Un Belge décède pendant son vol retour de Tenerife: “Votre mari ne peut pas être plus près du paradis”

Jos et Christa aimaient voyager. Le couple partait ensemble plusieurs fois par an. “Ces dernières années, nous sommes toujours allés sur l’île (Tenerife, ndlr.) car il y a un très bon hôpital là-bas. Jos était sous dialyse et devait se rendre à l’hôpital trois fois par semaine. Nous avions réservé pour trois semaines mais nous avons écourté le voyage de cinq jours car j’ai vu que Jos était trop malade. J’avais tout arrangé pour qu’il puisse être emmené à l’hôpital immédiatement après l’atterrissage. Jos a passé tout le temps du vol à regarder les nuages. J’ai essayé de lui donner un maximum de confort. Nous étions très proches l’un de l’autre. Je pouvais encore le caresser, le réconforter et l’embrasser. Mais environ trois quarts d’heure avant l’atterrissage, il s’est éteint doucement dans mes bras. Il s’est assis très calmement, comme le Penseur de Rodin. Je ne pouvais plus sentir son pouls.”

Jos Wautelet était un père et un grand-père. Il était originaire d’Anvers, mais vivait à Ardooie avec sa femme, avec qui il était marié depuis 24 ans. “C’était mon mari, mon âme sœur, mon tout. J’ai toujours ri quand j’entendais les gens parler de coup de foudre, mais c’est exactement ce que j’ai vécu avec Jos. Et ça s’est avéré être mutuel. Nous avions tous deux déjà deux fils, mais nous avons décidé de nous lancer.”

Jos a pris sa retraite en mars 2015, mais malheureusement il n’a pas vraiment eu le temps d’en profiter. “Le 24 août de la même année, il a subi sa première dialyse à l’UZA. L’année suivante, il a été opéré neuf fois. Mais Jos ne s’est jamais plaint. Il était reconnaissant pour tout. Il aimait le service de dialyse de l’hôpital Delta à Roulers. Mais la maladie d’Alzheimer était un ennemi qu’il ne pouvait vaincre. Il s’est détérioré année après année, tant physiquement que mentalement. J’ai pris soin de lui jour et nuit. J’ai arrêté de travailler l’année dernière pour pouvoir m’occuper de lui à plein temps. Marcher et manger devenaient de plus en plus difficiles. C’était dur, mais cela n’a jamais été de trop pour moi. Grâce à lui. Pour lui, le verre était toujours à moitié plein.”

“Nous avons tiré de la vie tout ce que nous pouvions. Tout. ‘Work hard play hard’ était notre devise. Jos était un vrai bon vivant. À Tenerife, nous sommes allés dans un restaurant avec beaucoup d’amis. La lumière dans ses yeux en disait long. Il ne se souvenait pas toujours de l’endroit exact où il se trouvait, mais il appréciait vraiment ces voyages. À table, il me regardait souvent, puis il me serrait le bras et c’était un homme comblé.”

Le lundi 8 novembre, son état s’est fortement détérioré. Christa a avancé le vol de retour. “Jos s’est assis à côté du hublot, je me suis assise à côté de lui, mais sur le siège à côté de nous et dans l’allée centrale, le personnel de l’avion avait délibérément interdit aux autres passagers de s’asseoir. Il y avait des gens devant nous et derrière nous, mais les autres passagers ne savaient pas ce qui se passait. L’équipe s’est occupée de tout, très discrètement, je leur suis très reconnaissante de leur soutien professionnel et de leurs paroles chaleureuses. Et aussi le chef du personnel de cabine, Maxime, qui s’est occupé de mes valises après coup alors que la police et le parquet étaient déjà en route, conformément à la procédure. Cet homme n’avait pas à le faire, mais il voulait m’aider. C’est inestimable dans un moment comme celui-ci. Une hôtesse de l’air en particulier m’a dit en français qu’il n’y avait pas de meilleur endroit pour mourir qu’au-dessus des nuages. ‘C’est ce qui se rapproche le plus du paradis’, a-t-elle dit. Je ne suis pas croyante, mais j’y ai puisé beaucoup de réconfort.”

“La descente venait de commencer lorsque Jos a cessé de respirer. L’équipage est venu demander s’il fallait faire une nouvelle tentative de réanimation, mais j’ai refusé une intervention aussi clairement inutile en plein atterrissage. Mon mari venait de mourir, nous savions que cela allait arriver et - cela peut paraître étrange de le dire - mais son décès a été notre dernier moment d’intimité ensemble. Nous avons pu rester ensemble jusqu’à la dernière seconde. Nous avons également évité d’avoir à nous rendre d’urgence au service des urgences, où je n’aurais pas été admise à cause du Covid. Cette prise de conscience, je pense, m’a donné le courage de rester si calme. Depuis les airs, puis au sol, tout le monde à bord a pu voir de loin les lumières bleues clignotantes sur le tarmac. Pendant que les passagers des rangées derrière nous descendaient de l’avion, un médecin urgentiste est monté à bord à l’avant. Il s’est précipité à l’intérieur et Jos a été conduit à la porte située en haut des escaliers de l’entrée. Là, ils ont essayé de le réanimer, mais c’était inutile. Mon mari est mort au-dessus des nuages. D’une certaine manière, je suis reconnaissante pour cela. C’était une fin spéciale pour un homme si spécial.”