Les policiers d’élite brisent le silence: “Salah et les autres nous rient au nez”
Même leurs amis ignorent en quoi consiste exactement leur travail au sein de la police. Ces policiers d’élite cagoulés, appelés GOTTS pour “Gespecialiseerd Overbrenging Team/Transfert Spécialisé”, sont responsables du transfert de Salah Abdeslam et des autres accusés dangereux au procès des attentats de Bruxelles. Ils sont également chargés des fameuses fouilles à nu qui ont fait tant de bruit depuis le début des débats. Quatre GOTTS rompent aujourd’hui le silence dans les colonnes du journal Het Laatste Nieuws. “Si ce sont de si bons garçons, qu’on leur donne vite fait un bracelet électronique pour qu’ils puissent se rendre en taxi à leur procès”, ironise l’un d’entre eux.
Ces policiers d’élite font partie de la Direction de la protection de la police fédérale et sont chargés de la protection des transferts de détenus dangereux. Marc Dutroux, Kim De Gelder, Nizar Trabelsi ou encore le baron de la drogue Flor Bressers: tous ces dangereux criminels se sont retrouvés sur le siège arrière d’un de leurs véhicules blindés.
Cette unité d’élite existe depuis plus de vingt ans. “Aucun incident ne s’est jamais produit durant toutes ces années”, entame l’un des policiers. “Est-ce parce que nous avons mal évalué la dangerosité de ces prisonniers? Ou peut-être parce que pendant vingt ans, nous avons fait en sorte que rien ne puisse arriver?”
“On nous dépeint comme des barbares qui humilient les prisonniers pour notre plaisir”
Les policiers se montrent volontairement cyniques. Ils estiment que leur travail a été “ridiculisé devant le monde entier” depuis le début du procès des attentats de Bruxelles. En cause, les fameuses fouilles à nu avec génuflexions auxquelles sont soumis les accusés, que ceux-ci considèrent comme inacceptables. Depuis, la justice a interdit ces fouilles à nu systématiques et les policiers doivent justifier cette pratique individuellement, au cas par cas, sous peine d’une astreinte pour l’État belge pouvant aller de 1.000 jusqu’à 50.000 euros par détenu. Même le grand patron de la police fédérale, Marc De Mesmaeker, a déjà dû venir s’en expliquer à la barre des témoins.
Équilibre rompu
“On nous dépeint comme des barbares qui humilient les prisonniers pour notre plaisir”, dénonce l’un de ces policiers. Les quatre hommes se disent soulagés de pouvoir enfin donner leur version des faits. Pour leur sécurité et pour ne pas perdre leur emploi, ils témoignent sous couvert d’anonymat.
“Il existe une sorte de respect mutuel entre les prisonniers et nous. Les détenus savent où se situe la limite et l’inverse est également vrai. Mais cet équilibre a été totalement rompu lors du procès... Désormais, lorsque nous arrivons à Haren le matin, certains accusés s'avancent vers nous avec un grand sourire. Ils s'estiment vainqueurs car nos procédures de sécurité ont été spécialement modifiées pour eux. Des procédures pourtant établies légalement depuis des années. Nous n’avons pas inventé l'eau chaude. Ces procédures pour ce type de prisonniers sont exécutées exactement de la même manière dans un très grand nombre de pays”, soulignent-ils en n’épargnant pas la présidente de la cour d’assises, Laurence Massart.
Jamais le même trajet
Salah Abdeslam et Mohamed Abrini, pour ne citer qu'eux, ne sont pas n’importe qui. Tous deux ont déjà été condamnés à la prison à perpétuité lors du procès des attentats de Paris. “Qu’ont-ils encore à perdre”, s'interroge l’un des policiers. “Ils ont fait plus de 130 morts à Paris et plus de 30 morts à Bruxelles, alors qu’importe pour eux de planter un couteau en plastique dans le cou d’un policier ou de leur avocat? Nous ne devons leur laisser aucune marge de manoeuvre. C’est pourquoi nos procédures de sécurité sont aussi strictes.”
Rien n'est laissé au hasard chez les GOTTS. Par exemple, ils n’empruntent jamais le même chemin pour aller d'un point A à un point B. “Notre métier devient dangereux quand il est prévisible”, disent-ils. “Il faut toujours garder à l’esprit l’idée que quelqu’un veut les attaquer ou les libérer.”
“On ne déchire pas les sandwichs des prévenus par plaisir, mais bien pour s’assurer qu’aucune lame de rasoir n’y est cachée. Même chose pour les fouilles destinées à empêcher le prévenu de cacher quoi que ce soit qui pourrait faciliter sa fuite. Cela peut être sous les lèvres, sous les aisselles, au niveau du scrotum et de l’aine, ou encore dans l’anus.” Toutefois, ils assurent qu’ils ne fouillent jamais à l’intérieur et qu’ils agissent toujours avec respect. “On leur demande simplement de plier les genoux. Si quelque chose y est caché, cela tombera directement par terre.”
Certains détenus se montrent pour le moins inventifs lorsqu’il s’agit de dissimuler des objets, comme une brosse à dents aiguisée, une lame de rasoir ou encore de la drogue.
Musique satanique
Une autre polémique de ce début de procès concernait la “musique satanique” que les policiers feraient écouter aux accusés durant leur transfert. Les policiers avouent avoir passé du Rammstein (un groupe de métal allemand, NDLR) sur la radio de leur véhicule. “Aucunement via des écouteurs, la police fédérale n’en a même pas! La loi stipule que nous ne pouvons retirer qu’un seul sens aux prisonniers. Nous leur bandons donc les yeux pour qu'ils ne puissent rien voir. Hormis ça, nous passons juste de la musique dans le véhicule... Si on opte pour du Rammstein, c’est uniquement parce qu’il y a très peu de silences dans leurs chansons et le détenu ne peut ainsi pas entendre ce qu’on se chuchote entre policiers ou des bruits de fond comme un avion qui décolle ou un tram.”
Les policiers ne diffusent d’ailleurs pas que du métal. “On a déjà passé du Céline Dion. Et aux États-Unis, ils mettent parfois du Britney Spears! On pourrait essayer de leur passer “Hit me, baby, one more time!”, mais on aurait encore droit à une nouvelle plainte”, ironisent-ils.
Coran
Les policiers du GOTTS veulent simplement pouvoir faire leur travail, soulignent-ils. “Nous devons protéger tout le monde. Les détenus, mais également l’ensemble de la population.” Ils appellent dès lors la présidente de la cour d’assises, Laurence Massart, à faire preuve d’empathie à leur égard. “Ce serait bien si, à l’avenir, la présidente ne montait pas immédiatement le chauffage du box lorsque les accusés se plaignent d’avoir froid. Et nous? On transpire comme des bêtes avec ces cagoules.”
Un collègue opine du chef. “Même chose pour le Coran. Un accusé a reçu l’autorisation d’en apporter un au procès. Cela peut paraitre inoffensif, mais cela signifie qu'il faut à chaque fois fouiller ce livre de fond en comble. Et après, que voudront-ils apporter demain?”
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