Magnette et Nollet signent une charte des syndicats à Charleroi: “Beaucoup ont eu la gorge nouée”
La Fédération Générale du Travail de Belgique (FGTB) Charleroi Sud-Hainaut et la Confédération des Syndicats Chrétiens (CSC) Charleroi-Sambre & Meuse, en front commun, ont rencontré les présidents carolos de deux partis politiques de la majorité fédérale: Paul Magnette pour le Parti Socialiste (PS) et Jean-Marc Nollet pour Écolo. Le rendez-vous a eu lieu mardi au centre Charleroi Espace Meeting Européen (CEME) et il n’a pas été infructueux.
Malik HadrichDernière mise à jour:11-11-21, 16:31
Paul Magnette et Jean-Marc Nollet ont signé une charte du front commun syndical mardi à Charleroi.
Cette charte comporte dix revendications des syndicats:
• instaurer un caractère contraignant à la concertation sociale avec sanctions si non-respect des obligations existantes.
• mettre en place un tableau de bord de suivi des performances des entreprises et secteurs.
• mettre en place un tableau de bord national sur l’évolution de la répartition de la Valeur Ajoutée (VA).
• privilégier une marge salariale indicative à une norme impérative.
• supprimer la correction du “handicap salarial historique”. Celui-ci constitue le handicap restant après l’élimination du handicap des coûts salariaux encouru depuis 1996 appelé “handicap absolu des coûts salariaux”. Le “handicap absolu des coûts salariaux” est le rapport entre d’une part le coût des salaires et d’autre part, les diminutions des cotisations patronales, le niveau de productivité et les subsides salariaux par rapport aux trois pays voisins de référence que sont la France, l’Allemagne et les Pays-Bas.
• interdire le terme de correction. Le terme de correction consiste à déduire de la marge maximale disponible la différence salariale (“handicap positif des coûts salariaux”) ou à ajouter à cette marge maximale disponible une partie de l’excédent (“handicap négatif des coûts salariaux”). La marge maximale disponible pour l’évolution du coût salarial tient compte d’une part, du coût salarial horaire dans les pays de référence et d’autre part, de l’évolution attendue de l’indice-santé lissé en Belgique. L’indice-santé lissé est la moyenne des indices santé des quatre derniers mois. Il détermine l’ajustement des salaires et des allocations sociales. L’indice-santé est calculé à partir de l’indice des prix du panier de la ménagère à l’exception de quatre types de produits: le tabac, l’alcool, l’essence et le diesel.
• annuler la marge de sécurité. Par rapport à l’évolution calculée des salaires, une marge de sécurité maximale de 25 pourcents et minimale de 0,5 pourcent est prévue. Cette marge est appliquée en cas d’erreurs de prévisions (par rapport à l’évolution salariale dans les pays référents, à l’indexation des salaires...).
• abolir le mécanisme d’ajustement en cas de dépassement de l’évolution des coûts salariaux après un an d’application de l’Accord InterProfessionnel (AIP).
• tenir compte des coûts salariaux horaires réels, y compris toutes les subventions.
• exclure de la contribution à la marge salariale maximale disponible tous les secteurs professionnels pour lesquels la norme salariale ne s’applique pas.
Accord quasi-total
Paul Magnette a remis son accord sur chacun de ses points.
Jean-Marc Nollet a approuvé neuf des dix demandes. La seule pour laquelle il ne s’est pas engagé concerne l’abolition du mécanisme d’ajustement en cas de dépassement des coûts salariaux après un an d’application de l’AIP. Par contre, il a noté que cela méritait réflexion. L’écologiste a également ajouté une autre promesse à la liste: intégrer l’ensemble des facteurs liés la compétitivité et notamment l’anticipation des enjeux climatiques.
Par ailleurs, plusieurs interrogations leur ont été posées au sujet de l’application de l’article 14, la non-prise en compte dans le calcul de la formation des travailleurs, la productivité, le calcul tronqué par le handicap salarial, le taxshift... “Bref, tous ces durcissements qui, en définitive, empêchent d’être réalistes sur l’évolution réelle des salaires dans les gains de productivité et de croissance du PIB (NDLR. Produit Intérieur Brut) et la liberté de négociation” estime le front commun syndical. “Les deux partis progressistes ont (très) souvent été en accord avec notre vision” ajoute-t-il.
Des témoignages “bouleversants”
Les syndicats ont profité de l’opportunité pour attirer l’attention des deux présidents de parti sur le problème du pouvoir d’achat des travailleurs. Les délégué(e)s de différents secteurs leur ont montré quelles étaient les conditions de travail et de vie des travailleurs carolos et quelles conséquences le blocage salarial avait sur leur vie de tous les jours.
“Certains témoignages ont été très bouleversants” font savoir les organisations syndicales. “Ainsi, Laetitia de l’entreprise de titres services SINAP explique qu’elle est à bout physiquement, mais qu’elle ne peut pas être malade. Car si elle devait tomber sur l’assurance maladie-invalidité, elle n’aurait que 600 euros à la fin du mois. Beaucoup dans l’assemblée ont eu la gorge nouée et les deux représentants politiques étaient aussi visiblement émus. Nous avons eu également l’occasion de montrer comment le secteur du commerce préfère investir les milliards d’euros engrangés pendant la crise sanitaire ces deux dernières années dans l’embellissement et la digitalisation des magasins, les dividendes des actionnaires, plutôt que dans son personnel.
Chez Apéram, c’est un employeur ‘qui voudrait bien donner plus, mais qui ne le peut pas’. Et qui accorde alors des avantages extra-légaux...
FGTB Charleroi Sud-Hainaut et CSC Charleroi-Sambre & Meuse
Chez Apéram (NDLR. à Châtelet), c’est un employeur ‘qui voudrait bien donner plus, mais qui ne le peut pas’. Et qui accorde alors des avantages extra-légaux... Mais, nous savons que ce n’est que de la poudre aux yeux. Ce qui provoque un réveil brutal dès que le salaire brut entre en compte pour un calcul d’indemnités (maladie–chômage–pension). Et pour terminer, le secteur Verreries avec la particularité de l’entreprise Gerresheimer Momignies qui applique les salaires les plus bas possibles dans une région où elle est le plus gros employeur et fait donc vivre une majorité des familles de la botte du Hainaut”.
Résultats des courses
Les syndicats pensent avoir fait mouche auprès des deux politiciens: “L’objectif principal était de les faire adhérer à un maximum de nos revendications. Ce qu’ils ont fait! Nous avons deux alliés de taille pour, chacun dans notre rôle, continuer à œuvrer à la modification de cette loi de 96".
Mais pour que cette modification de loi soit effective, il faudra trouver une majorité parlementaire. À l’heure actuelle, ce n’est pas le cas. Même une majorité alternative n’est pas envisageable.
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