Marguerite a passé 5 heures à évacuer les victimes des inondations à Angleur: “Je ne suis pas une héroïne”
TémoignageC'est sans aucun doute l’une des photos marquantes des inondations à Angleur, près de Liège: une jeune femme au regard bleu azur, les poings levés au milieu des débris alors que l’eau lui arrive jusqu’aux épaules. Marguerite della Faille, 20 ans, a passé plus de 5 heures à évacuer les habitants, sauvant probablement plusieurs vies. “Je ne me considère pas comme une héroïne”, déclare cette courageuse étudiante infirmière que nous avons rencontrée. “Je n’ai fait que ce que j'estimais devoir faire”, confie-t-elle.
En ce funeste 15 juillet, l’Ourthe a littéralement englouti la commune d’Angleur, près de Liège. L’eau est ainsi montée jusqu’à deux mètres de hauteur par endroits. Les photos des habitants se précipitant en lieu sûr avec quelques affaires rassemblées à la hâte ont fait le tour des médias, même internationaux. Une photo en particulier est rapidement devenue le symbole de la catastrophe des inondations et a fait la couverture de Paris Match: celle qui montre le désespoir sur le visage froid de Marguerite della Faille, seule dans l’eau et entourée de débris.
Nous avons rencontré la jeune femme de 20 ans, qui vit toujours chez ses parents à Neupré, dans la rue Garde-Dieu à Angleur, là où l’horreur a eu lieu il y a deux semaines. “Mon père loue une maison à l’angle de cette rue”, raconte Marguerite. “Le 15 juillet au matin, il a reçu un appel de son locataire dont la cave était inondée, lui demandant s'il avait une pompe à eau. Nous sommes immédiatement venus sur place avec mon père et ma sœur Capucine. Mais alors que l'eau montait rapidement, l’électricité a été coupée. En un rien de temps, l’eau a atteint deux mètres de hauteur, c’était comme un tsunami. C’était l’apocalypse, je ne reconnaissais plus la rue.”
“Les gens étaient littéralement paralysés”
“Partout, je voyais des gens qui sortaient la tête par les fenêtres, je les entendais crier, paniqués, demandant désespérément ce qu’ils devaient faire”, poursuit Marguerite. Même la police semblait débordée alors que les pompiers n'étaient pas encore là. Une brume de peur et de panique avait envahi les rues. Les gens étaient littéralement paralysés. Moi, j’étais debout devant la maison de papa, je regardais autour de moi et j'étais en état de choc”, se souvient l'étudiante.
“C'est alors que j’ai entendu un couple âgé - je dirais qu’ils devaient avoir 80 ans - dire depuis leur fenêtre qu’ils n’avaient pas la force de sortir de leur maison et qu’ils allaient donc rester là. Puis je me suis dit: ‘Non, il faut évacuer toute la rue, car Dieu sait ce qui peut encore se passer, jusqu’où l'eau peut encore monter.’ Sans réfléchir, j’ai enlevé mes chaussures et mon pull et, en une fraction de seconde, j’ai marché droit dans l’eau. Et avec moi, une dizaine d’autres personnes, dont ma sœur Capucine. Dans ces moments-là, tu ne réalises pas vraiment ce que tu es en train de faire, que tu risques ta vie. Mais je ne me suis pas sentie en danger. Je me suis dit: ‘Je peux marcher, je peux nager. Que peut-il m’arriver?’ Et puis, il n’y avait pas de courant. Il fallait surtout faire attention aux bulles dans l'eau, car cela signifiait qu’il y avait une bouche d’égout à cet endroit, et je risquais d’être aspirée par l'eau.
Titanic
“Je suis d’abord venue en aide à ce couple âgé. Nous avons trouvé une échelle, l’avons mise dans l’eau contre leur maison jusqu’au premier étage et nous les avons aidés à descendre. Mais cette vieille dame n’aurait jamais pu traverser l'eau. Du coup, j’ai vu un morceau de clôture de jardin qui flottait et je l’ai utilisée comme radeau pour la faire traverser. On aurait dit Rose dans Titanic. On lui parlait tout le temps pour la rassurer. En plus, c'était son anniversaire”, se souvient Marguerite.
