Conseiller communal, Gillard se fait agresser à Charleroi: “Hé cousin, reste tranquille!”
InterviewJean-Noël Gillard (Défi) est conseiller communal à la Ville de Charleroi. Au Conseil Communal à la fin du mois d’août, il avait interpellé le bourgmestre, Paul Magnette (PS), sur l’insécurité qui règne au Pays Noir. Ironie de l’histoire, il vient lui-même d’en être victime vendredi vers 19 heures 15 à la rue Victor Baux, à Marcinelle (Charleroi)!
Jean-Noël Gillard a reçu trois coups de poing dans la nuque avant de se faire dérober ses écouteurs de marque Philips. Coût du préjudice: à peu près 50 euros. Avec quelques bleus en prime! “Mais c’est surtout traumatisant d'un point de vue psychologique. J’ai été traqué pendant une dizaine de minutes. Pendant ce laps de temps, je savais qu’ils allaient me tomber dessus même si je ne connaissais pas la manière avec laquelle ils allaient procéder. C’est ça, le plus grave!” nous narre le conseiller communal carolo.
Récit des faits
Trois individus s’en sont pris à lui: “Tout commence à l’arrière de la gare de Charleroi-Sud, au parking Villette, sous le pont du Ring. Plus précisément à l’arrière de la rue Paul Pastur. À partir de là, je me sens suivi. C’est un endroit de passage vers le centre-ville de Charleroi. Après le boulot, j’étais allé chez le coiffeur et je m’apprêtais à rentrer chez moi, à Marcinelle. À la fin du parking de la Villette, je tourne à gauche sur la rue Alfred Leroy pour emprunter un sentier comme je le fais d’habitude. Je remarque que des gens sont toujours derrière moi. Je me dis alors que je dois faire attention.
Je leur demande ce qu’ils me veulent. ‘File-moi ton GSM! Je dois passer un coup de fil’ m’a répondu l’un d’entre eux.
Arrivé à la moitié du sentier, une personne m’apostrophe: ‘Hé cousin!’. Comme j’ai mes écouteurs, je fais mine de ne pas entendre. J’arrive à la jonction avec la rue du Bierchamps à Marcinelle. C’est alors que quelqu’un s’approche très fort de moi en m’interpellant. Je me retourne et je vois qu’ils sont trois. Je leur demande ce qu’ils me veulent. ‘File-moi ton GSM! Je dois passer un coup de fil’ m’a répondu l’un d’entre eux. Je refuse catégoriquement et je prétexte que mon GSM n’a plus de crédit d’appels. Je continue ma route, mais au lieu de poursuivre sur le sentier qui est forcément isolé, je cherche un lieu plus éclairé.
À un moment donné, je change de trottoir. Ils restent de l’autre côté, mais toujours en me tenant à l’œil. C’est extrêmement angoissant.
Je tourne donc à gauche dans la rue du Bierchamps. Je me dis que cela les poussera à me lâcher la grappe. C’est une rue où il y a plus de riverains. Mais ils continuent tout de même à me talonner. À un moment donné, je change de trottoir. Ils restent de l’autre côté, mais toujours en me tenant à l’œil. C’est extrêmement angoissant. Je me dirige ensuite dans la rue Victor Bau. Je connais bien l’endroit. Il y a beaucoup d’habitations en enfilade et c’est une voie assez étriquée. Je presse le pas. J’entends moins de bruits derrière moi.
Tout d’un coup, ils se mettent à courir à fond et je reçois un premier coup de poing dans la nuque.
Tout d’un coup, ils se mettent à courir à fond et je reçois un premier coup de poing dans la nuque. J’en reçois un deuxième par après. L’auteur veut arracher mon casque. Il lui faut un troisième coup pour me le chiper. Un de ses potes revient vers moi: ‘Hé cousin, reste tranquille! Ne t’inquiète pas!’. Je me dépêche d’avancer. En contrebas, une dame est en train de sortir sa voiture du garage. Je cours à mon tour, je contourne l’auto qui fait office de barrage, je m’enfonce dans les petites rues avoisinantes et je parviens à les semer. Si je n’avais pas modifié mon itinéraire et que j’avais continué mon chemin sur le sentier, je me serais probablement fait dépouiller”.
Dépôt de plainte
Notre interlocuteur n’a pas l’impression d’avoir déjà croisé ces malfaiteurs: “Ce sont des jeunes de type caucasien de 24 ou 25 ans, grand max. Ils portaient des pulls à capuche”.
Il a porté plainte à la police. “On m’a conseillé de ne plus emprunter mon parcours habituel pour me rendre en centre-ville durant quelques mois. Ce n’est quand même pas normal et c’est malheureux d’en arriver là”.
Inquiétude renforcée
Inutile de dire que sa préoccupation par rapport à l’insécurité à Charleroi n’en est que renforcée! “Quoi qu’on en dise, l’insécurité est devenue une réalité à Charleroi. Au mois d’août dernier, j’avais interrogé le bourgmestre sur les moyens mis en œuvre pour lutter contre ce phénomène. Surtout que le nouveau chef de corps de la police de Charleroi, Arthur Van Dooren, prêtait serment ce jour-là! À l’époque, j’avais déjà reçu énormément de témoignages de riverains du quartier situé derrière la gare, par exemple. Des vols, des bris de vitre...”
Lui-même ne se sent plus à l’aise partout: “Dans certains quartiers, c’est un problème”.
