“Animal”, le nouveau documentaire de Cyril Dion: va-t-on enfin se réveiller?
Interview à CannesLe Festival de Cannes a mis du temps avant de se rendre compte de l’aberration écologique qu’était le changement, deux à trois fois par jour, de son tapis rouge. Cette année, le tapis n’est changé qu’une fois sur la journée et le tissu est entièrement recyclable. 950 kilos de tissu seront économisés cette année. D’autres mesures ont été prises pour un Festival de Cannes plus vert: pour la première fois, les festivaliers ont dû payer une taxe carbone de 20 euros, les programmes papier étaient payants, afin d’éviter l’impression inutile et les voitures officielles sont passées à l’électrique. Autre pas en avant: la création d’une sélection de films dédiés à l’engagement climatique et écologique. “Animal”, le nouveau documentaire de Cyril Dion qui s’est fait un nom avec “Demain” figure dans cette section “Le cinéma pour le climat”. Rencontre.
Cyril Dion suit Bella et Vipulan, deux jeunes de 16 ans persuadés que leur avenir est menacé. Ils militent, manifestent, alertent mais rien ne change. Cyril les emmène dans un grand voyage à travers le monde pour leur faire comprendre comment, en sauvant les animaux menacés d’extinction, on sauvera l’humain aussi. “Greta Thunberg est devenue une sorte d’icône mais ils sont nombreux à cet âge-là à être super engagés”, nous explique Cyril Dion. “L’adolescence m’intéresse beaucoup. On est très idéalistes, on a plein d’idées arrêtées sur les choses et beaucoup d’énergie pour changer le monde. J’avais envie de raconter comment eux voient les choses et j’avais aussi envie de les confronter à la complexité du problème. Je voulais leur faire faire un voyage qui les transforme.”
Qu’est-ce qui vous a surpris chez eux?
Ils ont des idées très pures: ils sont vegan parce qu’ils ne veulent pas faire de mal aux animaux. Et ils ont une énorme gravité. C’est dur. Quand j’avais 16 ans, je ne pensais pas à tout ça. Je pensais à boire des coups et à draguer des filles. Eux, ils lisent des livres de philosophie, de politique, d’écologie. Ils ont une construction intellectuelle très aboutie. On leur vole un peu leur jeunesse: c’est dur pour eux d’avoir de la légèreté.
Vous espériez que ce voyage à travers le monde change leur façon de voir les choses. Ça a été le cas?
“Oui. Bella était misanthrope au début. Elle avait vraiment une haine des humains. À la fin du film, elle nous a dit qu’elle avait beaucoup plus appris sur les êtres humains que sur les animaux. C’est là le vrai sujet. Vipulan me dit, lui, que maintenant, quand il voit le film, il trouve que son engagement presque naïf. Il ne fait quasi plus de marches pour le climat. Il est dans une approche beaucoup plus pointue politiquement.”
Dans le documentaire, vous dites que si on arrêtait de détruire les habitats naturels des animaux, si on ne détruisait pas la biodiversité, on n’en serait pas à devoir gérer des maladies inconnues. Parce que tout ça, ça favorise la propagation des virus. On se parle quelques heures après les annonces d’Emmanuel Macron, appelant à l’instauration du pass sanitaire. Qu’en pensez-vous?
