Près de deux mètres d’eau à la Broucheterre à Charleroi: “30 ans que mon père se bat avec la Ville”
ExclusifLe déluge est tombé sur une grande partie de la Wallonie et sur les provinces flamandes du Limbourg, d’Anvers et du Brabant flamand. Si la situation tend à revenir petit à petit à la normale, les Wallons pansent encore leurs plaies. Des inondations ont eu lieu un peu partout. Les régions de Liège et de Namur sont particulièrement impactées. On dénombre plusieurs morts et des disparu(e)s. Dans la région de Charleroi, les dommages matériels sont importants.
L’eau est montée jusqu’à une hauteur d'un mètre 80 dans la cave de la famille Schwarzenberger. Et elle a dû être évacuée par les propres moyens de ces habitants de la rue de la Broucheterre à Charleroi. De quoi en avoir gros sur la patate! “Sur le moment, un sentiment d’abandon nous a envahi. Cela nous a dégoûté” témoigne le fils de 25 ans, Lucas.
Ce sentiment était tellement puissant le soir du 13 juillet 2021 qu’il a exprimé son désespoir sur Facebook. Comme on jetterait une bouteille à la mer... “Cette nuit fût différente des précédentes inondations. Cette nuit, personne n’est venu. D’ordinaire, les pompiers nous viennent en aide, des ouvriers communaux également. Après avoir téléphoné au numéro d’urgence aux alentours de 20 heures (quand l’eau rentrait déjà dans nos caves), aujourd’hui, le mercredi 14 juillet 2021, PERSONNE n’est venu. Pas de pompiers, pas d’ouvriers communaux, pas de policiers”.
Équipes débordées
Contacté par nos soins, le cabinet de l’Échevin des Travaux publics, Eric Goffart (C+), déclare que le service Voirie n’a pas été averti. Sans oublier que les appels à l’aide étaient nombreux ce soir-là: “Les ouvriers communaux sont intervenus en de nombreux endroits, mais le réseau carolo est constitué de 660 kilomètres de voiries”.
Lorsque nous l’avons joint par téléphone, c’est l’étonnement qui régnait dans le chef de l’officier de presse de Zone de secours Hainaut-Est (ZOHE), Michel Méan: “C’est étrange, car nous envoyons des équipes partout où c’est nécessaire. Si un problème grave se présente et que personne n’arrive, il faut rappeler le numéro d’urgence. Pas au bout d’une demi-heure évidemment! Mais après un certain temps, oui. Il y avait tellement d’endroits sur notre liste qu’une adresse peut être passée inaperçue. Cela peut arriver.
Ce soir-là, nous avons reçu une centaine de coups de téléphone.
Ce soir-là, nous avons reçu une centaine de coups de téléphone. Et nous sommes confrontés à des soucis de logistique et de personnel. Nous respectons également un ordre de priorité. Les sauvetages à effectuer ont évidemment la préséance. Depuis le début de la semaine (NDLA. jusqu’au jeudi 15 juillet), nous avons dû intervenir à plus de 1.000 reprises”.
Voisinage
Lucas reconnaît qu’il n’a composé le numéro de téléphone 1722 qu’une seule fois: “Mais au bout du fil, on m’a expliqué que notre rue était déjà prise en compte parce qu’un voisin avait déjà passé l’appel”.
Conclusion: la famille Schwarzenberger a dû se débrouiller toute seule. “Mon père a installé une pompe servant à évacuer toute l’eau dans nos caves. Nous l’avons installée dès l’arrivée de l’eau et ce, jusqu’à sept heures du matin” écrit Lucas sur Facebook. “Nous avons un voisin qui est parti en vacances, sa cave est encore inondée” nous a-t-il d’ailleurs raconté jeudi. “Si nous n’avions pas de pompe à eau, achetée à nos frais, nous serions toujours immergés”.
Dégâts
Notre interlocuteur ne connaît pas encore le coût des dégradations dans la propriété de ses parents: “Nous avons perdu des outils électriques comme des perceuses, des ponceuses et d’autres outils mécaniques, pris par la rouille. Nous avons pas mal de dégâts aussi au niveau des murs engorgés d’humidité”.
Bien sûr, le logement est assuré. Mais Lucas nuance: “C’est assez complexe en terme d’assurances parce que nous habitons dans un quartier inondable. Du coup, oui, nous sommes assurés, mais les assurances minimisent chaque année les dédommagements. Toutes ces raisons poussent les assurances à nous éviter et/ou à nous assurer à moindre frais (pour eux)”.
30 ans de combat
Car même si les intempéries de ces dernières heures sont exceptionnelles, ce n’est pas la première fois que la rue de la Broucheterre est sujette aux inondations. “Mon entourage proche connaît la situation dans laquelle mes parents et moi-même sommes confrontés depuis plus de 30 ans. Cela fait plus de 30 ans que mon père se bat avec la commune de Charleroi, les multiples assurances, les services d’urgences comme les pompiers et la police pour avoir n’importe quel type d’aide (...). Pour en revenir à mon père, il se bat corps et âme depuis plus de 30 ans pour que la Ville de Charleroi puisse construire un bassin d’orage et nous éviter toute cette galère annuelle” commente Lucas sur Facebook.
