Jan Ceulemans, notre consultant, après la victoire des Diables contre le Danemark: “La classe de De Bruyne a fait la différence”
Les Diables Rouges ont remporté le deuxième match de leur Euro 2020 en s’imposant 1-2 contre le Danemark à Copenhague. Ce fut néanmoins tout sauf une promenade de santé dans le Parken Stadium lors d’une rencontre à la charge émotionnelle très importante suite au malaise cardiaque de Christian Eriksen, le meneur de jeu danois, samedi dernier contre la Finlande. L’espace d’une mi-temps, ce furent même les anges gardiens du n°10 danois qui avaient le feu du diable, avant que la rentrée du messie Kevin De Bruyne ne fasse basculer la rencontre. C’est aussi le sentiment de notre consultant, Jan Ceulemans, présent en finale de l’Euro 1980 et capitaine de la folle épopée au Mexique en 1986 avec une place dans le dernier carré. Voici son analyse.
Jan, quel regard jetez-vous sur ce deuxième match de nos Diables?
Je dois dire que les Diables s’en sont bien sortis. Au vu de leur prestation, les Danois ne méritaient pas de perdre. Je dois reconnaître qu’ils m’ont surpris par leur motivation. Dès le coup d’envoi, ils ont mis le pied sur le ballon et sont partis à l’abordage. Et je me demande s’ils n’ont pas surpris les Belges également. Les Diables étaient nulle part durant la première demi-heure et pour le même prix, ils auraient pu encaisser un deuxième but. Heureusement, la montée au jeu de De Bruyne a tout changé. Sa classe a fait la différence, même si à la fin, lorsque les Danois ont jeté leurs dernières forces dans la bataille, on est passé plus près du 2-2 que du 1-3.
Ce fut une rencontre pleine d’émotions suite au malaise cardiaque de Christian Eriksen contre la Finlande. Les Diables lui ont d’ailleurs offert un maillot dédicacé en guise de soutien avant de l’applaudir avec tout le stade à la 10e minute de jeu. Mais n’étaient-ils pas trop préoccupés par le cas du n°10 danois vu la manière dont ils ont entamé leur match?
C’est possible. Le problème est que beaucoup de joueurs belges connaissent Eriksen. Lukaku, Vertonghen, Alderweireld ont tous un lien avec lui. Et forcément, cela touche. Mais il ne faut pas oublier qu’il s’agit d’un championnat d’Europe. Il n’y a dès lors pas vraiment de place pour les sentiments. D’autant, et c’est le plus important, qu’Eriksen se porte bien. La première approximation, une mauvaise relance de Denayer, s’est également payée cash. Cela n’a pas aidé forcément. Cela a galvanisé les Danois. Ils avaient tous pris dix centimètres en plus d’un seul coup. (sourire) Et les Belges n’étaient pas préparés à cela.
C’est positif qu’Axel Witsel et Eden Hazard soient montés au jeu également, mais ne nous méprenons pas, c’est bien Kevin De Bruyne qui a fait basculer la rencontre.
Roberto Martinez avait justement choisi de titulariser Jason Denayer à la place de Dedryck Boyata, auteur pourtant d’un bon match contre la Russie. Cela vous a-t-il surpris?
Pas spécialement. Je pense surtout que le sélectionneur désirait aussi voir Denayer à l’œuvre. Il a commis une erreur en début de match, qui malheureusement a coûté un goal, mais pour le reste, je trouve qu’il n’a pas connu de gros problèmes. »
Qui est votre ‘man of the match’? Le jeune Danois Damsgaard ou Kevin De Bruyne?
Nous sommes Belges avant tout et à un moment donné dans le match, un Diable entre sur le terrain, en principe notre meilleur élément, et il ne lui faut pas dix minutes pour être décisif. C’est positif qu’Axel Witsel et Eden Hazard soient montés au jeu également, mais ne nous méprenons pas, c’est Kevin De Bruyne qui a fait basculer la rencontre. (sourire) Son assist est splendide. Tout autre joueur que lui aurait sans doute tiré au but. Je ne suis pas certain qu’il ait vu arriver Thorgan Hazard, mais il a vu un maillot blanc, ou une tête blanche, celle de Carrasco je pense, et il a lui glissé idéalement le ballon. Son but, suite à la petite passe d’Eden Hazard, est très beau également. Il frappe parfaitement le ballon du pied gauche pour ne laisser aucune chance à Schmeichel. Bref, l’homme du match, c’est lui.
Vous vous attendiez à ce que Kevin De Bruyne soit si vite décisif?