“De l’enfumage”
En réponse, Paul Magnette plaide pour une conférence nationale sur la sécurité et la toxicomanie. Et lors du Conseil Communal du 30 août dernier, il a répété les efforts consentis par la Ville de Charleroi: “Avec les opérations Vauban (NDLR. opération de sécurisation et de revitalisation urbaine), avec leur structuration sous une forme pérenne puisque nous avons mis en place, et nous sommes un des seuls à l’avoir fait, le Peloton Sécurité Ordre public dont c’est l’une des premières missions. On peut dire qu’il est extrêmement actif. Deux opérations par mois de sécurisation dans chacun des districts de proximité. Donc, dix opérations par mois.
C’est deux opérations par mois deal de rue par le PSO et d’autres services sur les lieux particulièrement problématiques. Et l’on sait qu’ils se situent notamment, ici, autour de l’Hôtel de Ville. C’est aussi une opération par mois appelée ‘Épervier’ qui est une opération de la Direction des Opérations. Celle-ci engage l’ensemble ou la quasi-totalité des différents services des Zones de Police. (...) Mais la difficulté, c’est le suivi de ces opérations de police. Il faudra continuer de travailler de manière beaucoup plus étroite avec le Parquet, avec l’Office des Étrangers pour que les arrestations auxquelles procèdent nos policiers soient suivies d’effets”.
Mais aux yeux de Jean-Noël Gillard, c’est insuffisant: “Lorsque Paul Magnette appelle de ses vœux une conférence réunissant les bourgmestres des grandes villes belges, c’est une forme d’enfumage. En déclarant cela, il reconnaît qu’il n’a pas de solution. Des échanges de bonnes pratiques entre les cités les plus importantes du pays, c’est toujours utile. Mais la criminalité à Anvers n’est pas la même qu’à Charleroi. Anvers est une ville portuaire dans laquelle une grande quantité de stupéfiants débarque. Mais une partie de cette quantité est déversée dans notre ville. Il faut une vision sur la criminalité adaptée à chaque métropole”.
Deux solutions proposées
Pour lui, les autorités carolos peuvent offrir deux premières solutions: “Tout d’abord, la politique d’aménagement du territoire est à revoir. Lorsqu’un chantier est prévu, il devrait y avoir un plan local de lumières. Chaque endroit devrait être analysé pour déterminer s’il est sécurisant pour les gens. La question de l’éclairage devrait être intégré au permis d’urbanisme. Quand je regarde le nouveau bâtiment d’Infrabel, je le trouve très sombre, très obscur. Il n’y a pas de lumières. Ça, c’est pour la lutte contre le sentiment d’insécurité.
Il faut que des équipes de terrain soient mobilisées
Ensuite, il y a le volet sécuritaire en tant que tel. Quand j’ai porté plainte à la police vendredi soir, j’aurais aimé en réaction qu’une patrouille de police soit envoyée à l’endroit où je me suis fait agresser. Simplement pour vérifier que tout se passe bien dans le coin et que les individus correspondant à mon signalement ne traînent plus dans les parages! Ces personnes sont susceptibles de recommencer vu qu’ils n’étaient pas complètement arrivés à leurs fins avec moi. Il faut que des équipes de terrain soient mobilisées. Il faut effectuer des rondes dans certains quartiers ciblés”.
Manque de moyens
C’est pourtant déjà ce que la Zone de Police (ZP) de Charleroi fait. Mais pour en faire davantage, il faut que les moyens suivent! Jean-Noël Gillard pointe tout d’abord des manquements matériels: “S’attaquer à toutes les formes de criminalité demande un travail conséquent. Il faut donner les ressources à la Zone de Police de Charleroi pour qu’elle puisse mieux effectuer son job. L’un des problèmes rencontrés est son manque d’attractivité. Il faut offrir à ses membres des conditions de travail plus décentes. Il faut que l’accompagnement numérique et le charroi soient régulièrement renouvelés”.
Ensuite, il cible les moyens humains: “La clé de répartition de la norme KUL (NDLR. il s’agit d’une clé de répartition de la capacité policière entre les communes de Belgique qui date de 1993-1994) n’est plus en adéquation avec les besoins des grandes villes. Il est plus qu’urgent d’avoir ce débat. Les enjeux sont énormes: la criminalité de rue, la toxicomanie, la cybercriminalité...”
Statistiques en baisse
Pourtant, et indépendamment de l’année 2020 biaisée par les confinements dus au Covid-19, les statistiques de la criminalité ne cessent d’être en baisse à Charleroi.
Pour le représentant de Défi, elles ne sont plus représentatives: “Selon moi, c’est à cause du fatalisme ambiant qui règne à Charleroi. De plus en plus de citoyens ne portent plus plainte à la police. Leur raisonnement est: ‘On est à Charleroi, c’est normal’ ou ‘Je n’ai pas été blessé plus que cela’. Je suis convaincu que pour toute une série de faits, les gens se disent: ‘À quoi bon? Les délinquants ne seront tout de même pas poursuivis’. Les victimes se laissent aller à une certaine banalisation. Personnellement, j’invite vraiment tout le monde à déposer plainte auprès de la police en cas de besoin. Rien ne justifie la violence ou les insultes. Les petits gestes criminels sont graves. Le harcèlement de rue, c’est grave. Il ne faut pas hésiter à les dénoncer”.
En attendant, la Ville de Charleroi, la Zone de Police locale et le Parquet se sont réunis dans le cadre d’un Conseil Zonal de Sécurité (CZS) le 29 septembre dernier. L’accent y a été mis sur le deal de rue et la mendicité. Les actions policières contre le trafic de drogues seront notamment intensifiées d’ici à la fin de l’année.
Retrouvez, ici, toute l’actualité de Charleroi et de sa région.
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