Quel visage pour le football belge après la crise? “Il y aura probablement une baisse des salaires”
Depuis un an, la pandémie de coronavirus a bouleversé nos vies. L’occasion pour les journalistes de 7sur7 de dresser un bilan en sondant les secteurs particulièrement affectés. Comment la covid les a-t-elle impactés? Qu’ont ils fait pour s’adapter et comment voient-ils l’avenir? ÉPISODE 9: LE FOOTBALL PROFESSIONNEL.
Comme nombre de secteurs, le football belge a été frappé de plein fouet par la crise du coronavirus. À l’arrêt complet pendant plusieurs mois, le ballon rond a repris ses droits depuis le mois août dernier, d’abord avec puis sans spectateurs dans les stades. Quelles seront les conséquences (financières et sportives) pour les clubs belges? La gestion des clubs va-t-elle évoluer? À l’image de la société, le foot va-t-il profiter de la crise pour se réformer? La crise de la Covid va-t-elle accroitre les inégalités entre les ténors et les clubs plus modestes? Jean-Michel De Waele, sociologue du sport et prof à l’ULB, s’est projeté avec nous sur ce qui nous attend après la pandémie.
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Quel sera l’impact financier de la crise sur les clubs belges? Et quelles conséquences sur le marché des transferts?
Pendant quelques années, l’ensemble du marché financier du football sera touché. Les clubs sont dans le rouge et sont sauvés uniquement par les droits télé, à défaut de toute une série de rentrées. Cela va marquer les mercatos. Pour beaucoup de joueurs en fin de contrat cette année, ce sera difficile de retrouver les mêmes conditions. Cela pourrait créer un effet boule de neige. Une série de championnats européens, comme la Belgique, vivent de la vente de leurs joueurs aux grands championnats. C’est ce que font Genk, Gand, Bruges ou Anderlecht pour équilibrer leurs comptes. Ces équipes auront sans doute plus difficile à le faire parce que les clubs anglais, allemands, italiens risquent d’être en difficulté financière.
Les clubs se verront-ils obligés de réduire les salaires des joueurs pour équilibrer les comptes? Surtout lorsqu’on sait que la masse salariale représente en moyenne 76% du budget des clubs professionnels belges...
En effet, pour contrebalancer, cela pourrait se traduire par une diminution progressive des salaires. Compte tenu de la situation financière, on peut penser qu’il y aura une baisse des salaires (excepté pour les 1 ou 2% des meilleurs joueurs), que les noyaux se réduiront, que les clubs dégraisseront plus facilement. Mais c’est un processus qui se fera sur plusieurs années.
On ne peut pas tout imputer à la Covid. Mogi Bayat existait avant le confinement.
À Anderlecht et au Standard, la situation financière pèse énormément sur la gestion sportive. Les dettes sont abyssales et on recrute surtout des joueurs sous forme de prêt. La crise de la Covid ne risque-t-elle pas d’accentuer ce phénomène?
Après, il faut différencier la crise qui touche absolument tout le monde et les erreurs de gestion. C’est valable pour La Gantoise aussi. Au moment de la suspension du championnat, tout le monde s’accordait à dire que Gand était l’équipe qui allait pouvoir venir titiller Bruges en playoffs. Passer de la place du numéro 2 potentiel à une succession d’erreur de gestions, de changements d’entraîneur, de transferts ratés, c’est interpellant. Le constat vaut aussi pour Genk. Je suis frappé par un enchaînement de mauvaises décisions dans le chef de certains clubs. Et puis, il y a les commissions exorbitantes payées par les clubs aux agents. On ne peut pas tout imputer à la Covid. Bayat existait avant le confinement. Mais la pandémie met en évidence les faiblesses du système. Puis aussi le manque de stratégie à long terme.
Le Club de Bruges a pris une avance sur les autres clubs. Va-t-il asseoir sa domination, sportive et financière, sur le championnat belge après la crise?
Je fais partie de ceux qui s’agacent toujours des vérités et certitudes assénées par la presse et les commentateurs sportifs qui sont démenties la semaine suivante. Si j’en crois certains, Bruges allait quasiment jouer la finale de l’EL... Pas de chance la Covid est passée par là. Après l’élimination en Coupe, il ne lui reste plus que le championnat. Avant de transformer Bruges en Bayern de Munich, je serais beaucoup plus prudent. Ou alors on considère le commentaire sportif comme un café du commerce. J’ai entendu dire en début de saison que le Standard serait l’un des principaux concurrents de Bruges cette saison. Ah bon?