« Oui. Il est le seul des trois dont on pouvait imaginer qu’il en soit capable. Eden Hazard a joué les intermittents du spectacle depuis son arrivée au Real de Madrid et Witsel revient après cinq mois d’inactivité suite à une opération au tendon d’Achille. De Bruyne, lui, reste sur une saison remarquable avec Manchester City. Il y avait donc fort à parier que la plus-value viendrait de lui. Et cela en dit long sur ses qualités. »
Roberto Martinez doit en profiter pour aligner De Bruyne, Eden Hazard et Witsel dès le coup d’envoi contre la Finlande. D’autant que c’est l’adversaire le plus faible du groupe.
Axel Witsel a pu jouer sa première demi-heure depuis sa rupture du tendon d’Achille. Comment jugez-vous son retour?
Positif. Mais on ne peut pas dire fantastique ou déterminant. Je pense d’ailleurs qu’il sera surtout content que cette rentrée se soit bien passée, qu’il n’ait pas rencontré de problèmes. Il y a toujours de l’appréhension après une telle blessure. Pour lui, ce sera encourageant. Et pour les Diables, c’est important en vue de la suite du tournoi.
Avec six sur six, les Belges sont assurés d’être en huitièmes de finale et seront sans doute aussi premiers de leur groupe. Comment doivent-ils aborder leur dernier match, lundi, contre la Finlande?
Je pense que Roberto Martinez doit en profiter pour aligner De Bruyne, Eden Hazard et Witsel dès le coup d’envoi. En tout cas, c’est ce que je ferais si j’étais à sa place. Je leur permettrais de jouer une heure, histoire d’acquérir du rythme en vue des échéances futures. D’autant que la Finlande est l’adversaire le plus faible du groupe. Ce serait l’idéal et j’ai le sentiment que c’est ce qui se produira. Pour le reste, je ne ferais pas trop tourner l’effectif. Pas besoin de changer six ou sept éléments. Les joueurs bien sont dans leur tournoi et je leur donnerais confiance. Cela ne peut qu’aller mieux.
L’Italie m’a le plus séduit jusqu’à présent. C’est une nouvelle équipe, avec pas mal de joueurs peu connus du grand public, qui pratique un football italien atypique.
Que faut-il craindre des Finlandais ? Ils ont battu les Danois, puis perdu contre les Russes…
Les Finlandais sont à mon sens déjà très heureux de participer à cet Euro. Et d’avoir gagné un match ! Je ne peux d’ailleurs m’empêcher de placer un point d’interrogation derrière leur victoire contre les Danois. On a bien vu lors de ce match contre les Belges que les Danois sont la deuxième meilleure nation du groupe. C’est dommage qu’ils n’aient pas pris ce point, car cela leur aurait permis de garder toutes leurs chances de se qualifier. Les Finlandais sont une équipe robuste sur le plan physique, avec pour qualité première l’engagement. Mais cela s’arrête là. J’imagine qu’ils tâcheront avant tout d’être bien organisés afin de ne pas prendre une raclée, tout en espérant avoir l’une ou l’autre contre-attaque pour créer du danger. »
Toutes les nations ont déjà disputé un match dans cet Euro. Certaines même déjà deux. Quelle est l’équipe qui vous a fait la meilleure impression jusqu’ici?
L’Italie m’a le plus séduit jusqu’à présent. C’est une nouvelle équipe, avec pas mal de joueurs peu connus du grand public, qui pratique un football italien atypique. Elle est tournée vers l’offensive, avec des jeunes comme Locatelli ou Spinazzola qui apportent beaucoup de fraîcheur. Et quand vous gagnez vos deux premiers matches, qui plus est 3-0, cela signifie que vous êtes sur la bonne voie. D’autant que cela fait neuf matches qu’elle n’a plus pris de but non plus. Roberto Mancini, le nouveau sélectionneur, semble avoir les choses bien sur les rails. Maintenant, je parle d’expérience, il y a peu d’équipes qui gagnent tous leurs matches dans un championnat d’Europe. Il faudra voir la suite, car pour moi, cet Euro ne commencera véritablement qu’avec les huitièmes de finale.
Et quel est le joueur qui vous a le plus séduit?
Je vais rester sur Lukaku. Il n’a pas marqué contre le Danemark, mais il a tout de même été à la base des deux buts, en échappant au tacle de Kjaer pour servir De Bruyne, puis en se faufilant entre deux Danois le long de la ligne de touche pour ramener le ballon aux abords du grand rectangle, avant que celui-ci n’aboutisse devant le pied gauche du même De Bruyne.
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