“Il ne dit pas ce qu’il a sur le cœur”: l’interview d’Eden Hazard montre-t-elle sa “résignation”?

“En regardant et en écoutant, j’ai la sensation que c’est quelqu’un qui ne dit pas ce qu’il a sur le cœur. Je le trouve dans une certaine forme d’acceptation, mais je ne suis pas convaincu que c’est ce qu’il pense vraiment. Il est dans le contrôle, il fait attention à ce qu’il dit à un journaliste. Il pèse ses mots, parle peu, fait des réponses très courtes, sans littérature. Son discours est simple, dans le sens positif du terme, et concis. On ne peut quasiment rien lui reprocher par ses réponses. Il est correct, il attaque personne, il est poli, il donne quelques infos sans entrer dans les détails. Il se protège, je ne sais pas si c’est naturel. C’est compréhensible, ça fait partie de son intimité. Il sait que l’interview va faire parler, il n’a pas envie de se lâcher.”

“Se mettre dans une position de non-responsabilité. C’est assez confortable car cela ne dépend pas de lui, c’est Ancelotti qui décide. Il dit qu’il a envie de jouer et ça le décharge. Mais, il y a un revers de la médaille. Cela donne l’impression d’une certaine passivité. N’importe quel autre joueur aurait déjà fait les démarches pour partir, on l’aurait entendu dans les médias, et il aurait trouvé un autre club. Ce n’est pas son cas, il semble se satisfaire de cette situation. Il y a une forme de résignation. Se méfie-t-il de lâcher ce qu’il a sur le cœur? Je ne sais pas, mais il y a un côté paradoxal.”

“Dans son interview, je ne veux pas affirmer qu’il se contredit, mais il n’est pas clair. À un moment donné, il dit qu’il sera encore très bon à 50 ans. Et quelques minutes après, il évoque la possibilité d’arrêter, puis il revient plus ou moins sur ses propos en précisant que ce serait sur une courte période. Mettre une carrière sur pause à 32 ans, cela ne tient pas vraiment la route. Il y a un manque de cohérence. Je m’interroge sur son degré de sincérité sur ce sujet. J’ai interprété cela comme une forme de contradiction.”

“‘Jouer un petit peu’, ça veut dire quoi? Entrer 10 minutes quand il n’y a plus grand-chose à faire? Ce serait étonnant qu’il se contente de cela, pourtant c’est ce qu’il dit. Je ne vais pas dire que ça sonne faux, mais je suis sceptique.”

“C’est difficile à comprendre car ça doit être très compliqué à vivre. Mais lui, il est dans l’acceptation. Ok à 37 ou 38 ans quand la fin est proche, mais ici, c’est étonnant. Pour faire face à cela, généralement, il y a des compensations ailleurs. Lesquelles? Je ne les connais pas. Le côté familial peut être une excellente raison. Il peut se dire: ‘Je ne suis pas en fin de carrière, mais le principal est derrière moi. Je suis heureux à Madrid’. Ce sont des satisfactions importantes qu’il peut prendre en considération. Consacrer plus de temps à sa famille, cela peut le rendre très heureux et l’aider à se contenter d’une situation dans laquelle il n’a plus de réelles stimulations sur le terrain.

Tout le monde sait qu’une carrière à ce niveau-là demande énormément d’efforts. Il n’a sûrement plus l’envie de consacrer autant d’énergie car il est très à l’aise financièrement, heureux avec sa famille. Il a également arrêté les Diables, peut-être car ses meilleurs potes ne sont plus en équipe nationale. Dans ma carrière de psychologue du sport, j’ai connu un athlète de très haut niveau qui m’a dit après un entretien: ‘Vous vous rendez compte de tous les efforts que vous me demandez de faire? Je suis très bien comme ça”. Chacun trouve midi à sa porte.”

“Quand on change d’environnement, il y a une phase d’adaptation qui demande des efforts de réinvestissement. Il devra se battre, montrer qu’il a fait un bon choix, rendre la confiance de son futur club, appréhender les nouvelles consignes d’un entraîneur. Peut-être qu’il n’a pas l’envie de mettre cette énergie et qu’il se dit qu’il n’est pas si mal que ça au Real. S’il avait encore cette flamme, il serait déjà parti.”

“Mon premier objectif serait de travailler avec lui sur l’acceptation de la situation. Je m’assurerais qu’il n’est pas dans une forme de déni. Forcément, si j’étais son psychologue du sport, je le connaitrais depuis plusieurs années, je pourrais mieux évaluer son état émotionnel. Je ne peux pas éthiquement aller à l’encontre de cela. Le travail consisterait à bien décrypter le pourquoi et le comment des motivations internes et profondes. Il y aurait un gros boulot, car il faut s’assurer que l’athlète est au clair avec lui-même et qu’il n’est pas en train de s’inventer une histoire.”

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