Cela étant dit, que Bruges ait pris une avance claire en matière de gestion, de recrutement, de budget, c’est une évidence. Cela s’explique par la grande stabilité de l’équipe dirigeante (Bart Verhaeghe et Vincent Mannaert, ndlr), qui n’a pas connu le succès tout de suite. Cela s’est construit petit à petit. Il y a là une professionnalisation, une ambition qui a permis à Bruges de prendre une certaine avance sur les autres. Il a les cartes pour rester le poids-lourd du football belge pour plusieurs années, mais il n’est pas à l’abri d’éventuelles erreurs. Est-ce qu’il va systématiquement parvenir à nous dénicher des Noa Lang? Je suppose que non...
Dans une interview au mois d’avril 2020, vous parliez d’un changement de paradigme. Une phrase m’avait interpellé: “Pour le moment, tout le monde prend conscience que l’on a plus besoin d’infirmières, d’éboueurs et d’instituteurs que de Lionel Messi”. Mais en cette période morose, est-ce que finalement le peuple n’a-t-il pas aussi besoin de rêver et de s’identifier aux stars qu’ils adulent. Le foot, c’est l’opium du peuple non?
On a besoin d’espoir, on a besoin de joie, mais je pense que Lionel Messi, comme d’autres stars du football, fait moins rêver en cette période de crise. Il est plus difficile pour elles de se sublimer. Je pense que les inventeurs des vaccins ou le personnel soignant devraient bien plus être mis en avant que Lionel Messi, qui se distingue par ses frasques fiscales ou son désir de signer des contrats plantureux. On a besoin de joueurs qui s’engagent. Hélas, ils ne sont pas nombreux.
À qui pensez-vous notamment? Avez-vous des exemples?
On a besoin de plus de Rashford pour le moment. Quand un joueur s’engage en disant qu’il faut fournir des repas gratuits aux enfants des classes les plus défavorisées” au Royaume-Uni, et quand il mène ce combat extraordinaire, c’est de cela dont a besoin. Dans une période d’angoisse comme celle-ci, les modèles ne sont plus les mêmes. On n’a pas besoin de quelqu’un qui dribble huit fois. Messi a marqué des buts splendides, mais dans un stade vide, ça ne sonne pas de la même façon. On les remarque moins. Par contre, l’engagement de Griezmann, qui rompt son contrat avec Huawei, pour protester contre le sort des Ouïghours en Chine, c’est ce genre d’engagement social et politique qu’il faut pour l’instant. Ou les joueurs qui ont refusé de jouer le match PSG-Basaksehir après un incident raciste. Je regrette en revanche le manque d’engagement en faveur des campagnes de vaccination. Peu de joueurs se sont engagés en disant “protégez-vous, soyez solidaires”. Dans une société marquée par l’incertitude quotidienne, on a besoin de sportifs qui se montrent, qui s’engagent pour les vaccins, contre le racisme, pour la science, pour lutter contre les inégalités. Et Rashford a montré la voie.
Lukaku qui s’agenouille pour soutenir la cause de Black Lives Matters, vous applaudissez des deux mains?
Oui, un certain nombre de discours de Lukaku est très important. Ce qu’il faut, ce n’est pas les campagnes ridicules de l’UEFA “Non au racisme”. Qui se dira: “Ah Hazard dit qu’il ne faut pas être raciste, j’arrête d’être raciste”? Ça, c’est se donner bonne conscience, ce sont des slogans. Ce qu’il faut, ce sont des actes, un investissement, des gestes forts. Le jour où on arrêtera les matchs en cas de dérapage raciste, tout le climat va changer. La société évolue. Ce qui est admissible il y a dix ans ne l’est plus aujourd’hui. Les insultes homophobes par exemple, ça a diminué dans les stades. Rashford a amorcé un mouvement sur des questions essentielles. On ne peut pas me soupçonner de ne pas aimer le foot, mais je considère qu’entre une infirmière du CHU Saint-Pierre et Noa Lang, l’infirmière a une utilité sociale plus grande et elle aura sans doute aidé davantage et sauvé plus de vies que Noa Lang en donnant du plaisir aux fans brugeois. Il faut raison garder. Cela dit, il ne faut pas opposer l’un et l’autre. Le football se poursuit, mais il n’y a plus de concerts, de spectacles, de pièces de théâtre. Ce sont les logiques économiques qui prévalent.
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