De source sûre, le problème existe bel et bien depuis de nombreuses années. Bien avant qu’Eric Goffart ne devienne Échevin des Travaux publics en 2018! Mais aujourd’hui, c’est lui qui est chargé de trouver une réponse au pétrin des riverains.
Dossier complexe
Son cabinet nous confirme qu’un dossier est géré conjointement par la Ville de Charleroi et la Province du Hainaut: “Il est bel et bien question de la construction d’un bassin d’orage. Cette solution technique est privilégiée. Elle permettrait de faire face à ce type de phénomènes accidentels”.
Mais il y a un hic: “La Ville de Charleroi a sollicité les propriétaires des parcelles de terre où le bassin d’orage est envisagé. Car avant d’entamer quoi que ce soit, il est impératif qu’elle acquiert ces parcelles. Une procédure a été finalisée pour estimer leur prix. Or, plusieurs propriétaires refusent toujours les propositions de la Ville. C’est ce qui explique que ce projet n’a pu encore aboutir. Mais la Ville de Charleroi poursuit les démarches nécessaires”.
Malheureusement pour les citoyens de la rue de la Broucheterre, il n’y a pas de plan B. “Il n’y a pas 15.000 solutions possibles dans ce dossier” nous répond-on du côté des autorités communales.
Colère et angoisse
Du coup, l’insatisfaction est grande. “Nous sommes Carolos et nous payons nos taxes, factures, notre cadastre en temps et en heure. Nous entretenons notre voirie et nous aimons notre quartier. Mais aujourd’hui, nous sommes des Carolos en colère parce que nous sommes délaissés de toute autorité compétente” rédige Lucas Schwarzenberger sur le célèbre réseau social.
Ce dernier reçoit l’appui de son oncle, Philippe. Socialiste proclamé, il est véritablement scandalisé par la situation vécue dans un des bastions de son parti. Lui aussi a fait part de son courroux sur Facebook: “Je suis né à Charleroi il y a plus de 65 ans. Mon frère cadet vit toujours dans la maison de notre grand-mère Rosalie Debroux à la Broucheterre. Elle y a travaillé comme lavandière et blanchissait dans sa cave le linge prestigieux des grandes familles bourgeoises et des hôtels chics de la Ville-Basse. Son mari Paulin Kaisin était prolétaire aux ACEC. Mais il préférait dire qu’il travaillait chez Dulait, le fondateur de cette industrie réputée jusqu’en Russie.
L’étymologie de la Broucheterre (la terre à’l brouche) est disputée. Certains disent que son nom viendrait du fait qu’on y fabriquait des brosses, d’autres que son origine est à trouver, comme celle du nom de Bruxelles, dans le fait qu’il s’y trouvait un marais. Ce lieu en fond de vallée du ruisseau de Lodelinsart a toujours été sujet à des périodes de crues et à des inondations récurrentes, mais supportables.
Le R9 de Charleroi a lacéré ce quartier et a accentué de manière dramatique l’écoulement des eaux de pluies vers ce bas-fond ignoré des autorités de la ville
Le R9 (NDLR. le petit Ring) de Charleroi a lacéré ce quartier et a accentué de manière dramatique l’écoulement des eaux de pluies vers ce bas-fond ignoré des autorités de la ville. Ce quartier populaire a encore essuyé la nuit dernière une de ces inondations catastrophiques. Pourquoi, camarades, vous parler ici et aujourd’hui de cette ‘anecdote’?
Tout simplement par un effet de la colère qui me prend périodiquement lorsque mon frère, handicapé de plus de 60 ans, qui a servi comme moi le pays pendant une bonne partie de sa vie avant de devenir ardoisier-couvreur pour un patron, se retrouve abandonné par les autorité politiques et administratives de ma bonne ville de Charleroi. Il a appelé au secours pourtant, mais personne n’est venu! C’est lui-même qui, pendant toute la nuit, a pompé les deux mètres d’eau qui ont ravagé son jardin et ses caves. Lui et ses nombreux voisins sont restés sans aucune aide jusqu’à présent (je vous écris ce 14 juillet 2021 à 11 heures)”.
Lucas, lui, doit apprendre à vivre dans la peur: “Je vis toujours chez mes parents et chaque saison estivale approchante, nous sommes dans la crainte et l’angoisse de revivre ce que nous avons vécu la nuit dernière (NDLA. lisez celle du mardi 13 juillet au mercredi 14 juillet)”.
Réchauffement climatique
D’après le météorologue David Dehenauw, le réchauffement climatique est, en partie, responsable des intempéries de ces derniers jours dans notre pays: “Le changement climatique en lui-même ne provoquera pas de phénomènes météorologiques, mais il peut les renforcer”.
Dans son premier rapport officiel en 1990, le Groupe d’experts Intergouvernemental sur l’Évolution du Climat (GIEC) indiquait déjà avec certitude que “l’effet de serre accentuera les deux extrêmes du cycle hydrologique, c’est-à-dire qu’il y aura plus d’épisodes de pluies extrêmement abondantes et plus de sécheresses prononcées”.
Retrouvez, ici, toute l’actualité de Charleroi et de sa région.
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