Je pense qu’on continue à se tromper d’objectif. La question fondamentale, qui m’a travaillé pendant toute la préparation et tout le tournage de “Animal”, c’est: à quoi on sert, nous, les humains. C’est quoi le sens de notre existence et de nos civilisations. Tout ce qu’on fait, tout ce bazar, c’est pour arriver à quoi? On finit par ne plus vraiment se la poser cette question, comme si on était pris dans une espèce de frénésie. On se dit: il faut continuer, même si on ne sait pas très bien pourquoi. Quand on se pose la question, on nous répond qu’il faut de la croissance. Il faut de la croissance pour avoir tout le reste. Mais en fait, non. La croissance, dans le fond, on s’en fout. La croissance, c’est intéressant si ça nous permet d’avoir les vraies choses dont on a besoin: la santé, les liens sociaux, l’éducation. Mais la croissance aujourd’hui, est-ce que ça nous permet encore d’avoir ça? Pas vraiment. La priorité, ça devrait être la santé au sens large du terme et pas seulement le médicament une fois qu’on est malade. La solution contre le cancer, c’est de faire de la chimio. Mais est-ce qu’on se demande comment faire pour ne pas avoir le cancer? Est-ce qu’on se pose la question de savoir si continuer de détruire des écosystèmes, ça ne pose pas des problèmes par rapport aux épidémies? Est-ce qu’on se demande si continuer à chercher de la croissance, c’est encore possible dans un monde qui se réchauffe aussi vite avec des villages qui partent en fumée en quelques heures? On ne se pose pas les bonnes questions et on ne se donne pas les bons objectifs. Être en bonne santé sur une planète où il fait 50 degrés, où il y a des épidémies parce qu’on détruit des forêts, de la pollution... À quoi bon? Peut-être que notre but, c’est d’être les gardiens du vivant: des éléphants, des pumas, des baleines, mais aussi des humains? Que la vie se perpétue sur notre planète: c’est peut-être ça notre rôle? Ca serait un bel objectif.
La priorité, ça devrait être la santé au sens large du terme et pas seulement le médicament une fois qu’on est malade. La solution contre le cancer, c’est de faire de la chimio. Mais est-ce qu’on se demande comment faire pour ne pas avoir le cancer? Est-ce qu’on se pose la question de savoir si continuer de détruire des écosystèmes, ça ne pose pas des problèmes par rapport aux épidémies?
Dans votre documentaire, vous emmenez Bella et Vipulan dans un élevage industriel de lapins. La scène est choquante. L’éleveur leur répète que les lapins vont bien alors qu’ils n’ont, chacun, que l’équivalent d’une feuille A4 comme espace de vie. A-t-il accepté d’emblée de participer au documentaire?
Oui, il a accepté parce que lui-même avait envie de tirer la sonnette d’alarme sur la situation des éleveurs. Ils sont en train de mourir dans les élevages. Il ne gagne que 350 euros par mois. Ce qui me touche dans cette séquence, c’est la confrontation de deux mondes différents. Bella et Vipulan, ils sont vegan. On voit bien que pour Bella, voir ça, c’est insoutenable. On passe la première partie de la séquence en se disant que ce que l’éleveur fait, c’est horrible. Mais ensuite, on comprend qu’il est en cage avec ses lapins. Cette séquence, elle permet de suggérer l’idée qu’accuser les personnes individuellement, ça n’a pas beaucoup de sens. Le problème, c’est le système. Il est pris dans ce système. Il était maçon avant, on lui a dit: fais ça, tu vas gagner des sous, il s’est lancé là-dedans. Il s’est rendu compte qu’il ne gagnait pas de sous, il a alors mis de plus en plus de lapins dans les cages pour essayer de s’en sortir. Il ne s’en sortait toujours pas, il a demandé des avances et en fait, il est pieds et mains liés. C’est une allégorie de la situation de chacun d’entre nous. Quand on dit aux gens: faites des efforts, mais que, quand ils vont faire leurs courses, ce sont dans des endroits où il y a du plastique partout, ou bien ce sont des endroits où l’urbanisme a fait qu’on ne peut pas vraiment se passer de voitures... On ne peut pas vraiment les blâmer. À un moment, c’est structurel. Qu’est-ce que structurellement, on met en place, pour arrêter de produire du plastique, pour arrêter d’avoir besoin d’une voiture pour travailler ou aller faire ses courses? Les gens ne sont pas plus cons que d’autres: si des solutions existent, ils les utiliseront.
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