Bertrand Crasson: “Si cette génération dorée ne remporte pas un trophée, ce sera un échec”
InterviewAprès un exil en Thaïlande et une première expérience de T1 à Dudelange, au Luxembourg, Bertrand Crasson souhaite relancer sa carrière dans le milieu du foot professionnel. “De préférence à l’étranger”, nous confie l’ancien défenseur anderlechtois. “Car en Belgique, je suis sorti des radars. Si on ne fait partie du réseau des personnes qui décident dans le milieu, c’est compliqué”, poursuit-il. Autrefois consultant pour Belgacom, le Berre officie également comme chroniqueur sur Arabel dans une émission dédiée au foot présentée par Stéphane Pauwels. Sélectionné à 25 reprises en équipe nationale et six fois champion avec Anderlecht, l’ex-international belge suivra de très près les performances des Diables Rouges à l’Euro. Pour 7sur7, il évalue les chances de la Belgique. “Si cette génération dorée ne remporte par un trophée, ce sera un échec”.
D’après Roberto Martinez, les Diables Rouges version 2021 sont plus forts qu’en 2018 lors du Mondial en Russie, malgré les pertes de Kompany, Fellaini ou Dembélé. Vous partagez cet avis?
Disons qu’il pourra l’affirmer si on gagne l’Euro. Cette génération dorée abat quelque part sa dernière carte pour remporter un trophée. Si les Diables ne remportent pas l’Euro, on aura tous un sentiment... pas de gâchis mais un goût de trop peu. On a les joueurs pour aller au bout. Ce qui manque à nos Diables pour faire partie des grandes nations, c’est un trophée. Même la Grèce en a un mais pas nous...
En communiquant cela, Martinez veut-il surtout envoyer un signal à son groupe?
C’est peut-être une façon de mettre la pression sur les joueurs, ce qui n’a jamais été fait depuis plusieurs années. Il n’y a jamais eu de pression, ou d’ultimatum en disant “on doit gagner” parce que c’est maintenant ou jamais. On a toujours surfé sur la vague de la première place mondiale mais l’important, c’est de gagner un trophée pour finaliser le travail. Roberto Martinez a beaucoup professionnalisé l’équipe nationale, la com’, il a ramené l’engouement des supporters. (...) Je trouve toutefois que dans le chef d’une certaine presse, on parle des Diables comme si c’était le Brésil, comme si on avait déjà gagné cinq Coupes du monde. Quand on voit la pression qu’on met sur les Français, qui ont déjà remporté deux Mondiaux et deux Euros, ou sur l’Allemagne, on est beaucoup trop gentils en Belgique.
Si les Diables ne remportent pas l’Euro, on pourra considérer que c’est un échec pour ce qu’on a appelé la génération dorée?
Oui, ce serait quand même un échec parce qu’on attend de ces joueurs qu’ils gagnent des trophées. On attendait de Kevin De Bruyne qu’il remporte la Ligue des champions. Les Ronaldo, Messi et autres joueurs de calibre mondial ont déjà beaucoup de trophées à leur palmarès. Pour franchir un palier supplémentaire, il faut gagner des trophées au niveau mondial, européen. On a les joueurs pour le faire, c’est aux joueurs à le faire. On attend que ces joueurs montrent qu’ils sont des joueurs de calibre mondial, du Real, de City, de l’Inter. On a les joueurs qui évoluent dans les plus grands clubs européens, à eux d’assumer leur statut de joueur mondial. Ce sont des grands joueurs. Maintenant, il faut traduire cela en titres.
Quelles sont les principales faiblesses de l’équipe? Certains pointent du doigt la défense qui devient vieillissante?
La faiblesse, c’est davantage le remplacement des cadres. Kompany a arrêté, Witsel n’a plus joué depuis six mois, De Bruyne est incertain, Hazard en manque de rythme. C’est désormais aux autres de montrer ce qu’ils valent. Toutefois, on ne peut dire que notre défense soit un point faible. Avec Courtois, on possède l’un des meilleurs gardiens du monde. Puis, que ce soit Denayer, Alderweireld, Vertonghen, Vermaelen ou Boyata, ce sont des joueurs de haut niveau. La défense est souvent pointée du doigt parce qu’on joue à trois derrière, pas à quatre. Maintenant, on n’a pas d’arrière gauche spécifique qui s’est imposé. C’est peut-être ça aussi qui a amené cette composition d’équipe. En tout cas, nous avons de bons joueurs à chaque position. C’est à eux de saisir cette occasion et remporter un trophée. Ce serait enfin la consécration pour cette génération dorée.
Que peut-on attendre d’Eden Hazard, dont l’état de forme reste une grande inconnue?
C’est ce qui m’a le plus peiné, ce sont les galères d’Eden Hazard car c’est quand même lui qui a porté l’équipe durant l’ère Martinez. Cette équipe sans Hazard, ce n’est plus la même. S’il peut être sur le terrain et faire un bon tournoi, ça ravirait tout le monde. Toutefois, on a assez de talent, avec Carrasco, Lukaku, ou Mertens pour viser le titre. Nous avons une bonne animation offensive et une bonne attaque, on marque plusieurs buts à chaque match. Il ne faut pas dramatiser non plus.
Que dire de la sélection de Roberto Martinez? Il n’y a pas eu de véritable surprise au final...
C’est une sélection de fidèles. Il a gardé les mêmes. De temps en temps, il intègre l’un ou l’autre jeune, mais globalement il n’y a pas de surprise. En privilégiant la continuité, il envoie peut-être un message. ‘On mise sur les mêmes et on va aller au bout avec ce groupe-là’. Après si on n’y arrive pas, il sera temps de changer la génération.
Si Martinez opte pour une aventure en Premier League après l’Euro, qui serait le remplaçant idéal pour l’Espagnol à vos yeux? Michel Preud’homme?
Je le vois plus dans un rôle de président de la Fédération que sur le terrain, dans un rôle de manager, avec un travail moins oppressant tous les jours. Il faut un profil avec une certaine expérience. À part MPH, je ne vois pas qui pourrait remplir ce rôle-là. La question de l’entraîneur doit être mise sur la table, mais avec l’Euro et le Mondial au Qatar en ligne de mire, la priorité reste ce qui va se passer au niveau des résultats et le renouvellement de cette génération. On attend tous de ces joueurs qu’ils gagnent enfin un trophée. Pour le reste, la question du coach passera après.
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