Qu’est-ce que le “bank run” qui a provoqué la perte de la banque SVB?
La soudaine déroute de Silicon Valley Bank (SVB) la semaine dernière a créé un vent de panique parmi le secteur bancaire. En cause? Le “bank run”, phénomène qui peut être catastrophique pour un établissement bancaire au point de provoquer sa faillite. On vous explique.
“Bank run”, kézako? Ce phénomène repose sur la peur. Lorsqu’un nombre important d’investisseurs commencent à retirer leurs fonds parce qu’ils craignent qu’une banque ne soit à court d’argent, cela peut inciter les autres à en faire de même. Ce mouvement général peut alors entraîner la faillite de la banque - ses clients cherchant tous à retirer leur capital en même temps, alors que l’argent ne s’y trouve pas forcément. C’est à ce moment-là que le "bank run” commence: lorsqu'on réalise que l’établissement bancaire ne peut pas restituer la somme qui a été placée, car elle l’a investie ailleurs.
C’est ce qui est arrivé à la Silicon Valley Bank (SVB), victime d’une faillite express vendredi dernier. La banque ne parvenait plus à faire face aux retraits massifs de ses clients, principalement des acteurs de la tech, et ses ultimes tentatives de lever de l’argent frais n’ont pas abouti. Les autorités américaines ont donc pris officiellement possession de la banque et en ont confié la gestion à l’agence américaine chargée de garantir les dépôts (FDIC).
Peu connue du grand public, SVB s’était spécialisée dans le financement des start-up et était devenue la 16e banque américaine par la taille des actifs: fin 2022, elle comptait 209 milliards de dollars d’actifs et environ 175,4 milliards de dépôts.
Sa disparition représente non seulement la plus grande faillite bancaire depuis celle de Washington Mutual en 2008, mais aussi la deuxième plus grosse défaillance d’une banque de détail aux États-Unis. Et elle a déjà fait deux autres “victimes” dans la foulée: la Signature Bank et la Silvergate Bank, connues pour leur engagement dans le secteur des cryptomonnaies.
Quand la peur devient réelle
Dans le cas d'un “bank run”, ce qui n’est donc au départ qu’une peur de l’insolvabilité bancaire devient alors réel, car personne ne veut être le dernier dans la file d’attente pour récupérer son argent.
“On peut avoir ce phénomène même si une banque n’est pas en faillite, c’est ce qui s’est passé et a déclenché la faillite pour SVB”, explique Yamina Tadjeddine-Fourneyron, docteure de l’École polytechnique et professeure d’économie à l’université de Lorraine, dans les colonnes du Parisien. “Le fait d’y croire provoque l’événement. Si on dit qu’il n’y aura plus tel produit, les consommateurs causent la pénurie en se précipitant pour en acheter”, ajoute-t-elle encore, comparant le phénomène à la récente pénurie de carburant en France.
Les réseaux sociaux s’en mêlent
Dans le cas de la SVB, le phénomène a largement été amplifié par les réseaux sociaux. Des messages inquiétants sur Twitter, des discussions angoissantes sur WhatsApp, et dans une moindre mesure la généralisation de la banque en ligne, ont participé à l’effondrement précipité de la banque, ainsi que celle de la Signature Bank.
Des entrepreneurs reconnus ont sonné l’alarme ou prodigué des conseils sur Twitter, à l’instar de l’investisseur Bill Ackman avertissant sur le réseau social samedi: “Si la FDIC (un régulateur bancaire, NDLR) ne garantit pas l’ensemble des dépôts, d’autres paniques bancaires démarreront lundi matin”.
“Vous devriez être absolument terrifiés”, a aussi tweeté le même jour, en lettres capitales, un investisseur spécialisé dans la tech, Jason Calacanis. Des créateurs de start-up s’échangeaient les dernières rumeurs sur des groupes WhatsApp.
Technologies et rumeurs
“Le mélange de technologies et de rumeurs qui se propagent rapidement a alimenté une crise d’une rapidité sans précédent”, reconnaît Jonathan Welburn, chercheur au centre de réflexion Rand, auprès de l’AFP. Certes, il était déjà possible de faire des retraits et des transferts en ligne lors de la précédente crise financière de 2008, reconnaît-il. “Mais l’adoption de ces technologies s’est depuis encore étendue.”
(la suite ci-dessous)
Hilary Allen, spécialiste des nouvelles technologies financières à l’American University à Washington, est plus dubitative sur ce point. La capacité des clients d’une banque à retirer rapidement de petites sommes d’argent existe depuis longtemps, souligne-t-elle. Et “il existe encore des difficultés à retirer de larges sommes”, avance-t-elle en mentionnant les apparents soucis rencontrés par certains clients de SVB jeudi à se connecter à leur compte en ligne ou à effectuer des transferts instantanés.
En revanche, l’impact des réseaux sociaux fait l’unanimité. Le président républicain d’une commission parlementaire sur les services financiers, Patrick McHenry, a évoqué dès dimanche “la première panique bancaire alimentée par Twitter”, avant d’appeler à regarder “les faits et non les spéculations”.
Certains messages ont suscité des sueurs froides avant de se révéler trompeurs, comme ceux de l’investisseur Mike Alfred sur les apparentes difficultés opérationnelles de First Republic Bank publiés samedi sans preuve, et effacés par la suite. “Le revers de la médaille est que les réseaux sociaux peuvent également exacerber la perte de confiance et la panique”, dit-elle.
Dans le cas de SVB, le mouvement a été amplifié selon la professeure par le profil particulier de nombreux clients: des entrepreneurs technophiles et très interconnectés.
Le sort de SVB, la deuxième plus grosse faillite bancaire aux États-Unis, s’est en tout cas dénoué en à peine deux jours quand la plus grosse, celle de Washington Mutual en 2008, s’est déroulée en huit mois, entre l’annonce d’une perte inhabituelle en janvier et sa défaillance fin septembre, rappelle Jonathan Welburn. “Même la faillite rapide de Lehman Brothers en 2008 a donné aux régulateurs quelques jours pour comprendre ce qu’il fallait faire”, écrit-il dans une note.
Nouveau phénomène
“En 2008, Twitter et les iPhone étaient des produits naissants; il n’y avait pas de groupes WhatsApp, ni de fils de discussion Slack”, rappelle-t-il. À l’ère des réseaux sociaux, les messages viraux et autres retweets “pourraient priver les régulateurs d’un temps essentiel”. Ces derniers vont probablement devoir inventer une “nouvelle façon de communiquer en ligne” lorsque de tels événements se produisent, avance Hilary Allen.
Il pourrait aussi être intéressant de créer des “coupe-circuits” qui suspendent les transactions en cas d’événement imprévisible, comme une cyberattaque, un événement climatique ou une panique bancaire, remarque la professeure. Mais développer ce type de mécanisme est “très, très politique”, dit-elle. “Les régulateurs doivent commencer à penser à quoi il pourrait ressembler et dans quelles circonstances ils seraient prêts à le déployer.”
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