Battu, jeté sur les rails du métro à Charleroi... Il s’indigne: “Personne n’a bougé”
Témoignages exclusifsL’insécurité dans le métro léger de Charleroi est souvent dénoncée par les navetteurs. La police de Charleroi effectue régulièrement des rondes pour la combattre. Néanmoins, le problème subsiste. Un fait divers marquant s’est encore produit dimanche passé à la station de Dampremy (Charleroi).
Malik Hadrich
Coups de poing, coups de pieds, poussées sur les rails... Fabian (prénom d’emprunt) a vécu un cauchemar dimanche. Il aurait même pu perdre la vie. Il a eu de la chance qu’aucun métro ne passe lorsqu’il a été projeté sur les voies par un malfaiteur.
Ce dernier est parvenu à s’échapper avec 50 euros et un smartphone Samsung S20 d’une valeur d’environ 700 euros.
Description des faits
Fabian nous raconte comment les faits se sont déroulés: “Il est 14 heures 30. Je me trouve dans une rame de métro. Je remarque qu’un individu tourne autour de moi depuis un moment. Il cherche misère. Je décide donc de descendre à la station de métro de Dampremy. Je me dis qu’à partir de cette station, je prendrai un autre métro pour poursuivre mon chemin. Le problème, c’est qu’il me suit. Je fais alors semblant de quitter les lieux comme pour me rendre chez moi. Mais là encore, il me suit. Du coup, je reviens sur mes pas et je m’accole à d’autres usagers sur le quai. C’est alors qu’il vient à ma rencontre et qu’il me dit: ‘Ça ne sert à rien de te rapprocher des gens’. Il se met à me frapper. Je reçois des coups de poing sur l’arrière et le dessus de ma tête.
Une dame se met à crier: ‘Pas devant les enfants!’
Fabian, Victime d'une agression à la station de métro de Dampremy
Une dame se met à crier: ‘Pas devant les enfants!’ L’écho est tellement fort qu’il est entendu par une voisine à l’extérieur de la station. Après coup, j’ai su qu’elle a cru à une agression ou à un viol d’une femme. C’est pourquoi son mari s’est mis à sauter par-dessus le mur de son jardin pour venir vérifier. Pendant ce temps-là, je m’enfuis par le tunnel du métro. Mon agresseur me rattrape, me jette à terre et me roue de coups de pied ou de coups de poing. Tant bien que mal, je parviens à me relever et à rejoindre le quai. Mais il m’agrippe de nouveau et me balance sur les voies. Il m’arrache mon téléphone et mon sac qui contenait mon portefeuille, ma montre, ma tablette ainsi que mes cartes de banque avec mes codes”.
Il aura eu le bon réflexe de bloquer ses cartes bancaires ultérieurement: “Cela m’aura au moins appris à ne plus jamais conserver mes codes secrets en leur compagnie”.
Course-poursuite
L’histoire ne s’arrête pas là: “Après m’avoir pris mes affaires, il s’enfuit. Je le poursuis à mon tour. À la sortie de la station, je retrouve mon portefeuille à terre avec mes papiers d'identité. Par contre, les 50 euros en liquide ont disparu. Je continue à courir après mon agresseur pendant 20 ou 30 minutes dans Dampremy. Mais à un moment donné, je me mets à vomir suite aux coups que j’ai reçus sur le crâne. Je me réfugie dans un magasin turc. Là-bas, le gérant appelle immédiatement le numéro d’urgence (NDLR. le 112). Une ambulance et la police arrivent rapidement sur place. Finalement, je suis transporté aux urgences de l’hôpital Notre-Dame (NDLR. du Grand Hôpital de Charleroi)”.
Dégâts physiques
Résultat: des douleurs aux côtes, des blessures aux jambes et aux coudes ainsi qu’une légère commotion cérébrale. “J’ai aussi rendez-vous le 28 juin pour effectuer une scintigraphie de ma main”. La scintigraphie est un examen permettant d’obtenir une image métabolique ou fonctionnelle d’un organe ou de plusieurs organes.
La durée de son incapacité de travail porte pour l’instant jusqu’au 1er juillet 2022.
Sac retrouvé
Ceci dit, il a reçu de meilleures nouvelles quelques jours plus tard: “Quelqu'un a retrouvé mon sac et me l’a rendu mardi soir. Il avait été vidé devant la station. Mais mon agresseur n’avait pas décelé ma tablette et ma montre au milieu de mes vêtements”. Il n’a donc pas tout perdu.
