Naples, l'art de gagner plus en dépensant moins

Avec ses deux buts d'avance avant son huitième de finale retour, le Napoli est bien parti pour atteindre pour la première fois de son histoire le Top-8 de la plus prestigieuse des compétitions de clubs. Sans rival en Serie A, avec dix-huit points d'avance, il s'est ouvert l'appétit aussi en C1 en terminant en tête de son groupe à l'automne devant Liverpool, finaliste de la dernière édition et sextuple vainqueur de l'épreuve.

"La Ligue des champions ou le scudetto? J'espère les deux...", lance ainsi le gourmand Aurelio Di Laurentiis, le propriétaire et président du club. Le producteur de cinéma a repris en 2004 un club alors en faillite, renvoyé dans les limbes de la 3e division, bien loin des années Maradona ponctuées des deux seuls scudetti (1987, 1990) et du seul titre européen (Coupe de l'UEFA en 1989) du Napoli. Revenu dans l'élite en 2007, Naples figure régulièrement depuis sur le podium (sept fois lors des dix dernières saisons) mais a toujours dû laisser le titre aux grands du nord (Juventus, Inter Milan, AC Milan).

Sauf énorme accident en fin de parcours, cette saison sera donc la bonne pour De Laurentiis. Paradoxalement, cela survient au moment même où le club semblait moins armé après une sévère coupe dans les dépenses l'été dernier pour rétablir les comptes après la pandémie de Covid-19 et deux saisons sans C1.

Naples a perdu quelque 130 millions d'euros lors des trois dernières saisons, clôturées en déficit. Sa situation est toutefois restée sous contrôle grâce à un patrimoine net positif, au contraire de la situation autrement plus alarmante de l'Inter Milan, de la Juventus Turin ou de la Roma.Mais le patron, gestionnaire revendiqué, a jugé qu'il était temps de réduire sérieusement une masse salariale en hausse constante.

Une politique synonyme l'été dernier de nombreux départs, dont trois des cinq plus gros salaires du vestiaire: le défenseur Kalidou Koulibaly (Chelsea), le capitaine Lorenzo Insigne (Toronto) et l'attaquant Dries Mertens (Galatasaray). Les ventes de Koulibaly et Fabian Ruiz (Paris-SG), entre autres, ont aussi permis de conclure le mercato avec un solde positif. À la fin de l'été, l'objectif financier était clairement atteint avec une masse salariale passée de 40 à 70 millions d’euros, qui pourrait permettre au club de viser le retour à l'équilibre cette saison, selon la presse spécialisée.

L'ambition sportive était, elle, moins évidente, avec ces recrues arrivées des championnats turc (le défenseur sud-coréen Kim Min-jae) ou géorgien (Khvicha Kvaratskhelia) ou de clubs secondaires italiens (Sassuolo pour Giacomo Raspadori, Vérone pour Giovanni Simeone).

Mais avec le jeu flamboyant proposé par l'entraîneur Luciano Spalletti, 64 ans, ce Napoli renouvelé a rapidement mis tout le monde d'accord et montré qu'on pouvait - parfois - gagner plus en dépensant moins. Avec ses 23 ans, ses dribbles "maradoniens" et son énergie sans limite, Kvaratskhelia incarne ce pari économique gagné: son impact sur le jeu napolitain est inversement proportionnel à celui de son salaire sur les comptes, de l'ordre de 1,7 million d’euros brut annuel au lieu des 9 versés à Lorenzo Insigne l'an dernier.

Le Géorgien, parfait alter ego du puissant Victor Osimhen en attaque, sera encore l'arme fatale des Italiens contre l'Eintracht mercredi, une arme qui perce les défenses adverses tout en remplissant les caisses napolitaines.
La qualification permettrait en effet à Naples, selon les médias, d'atteindre la barre de 80 millions de recettes cette saison en C1, grâce à la prime de 10,6 millions d'euros liée au passage en quarts et aux 4 millions d'euros de billetterie procurée par un stade Diego Maradona évidemment plein pour ne pas rater ça.