Photos, lettres, fichiers audio et vidéo: l'ordinateur retrouvé rue Max Roos a livré tous ses secrets à la cour

L’Euro 2016 de football en France, le Thalys ou l’Eurostar en Angleterre... Les cibles potentielles de nouveaux attentats, après ceux de Paris le 13 novembre 2015, étaient nombreuses, ont ainsi révélé des fichiers audio enregistrés par les terroristes peu avant leur passage à l’acte et présentés mercredi à la cour.

Dans un premier fichier, enregistré entre le 13 et le 15 mars 2016, Najim Laachraoui, l’artificier de la cellule, s’adresse à “Abou Ahmed”, le chef présumé de la cellule terroriste, qui se trouve apparemment en Syrie. Selon les enquêteurs, il s’agirait d’Oussama Atar, l’accusé absent devant la cour d’assises car il est présumé mort en Syrie.

Najim Laachraoui y énumère plusieurs idées d’attentats, avec des cibles et des modus operandi multiples. Il avait ainsi pensé remplir une camionnette ou une voiture de 600 à 700 kg de TATP, ou placer cet explosif sous des rails. Concernant les cibles, il évoque l’Angleterre et la France, précisant que les “frères” de la cellule préfèrent garder la Belgique comme base de repli. Il propose ainsi de se focaliser sur l’Hexagone, estimant qu’un attentat en Angleterre est “trop risqué”. Plus précisément, la cellule envisage de mener des attaques durant l’Euro de football, qui a eu lieu aux mois de juin et juillet 2016.

Toutefois, si la cellule venait à être débusquée et que les terroristes ne pouvaient “plus bouger”, il y a “assez de cibles, ici”, assure à son interlocuteur celui qui se fera exploser quelques jours plus tard à l’aéroport de Zaventem.

Najim Laachraoui évoque alors un projet dont il a discuté avec les frères El Bakraoui: le kidnapping d’une ou deux personnalités en vue de la libération de “frères” ou “soeurs” ayant “travaillé” pour l’État islamique. Il cite comme exemple Mehdi Nemmouche, l’auteur de l’attentat au Musée juif de Belgique à Bruxelles. Toutes ces propositions avancées restent toutefois soumises à l’approbation du chef de la cellule, “l’émir” Abou Ahmed.

Dans un deuxième message, plus nerveux et enregistré la veille des attentats, Ibrahim El Bakraoui et Najim Laachraoui, les deux kamikazes de Zaventem, expliquent que “la situation est telle” que la cellule, “cramée”, “ne peut plus retarder quoi que ce soit”. Ils fixent la date des attentats au matin du 22 mars, cette fois sans demander l’approbation de leur “émir”.

Ibrahim El Bakraoui y confie que les membres de la cellule avaient “plein de plans, d’idées” mais qu’ils ont été obligés de travailler dans la précipitation par peur de “pourrir” dans une cellule. Cela après que les photos des frères El Bakraoui eurent été diffusées dans la presse. Le métro et l’aéroport sont désignés comme cibles.

Dans ces deux messages audio, Najim Laachraoui dit par ailleurs à son interlocuteur que deux “frères” ont apporté une aide logistique à la cellule. Il s’agit, selon les enquêteurs, des accusés Bilal El Makhoukhi et Hervé Bayingana Muhirwa.

Durant l’après-midi, l’exposé sur le contenu du PC s’est poursuivi. Y ont notamment été retrouvés deux messages de revendication des attentats du 22 mars. L’un est adressé à l’État belge, tandis que l’autre apostrophe les musulmans sur la situation en Syrie.

On a également appris que l’accusé Bilal El Makhouki avait récupéré les armes qui se trouvaient, dans les jours précédant les attentats, à la planque de la rue Max Roos. Un élément qu’il avait toujours nié jusqu’à une audition, en juin dernier, lors de laquelle il a finalement reconnu les avoir déplacées de cache en cache. Il a par contre refusé de donner le nom des personnes qui l’ont aidé dans cette tâche. Une information qui était encore inconnue à ce jour et qui ne se trouvait pas dans l’acte d’accusation.

Malgré “plusieurs années de recherche”, durant lesquelles ils ont fouillé plus de 180 boxes, 220 caves et de nombreux appartements, domiciles ou entrepôts, le tout sur base d’une cinquantaine de perquisitions, les enquêteurs n’ont jamais réussi à mettre la main sur les armes d’assaut.

Les armes en question, ainsi que d’autres, étaient exhibées sur plusieurs clichés retrouvés dans l’ordinateur et diffusés mercredi après-midi devant la cour. Ces photos montrent les kamikazes de l’aéroport, Najim Laachraoui et Ibrahim El Bakraoui, ainsi que l’accusé Mohamed Abrini, posant avec des armes devant un drapeau artisanal de l’État islamique. Une autre photo met en scène leur arsenal exposé devant ce même étendard. Selon les enquêteurs, les clichés auraient été pris la veille des attentats.

L’ordinateur portable contenait également des informations sur les cibles possibles d’attaques et de la documentation sur les armes et les formations paramilitaires. Les enquêteurs y ont également trouvé “une véritable médiathèque” contenant à la fois du matériel islamique classique et du matériel de propagande de l’État islamique.

Enfin, le contenu du PC a été comparé à celui de plusieurs autres appareils qui sont apparus dans le dossier. Certains fichiers se trouvaient ainsi également sur l’ordinateur retrouvé rue du Dries, à Forest. De mêmes clés USB étaient en outre connectées dans les deux appareils. Il s’agit notamment d’une clé USB trouvée chez l’accusé Ali El Hadad Asufi avec les fichiers audio enregistrés sur l’ordinateur portable, ou d’une clé USB également utilisée sur le PC de l’accusé Hervé Bayingana Muhirwa.

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