Insécurité du métro
Notre interlocuteur reste néanmoins traumatisé. Par peur, il souhaite conserver l’anonymat dans le cadre de cet article de presse. Ce sentiment risque de l’accabler encore un moment. Surtout lorsqu’il devra de nouveau emprunter le métro de Charleroi! “Je ne me suis jamais senti en sécurité lors de mon agression. Le TEC (NDLR. Transport En Commun) dispose de caméras de surveillance. Mais personne n’a repéré ma mésaventure. Pourtant, cela a duré un certain temps. Parmi les usagers présents sur le quai, personne n’a bougé le petit doigt”.
Son ami de longue date est conducteur pour le TEC à Charleroi. Pour des raisons très facilement compréhensibles, lui aussi ne souhaite pas dévoiler son identité. Il tient à dénoncer le dispositif de sécurité mis en place par son employeur: “La sécurité dans le métro de Charleroi, ce n’est pas du tout ça. Déjà, le week-end, le service de sécurité travaille en effectif réduit. Ensuite, il y a effectivement des bornes qui permettent d’interpeller un surveillant du TEC. Mais le dialogue raisonne dans toute la station. En termes de discrétion, on a déjà fait mieux”.
Dispositif de sécurité
Contactée par nos soins, la Directrice Opérationnelle Commerciale et porte-parole du TEC Charleroi, Véronique Benoît, nous décrit les mesures prises pour assurer la sécurité dans les stations de métro: “Une victime peut enclencher un appel d’urgence via une borne. Dans ce cas, les caméras de surveillance pointent en direction de la borne actionnée. Le cas échéant, la personne au dispatching peut envoyer une équipe de contrôle sur place. Mais si la victime ne se manifeste pas, c’est plus compliqué”. Elle réfute le caractère indiscret de cette démarche: “L’échange entre notre membre du personnel et la victime n’est pas diffusé dans les haut-parleurs de la station. Après, il faut que l’employé puisse entendre ce qu’on a à lui dire”.
Elle nous certifie également que les caméras de surveillance ne fonctionnent pas uniquement lorsque la borne est enclenchée: “Elles enregistrent tout le temps. Un opérateur est disponible au dispatching 24 heures sur 24. D’ailleurs, les images sont à la disposition de la police en cas de plainte et d’enquête. Il suffit qu’elle identifie l’endroit où les faits se sont passés et une tranche horaire. Dans ce cas-ci, les forces de l’ordre ne nous ont encore rien demandé”.
Semaine vs week-end
Par contre, elle reconnaît que les équipes de contrôle sont moins nombreuses le week-end que durant la semaine: “Trois ou quatre équipes patrouillent pendant la semaine. C’est une de plus que le samedi ou le dimanche. Mais deux tiers des effectifs sont tout de même mobilisés ces jours-là. Dans le même temps, il y a moins de véhicules et de clients. De quatre heures du matin jusqu’à minuit et demi, une présence est garantie”.
Les statistiques de la société de transports publics ne l’incitent pas non plus à changer son fusil d’épaule: “Nous ne constatons pas davantage d’agressions le week-end que durant la semaine. En général, les agresseurs ne font pas attention à cela. Ils agissent en fonction de l’opportunité qui se présente à eux”.
D’après Véronique Benoît, les équipes de contrôle du TEC Charleroi sont composées de deux, trois ou quatre personnes: “Évidemment, elles se substituent à tour de rôle durant une journée. Au total, ce sont plus de 40 contrôleurs qui sont en service. Vous pensez bien que nous avons tout intérêt à ce que les malfaiteurs soient arrêtés. Car si nous les laissons agir, ils recommenceront leurs délits avec d’autres personnes. Ce n’est évidemment pas ce que nous souhaitons”.
Sur le terrain
Ces arguments ne convaincront pas l’ami de Fabian. Car ils sont en contradiction avec ce qu’il observe sur le terrain: “Très souvent, je constate des cas de harcèlement ou d’attouchements à l’arrière du véhicule. Quand c’est possible, je demande à la victime si tout va bien. Je lui dis aussi qu’elle peut venir près de moi s’il y a un souci. Malheureusement, toutes les victimes ne déposent pas plainte”.
La porte-parole du TEC Charleroi rappelle: “Les personnes qui rencontrent un problème peuvent se diriger vers les chauffeurs”.
Auteur en fuite
Malgré le choc émotionnel, Fabian se souvient très bien de l’individu qui s’en est pris à lui: “Il avait une trentaine d’années. C’était un métis. Il avait des tresses attachées en arrière”.
Le Parquet de Charleroi confirme qu’une plainte a été déposée dans ce dossier. Par contre, l’auteur des faits est toujours recherché.
Retrouvez, ici, toute l’actualité de Charleroi et de sa région.