Un bar accusé de violences sexuelles à Louvain-la-Neuve: “J’ai peur et ma famille aussi”

Le bar “Onlywood” est accusé de délits sexuels à Louvain-la-Neuve. Le collectif féministe, La Meute, y a récemment accolé des affiches qui avaient notamment pour message “L’Only dans le déni” ou encore “Pourquoi tant de démissions?”.

Il s’en est expliqué sur sa page Facebook: “Suite aux nombreuses dénonciations de harcèlement, d’agressions et de violences sexuelles perpétré.es par un employé au bar ‘l’Onlywood’, nous avons collé à leur encontre. Nos collages ont été arrachés, il semblerait que le bar ait voulu nous faire passer un message en ne laissant que le mot ‘pourquoi?’. Nous décidons de leur répondre aujourd’hui. L’établissement sait exactement de quoi il s’agit. L’Only reste dans le déni. Face à l’inaction et au silence des patron.nes, une vague de démissions s’en est suivie au sein de l’établissement. Pourquoi?”

Nous avons interrogé le propriétaire de l’établissement. Visiblement, la banderole avec la question “Pourquoi?” n’a pas été laissée sciemment: “Je ne l’avais même pas vue. Les affiches ont été enlevées par des personnes qui s’occupaient de laver les vitres”.

Au bout du fil, on le sent. L’homme est clairement à bout: “Tout a commencé avec l’action #Balancetonbar à Bruxelles en réponse à un employé qui avait mis de la drogue dans un verre d’une jeune femme. Et à Louvain-la-Neuve, il fallait forcément trouver quelqu'un. C’est tombé sur moi. Mais je ne suis au courant de rien. De ce que j’entends, des étudiants qui travaillaient auparavant chez moi ont organisé des soirées à l’Onlywood en plein confinement. Lors d’une de ces soirées, un de mes employés aurait commis un attouchement aux fesses d’une jeune fille. Je lui ai demandé ce qu'il en était. Il m’a répondu qu’il ne se souvenait plus de rien. Quoi qu’il en soit, je me suis moi-même rendu à la police pour la mettre au courant”.

Mais comment d’anciens collaborateurs ont-ils pu mettre sur pied des fêtes nocturnes dans son bar sans qu’il soit informé? “Ils avaient les clés” nous assure-t-il.

Désormais, les temps sont durs pour lui: “Des personnes harcèlent mes clients pour qu’ils me laissent tomber. Je ne fais plus de recettes. Avant-hier (NDLA. lisez mercredi de la semaine passée), j’ai récolté 200 euros. Je vais tomber en faillite, c’est sûr. Certains de mes employés se sont fait taper dessus à l’extérieur. Plus aucun étudiant ne veut bosser chez moi. Il ne me reste plus que quelques fidèles clients qui viennent tous les jours depuis 1995.

Ma famille a peur. Moi aussi. Il y a des matins où je n’ose plus me rendre dans mon établissement. Je n’ai plus envie de le voir. Je suis dégoûté. Je vais déposer le bilan. Cela va me coûter 300.000 euros. Ils auront gagné. AB Inbev aura gagné. Le comble dans cette histoire, c’est que je venais d’obtenir gain de cause contre le groupe brassicole en justice. AB Inbev refusait de renouveler mon bail. Il voulait vendre l’emplacement en échange de 200.000 euros”.

Il nous annonce que la fin est proche: “La curatelle va être prononcée. Je vais payer toute ma vie. La banque va venir chercher tout ce qu’il me reste. Mes employés chercheront un autre job. Il y a eu le Covid, des travaux et maintenant ça! C’en est trop pour moi! Et dire qu’il y a quelques jours, je n’aurais jamais pensé en arriver là. J’ai tout perdu. Tous les soirs quand je rentre, ma femme est en pleurs. Ces jeunes de La Meute m’ont détruit psychologiquement. Certains d’entre eux travaillent dans d’autres bars.

Ils harcèlent aussi les clients qu’ils rencontrent là-bas: ‘N’allez plus là-bas!’ Comme par hasard, l’un d’entre eux coopère avec une brasserie qui appartient à AB Inbev. Ils m’ont tué. Mes amis qui tiennent une taverne à côté de l’Onlywood réalisent de super chiffres. Plus personne ne vient chez moi. À la fin du mois, je paierai mon loyer qui est de 3.800 euros et puis, je mettrai la clé sous le paillasson. J’ai 50 ans. Je ne sors jamais. Je ne bois pas. Pour moi, Louvain-la-Neuve, c’est fini. Je ne mettrai plus jamais un pied dans cette ville”.

Sa rancœur vis-à-vis de La Meute est grande: “Même une médiation est impossible. Pourtant, je ne demande que ça. Si un de mes collaborateurs s’est rendu coupable de violences sexuelles, je le mets à la porte pour faute grave immédiatement. S'il y a eu viol(s), la ou les victime(s) n’a ou n’ont qu’à déposer plainte. Contre l’employé qui est visé ou contre moi s’il y a quelque chose à me reprocher. À ma connaissance, rien n’a été fait. Donc, sur quelle base légale pourrais-je virer mon employé?  La Meute est une association de malfaiteurs. Qui est-elle pour décider de la vie ou de la mort d’un bar?”

Renseignement pris auprès du Parquet du Brabant Wallon, aucune plainte pour délit sexuel n’a été rentrée en date de mardi.

Notre interlocuteur insiste: “Si mon collaborateur doit assumer des conneries, je n’ai aucun problème avec ça. Mais je ne rentrerai pas dans le jeu des réseaux sociaux”.

La Meute a, en effet, partagé sur Facebook au moins une partie de ses actions contre l’Onlywood. “C’est pire que tout” enrage le propriétaire du bar. “Ce n’est pas ça, la justice. On ne rend pas justice soi-même”.

Par contre, notre interlocuteur a bien déposé plainte à la police: “On a aussi tagué mes fenêtres”. Mais il ne s’attend plus à grand-chose de la part du monde judiciaire: “La justice est insolente. Les réseaux sociaux peuvent tuer un établissement. J’ai appris que quelqu’un avait été arrêté pour les dégradations envers mon café. Mais je n’ai pas le droit de savoir qui c’est. Tout le monde s’en fiche. Le suspect a été relâché tout de suite”.

Sa seule consolation est que ses collègues d’autres établissements le soutiennent moralement: “Ils ont peur que cela leur tombe dessus aussi”.

Nous avons pris contact avec La Meute de Louvain-la-Neuve depuis plusieurs jours maintenant. Malheureusement, elle n’a pas répondu à nos sollicitations.

Des militantes féministes appellent au boycott des bars et clubs ce vendredi

Une manifestation organisée à Gand pour dénoncer les violences sexuelles suite au viol d’une jeune femme

Nouvelle manifestation contre les agressions sexuelles dans le quartier étudiant d’Ixelles