées sur des sables mouvants juridiques”, insiste-t-elle.
En d’autres termes, les mesures en vigueur actuellement sont dépourvues d’une base légale suffisante. Les lois sur lesquelles le gouvernement s’appuie pour le moment visent en effet à répondre à des urgences ponctuelles et non à une crise qui dure depuis plus d’un an, a estimé le tribunal.
“Imaginez qu’une usine chimique explose demain en Belgique ou qu’un attentat à la bombe ait lieu, un ministre peut décider de confiner la population par sécurité ou pour maîtriser la situation d’urgence. Toutefois, il doit toujours s’agir de mesures très temporaires. Aujourd’hui, ces mêmes lois sont utilisées pour restreindre les droits fondamentaux des citoyens pendant une année entière. C’est inacceptable car cela conduit à une insécurité juridique. Le tribunal nous a suivis sur ce point”, explique Mme Verstrepen. Le gouvernement fédéral doit donc se remettre au travail pour élaborer une nouvelle loi pandémie, et surtout, une loi solide.
2) Les masques ne tomberont peut-être pas, mais les amendes corona seront plus facilement contestables
La décision du tribunal supprime la base juridique des mesures, mais n’abolit pas les règles elles-mêmes. “Aujourd’hui, toutes ces mesures restent donc en place”, rappelle Kati Verstrepen. “Il faut toujours garder ses distances, porter un masque et l’Horeca n’est toujours pas autorisé à ouvrir”. Pourtant, quelque chose a considérablement changé depuis hier/mercredi: Le gouvernement est soudainement devenu plus vulnérable face aux citoyens qui veulent contester leur amende corona.
Supposons que vous participez à une “lockdown party” et que la police vous inflige une amende de 250 euros. Vous pouvez évidemment contester cette amende en justice. Tout comme un coiffeur qui a enfreint les règles en ouvrant tout de même son salon peut également contester un éventuel procès-verbal. Cela a toujours été possible mais désormais, le fêtard ou le coiffeur “illégal” dispose d’une base juridique plus solide.
“La probabilité qu’une personne soit dispensée de payer son amende si elle va au tribunal a augmenté”, confirme Kati Verstrepen. “D’autres juges pourraient s’appuyer sur ce jugement pour déclarer l’amende illégale. Mais ce n’est pas une certitude. Le juge peut également rendre une décision différente et ne conserver que l’amende. De plus, le gouvernement a décidé de faire appel. S’il gagne en appel, nous serons de retour à la case départ.”
3) Plus question de couvre-feu et le gouvernement devra discuter des mesures ouvertement et publiquement
L’ordonnance du tribunal bruxellois donne trente jours au gouvernement fédéral pour introduire une véritable loi pandémie afin de remédier à cette situation illégale. “C’est ce que nous et de nombreux constitutionnalistes demandons depuis des mois”, soupire Kati Verstrepen. “Nous l’avons fait par le biais de lettres ouvertes et d’articles d’opinion, mais ils remettaient toujours à plus tard et ne voulaient pas nous écouter.” Maintenant, le gouvernement est obligé d’y travailler. Et rapidement.”
On pourrait croire qu’élaborer une telle loi est une formalité, mais c'est loin d’être le cas. “Cela changera la vie de tous les citoyens de ce pays pendant la crise sanitaire”, poursuit Kati Verstrepen. “Une loi solide pour gérer la pandémie devra aborder deux points importants. Premièrement, le gouvernement sera obligé de discuter ouvertement et publiquement des mesures au Parlement avant leur introduction. Prenons l'exemple de la fameuse règle de la fenêtre dans les trains vers la Côte. Le gouvernement aura l’obligation d’expliquer au Parlement pourquoi une telle règle est nécessaire.”
Cela signifie que le Premier ministre Alexander De Croo ne pourra plus se contenter de venir présenter les mesures lors d’une conférence de presse. “Il faudra d’abord en débattre. Et ce n’est que lorsqu’une majorité du Parlement verra l’utilité de la mesure qu’elle sera acceptée après un vote. Mais si le débat montre que la mesure proposée n’a pas de sens, elle ne recueillera pas suffisamment de voix, et ne sera donc pas adoptée”, explique Kati Verstrepen.
Le deuxième élément qui va changer, selon l’avocate, concerne le couvre-feu. Il ne pourra plus être instauré. “Une telle loi pandémie devra toujours préciser qu’elle ne peut pas suspendre nos droits fondamentaux, mais seulement les limiter”, explique Mme Verstrepen. “C’est une très grande différence. Le couvre-feu est un exemple de suspension de nos droits: le gouvernement nous interdit de sortir entre certaines heures. C’est une suspension des droits fondamentaux et ce n’est donc pas possible. En revanche, le gouvernement pourra toujours restreindre nos droits par le biais d’une interdiction de se rassembler. Par exemple, vous pouvez sortir, mais seulement par groupes de quatre et en portant un masque dans les endroits très fréquentés. C’est une restriction des libertés et c’est possible, à condition que les restrictions soient nécessaires et équilibrées.”
La question est de savoir si le gouvernement appliquera effectivement la nouvelle loi pandémie comme le demandent Ligue des droits humains et la Liga voor mensenrechten. Car le projet de loi actuellement sur la table est inadéquat. “Et le gouvernement le sait”, souligne Kati Verstrepen. Il va devoir s’atteler à élaborer une loi qui soit à 100% juridiquement valable. S’il ne le fait pas dans les trente jours, il devra payer 5.000 euros d'astreinte pour chaque jour de retard. Avec un plafond de 200.000 euros. “Si tel devait être le cas, nous ferions don de cet argent à une bonne cause”, précise Mme Verstrepen. “Mais nous espérons que nous n’en arriverons pas là.” Si le gouvernement était prêt à temps, mais si la solidité de sa nouvelle loi laissait à désirer, la Liga voor mensenrechten promet déjà de la remettre en question. “Nous nous tenons prêts, mais nous espérons que le gouvernement a appris sa leçon”, conclut sa présidente.
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