"J'aurais préféré que ma fille ne naisse jamais"

C'est par ces mots que Dina Zirlott, une Américaine de 31 ans installée dans l'Alabama, raconte son histoire tragique au Huffington Post. Elle avait 17 ans et avait invité, ce jour-là, un ami de l'école chez elle pour regarder un film. Quand il a mis sa main sur sa jambe, elle lui a dit clairement qu'elle ne voulait pas coucher avec lui.

"Je pensais que si je me levais, la tension se dissiperait..." Dans la cuisine, alors qu'elle buvait un verre d'eau, son "ami" s'est mis derrière elle et l'a pressée contre le plan de travail. "Sa main sur ma bouche est devenue sa main sur ma gorge." Elle s'est débattue mais il serrait plus fort au point qu'elle se sente perdre connaissance. "J'étais hors de mon corps, tout ce qui se passait, se passait sans moi."

Dina ne se souvient plus du départ de son violeur mais elle se rappelle avoir nettoyé le sang sur le carrelage blanc de la cuisine. Elle n'a pas appelé sa mère, elle n'a pas été au commissariat. "Je me demandais si j'étais capable de me noyer dans notre piscine. Je m'imaginais sombrer, regarder le fond et ouvrir la bouche."

Huit mois plus tard, sa mère a trouvé un livre qui traitait de la guérison après un viol. Elle avait vu sa fille maigrir à vue d'oeil, ses notes chuter. Elle a compris tout de suite. Dina ne supportait pas la culpabilité de sa mère, "comme des tentacules épais autour de moi". Et alors qu'elle pensait "que ça ne pouvait pas être pire", elle a appris qu'elle était enceinte.

Et alors qu'elle pensait que ça ne pouvait pas être pire...
Concentrée sur sa douleur, elle n'avait pas vu les symptômes. "Mes règles avaient toujours été irrégulières. Mon ventre était à peine gonflé." L'échographie a révélé le sexe de l'enfant: une petite fille, et une anomalie: une hydranencéphalie. Le cerveau du bébé ne s'était pas développé convenablement. Il allait naître aveugle, sourd, en retard sur le plan cognitif, sujet au diabète, à l'insomnie, etc.

Le foetus avait huit mois. L'avortement tardif n'étant pas autorisé en Alabama, Dina a dû aller jusqu'au bout de sa grossesse. "Je trouvais ça cruel et inhumain. J'avais déjà subi un traumatisme, n'était-ce pas suffisant?" Zoe est née le 27 octobre 2005. "Au début, je ne voulais pas la toucher, j'avais peur de la faire souffrir." Zoe est rentrée chez elle, avec sa jeune mère qui savait qu'elle allait mourir rapidement. 

"Parfois, j'espérais que son coeur s'arrête"
"Nous l'avons aimée un an. Nous avons compris comment la nourrir avec un biberon en plaçant notre doigt sous son menton. Nous l'avons tenue d'innombrables nuits sans sommeil parce que son corps était incapable de métaboliser les hormones du sommeil." Dina raconte les crises ingérables. "Parfois j'espérais que son coeur s'arrête pour qu'elle arrête de souffrir. Je suppliais et je redoutais ça en même temps."

Zoe a passé des semaines à l'hôpital. Elle a fini par mourir chez elle après plusieurs crises intenses dans la nuit. "Rien ne peut vous préparer à perdre un enfant même lorsque vous savez que ça va arriver." 

Lors de l'enterrement, Dina a souhaité s'allonger près d'elle. "Je voulais que tout s'arrête." Douze ans et trois filles plus tard, elle confie: "Le chagrin m'engloutit toute entière. Une partie de moi est toujours là, en train d'essuyer le sang sur le carrelage blanc."

"Si j'avais eu le choix, aurais-je choisi un avortement tardif? Oui. Cent fois oui. Zoe n'aurait pas dû endurer autant de douleur dans une vie aussi brève. Son coeur aurait pu s'arrêter quand elle était encore au chaud et en sécurité en moi. On lui aurait épargné tout ce qui a suivi. J'aurais peut-être été épargnée aussi. (...) Nous ne devrions pas demander la permission pour décider ce qui est le mieux pour nous et nos enfants."