Le premier “patient corona” belge n’est pas immunisé: “Moi qui pensais être en sécurité partout”

Philip Soubry a été le “premier patient corona belge” officiel après son rapatriement de Wuhan en février avec une dizaine d’autres Belges. Tous avaient été testés négatifs à leur arrivée à part le quinquagénaire qui était très étonné de son résultat: “Je ne sais absolument pas où j’ai attrapé le virus”, avait-il dit. Il n’a par contre jamais présenté de symptômes du coronavirus: pas de toux, pas d’écoulement nasal, pas de fièvre et encore moins de souffle court. Après 11 jours à l’hôpital Saint-Pierre à Bruxelles, qui était encore l’un des seuls centres de référence en Belgique, il a repris le cours de sa vie.

“Ce n’est que maintenant que je réalise que j’ai eu de la chance. Je ne suis plus tout jeune et je suis un traitement pour le cœur”, explique-t-il à Het Laatste Nieuws. Après la médiatisation de sa “condition” et surtout de sa quarantaine, il est littéralement devenu le patient le plus célèbre du pays et source de curiosité dans les bars. “Après ma sortie de l’hôpital, on m’a même demandé des photos dans les cafés! ‘Un selfie contre une bière’, me disaient les gens. Heureusement, maintenant, plus personne ne m’interpelle”. 

Philip Soubry réside à Courtrai actuellement, mais il a continué à voyager avant que le confinement ne soit imposé à toute la Belgique: il s’est rendu à Parme en Italie dans le cadre de son travail pour LVD Group. C’est pour cela qu’il travaillait en Chine comme constructeur de machines depuis des années. “La première fois, mes collègues et moi avons encore pu rejoindre l’Italie en avion, mais nous avons dû fuir fin février car le nord du pays était placé en lockdown. La fois suivante, nous avons pris la voiture en passant par le Luxembourg, l’Allemagne et l’Autriche. Je pensais pouvoir évoluer partout sans danger, car mon médecin à Bruxelles m’avait dit ‘Maintenant vous êtes immunisé, vous n’attraperez plus jamais le virus’. Mais mercredi soir, on m’a soudain appris le contraire”, s’étonne le Courtraisien.

Vu qu’il souffrait d'un léger rhume et que son employeur fait tester d'office tous ceux qui sont censés travailler à l’étranger, Phlip Soubry s’est rendu dans un labo de Gand. Il a été testé au virus, mais a aussi été soumis à un test d’immunité pour vérifier son taux d’anticorps au Covid-19. “Le résultat était doublement négatif: je n’ai pas le coronavirus, mais apparemment je ne suis pas immunisé non plus! Heureusement, j’ai toujours été prudent et porté un masque buccal. Par contre, j’avais rendu visite à mes parents”, reconnaît-il, déconcerté. 

Le professeur Katrien Lagrou, chef du laboratoire en microbiologie de l’UZ Louvain, confirme que les tests mis sur le marché en Belgique sont bel et bien fiables. “Je préfère par contre parler de tests aux anticorps que de tests d'immunité”, nuance la spécialiste. “Même si des anticorps sont découverts chez un sujet qui a été contaminé précédemment, cela ne veut pas dire que cette personne est dans les faits immunisée contre le virus”, précise-t-elle encore.

Mais dans le prélèvement sanguin de Philip Soubry, il n’y avait tout simplement aucun anticorps. “Cela découle sûrement du fait qu’il n’a pas été malade à cause du virus et qu’il n’a eu qu'une forme asymptomatique de celui-ci”, poursuit le professeur Lagrou. “De précédentes études sur les anticorps de patients qui ont été sévèrement atteints et donc hospitalisés ont démontré qu’eux avaient bel et bien développé des anticorps. Mais les résultats sont limités: il y a trop peu de gens testés pour en être sûr”.

L’experte résume: “Cela peut donc aussi être un hasard si Mr Soubry n’est pas immunisé mais il est bien possible que ceux qui n’ont pas fait de fièvre ou n’ont pas été réellement malades après leur infection au Covid-19 ne développeront jamais d’anticorps et seront une nouvelle fois porteurs du virus. Par contre, il me semble hautement improbable qu’il ait eu ces anticorps et qu'ils aient déjà disparu de son organisme. Personne ne peut être sûr de tout cela actuellement évidemment. Il faut encore de nombreuses études en ce sens”. 

Philip Soubry, de son côté, n’espère qu'une chose: retourner en Chine au plus vite. Là-bas, il a une femme qu'il n’a plus vue depuis trois mois. “On fait des appels vidéo chaque jour, mais elle me manque. Tout comme la nourriture locale et mes affaires. Ici, je n’ai rien, j’ai même dû m’acheter de nouveaux vêtements”, explique le Belge.