Se frayant un chemin dans l’eau, Marguerite est allée de maison en maison pour demander si les habitants avaient besoin d’aide. Elle ignore le nombre de personnes à qui elle a porté secours, mais elle se souvient qu’elle est restée plus de 5 heures dans l'eau. Elle a notamment tiré des enfants sur un matelas gonflable jusqu’à la terre ferme, porté un garçon de quatre ans sur ses épaules tout en tenant un chihuahua tremblant de peur dans une main, tenu courageusement un sac contenant un chat paniqué au-dessus de l'eau, pris les enfants d’une maman qui n’avait pas suffisamment de bras pour tous les emmener. Elle a apaisé et réconforté. Et dès qu’elle avait les mains libres, elle les tendait au-dessus de l’eau pour montrer qu’elle était disponible pour aider.
“Un héros, c’est quelqu’un qui porte une cape, qui fait quelque chose d’extraordinaire, quelque chose que les enfants admirent. J’ai juste fait ce que je sentais devoir faire. Pour moi, c’était... normal. C’est ma façon de fonctionner.”
Pourtant, Marguerite ne se considère pas comme une héroïne. “Pas du tout”, répond-elle modestement. “Un héros, c’est quelqu’un qui porte une cape, qui fait quelque chose d’extraordinaire, quelque chose que les enfants admirent. J’ai juste fait ce que je sentais devoir faire. Pour moi, c’était... normal. C’est ma façon de fonctionner.”
La jeune femme ne veut pas non plus dire qu’elle a sauvé des vies ce jour-là. “C'est possible, mais on ne le saura finalement jamais”, dit-elle. “À partir de quel moment pouvez-vous dire que vous avez sauvé une vie?”
Mazout
Marguerite se souvient que l'eau était glacée lorsqu’elle y est entrée la première fois. Mais le froid n'était qu’un détail, selon elle. “Cette horrible odeur âcre de mazout était bien pire à supporter. Deux jours plus tard, je sentais encore le mazout. J’ai dû laver et sécher mes vêtements trois fois de suite pour me débarrasser de l’odeur et pourtant, elle était toujours là. Quand je suis rentrée chez moi, je pensais avoir tout rêvé. Je me disais: ‘Ce n’est pas possible que je sois assise ici, au chaud et au sec, alors qu’il y a moins d’une heure, je secourais des gens dans cette eau glacée.’ Le contraste était à ce point saisissant que je ne pouvais le réaliser.”
Deux semaines plus tard, ce qui s'est passé ce jour-là reste toujours aussi surréaliste à ses yeux. Lorsqu’on lui demande ce qu’elle voit lorsqu’elle se regarde sur cette fameuse photo, elle répond: “Je sais que c’est moi, mais je n’arrive pas à me rendre compte que j’étais vraiment là, en train de faire ce que j’ai fait. Je peux voir à mon regard que je ne paniquais pas. Mais mon expression trahit que j’ai ressenti la peur de tous ces gens qui, en une fraction de seconde, ont dû tout laisser derrière eux, leur vie entassée dans un sac fait à la hâte. C’est ce dont j’étais consciente pendant tout ce temps. Je me suis toujours mise à la place de ces victimes. Ce qu’ils ont vécu était si terrible que le moins que je puisse faire était de les aider.”
Se montrer solidaire avec les gens dans le besoin, c’est comme cela que ses parents l’ont éduquée. “Mon père nous a toujours dit: ‘Si quelque chose de grave arrive, ne criez pas, réagissez. ‘Faites quelque chose, rendez-vous utiles.’”
Un cadeau inestimable
“Dans une telle situation, on repousse ses limites, on ne ressent plus la douleur. On ne la ressent qu'après coup, en fait. Ainsi, pendant deux jours, je n’ai pas pu m’asseoir sur une chaise ou me retourner dans mon lit sans avoir mal. Mais qu’est-ce que cela représente par rapport aux souffrances endurées par les victimes des inondations? Rien”, souligne la jeune Neupréenne.
Il n'est donc pas surprenant qu’une personne comme elle souhaite devenir infirmière. Si Marguerite ne se considère peut-être pas comme une héroïne, elle a néanmoins reçu quelque chose d’inestimable à ses yeux en échange du courage dont elle a fait preuve à Angleur: “La fierté de ma famille”, dit-elle avec émotion. “Mon père a pleuré quand il m’a vue dans Paris Match. Lire dans les yeux de mes parents et grands-parents à quel point ils sont fiers de moi est, pour moi, la plus belle chose qui soit”, conclut la jeune femme, décidément une source d’inspiration.
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