Le "High Five": un geste courant, un drame oublié

Le 2 octobre 1977, un match de baseball oppose les Dodgers de Los Angeles aux Astros de Houston. Dernier match de la saison. Dusty Baker égalise pour les Californiens à la fin de la sixième manche. Euphorique, son équipier Glenn Burke lève le bras au ciel pour manifester sa joie. Baker claque la main sur la sienne. Quelques minutes plus tard, Burke réalise un "home run" et réitère le geste: le "High Five" était né et n'a plus quitté le langage courant depuis lors

Glenn Burke, "inventeur" à son insu
Synonyme de victoire, d'encouragements, de solidarité et de congratulations collectives, le rituel prend racine et Glenn Burke en devient le "créateur", à son insu, bien qu'il soit le fruit d'une interaction spontanée. Les Dodgers ne tardent pas à exploiter la mode et l'impriment sur des t-shirts qui se vendent comme des petits pains. La suite est moins drôle et résonne comme un mélodrame sans "happy end". 

Descente aux enfers
Au sommet de sa gloire, Glenn Burke va en effet rapidement déchanter. Ses coéquipiers apprennent un jour, par hasard, son homosexualité et sa carrière bascule: l'incompréhension, l'intolérance, la consternation et la colère gagnent son entourage. Le malaise règne sous les douches, les blagues fusent. La direction décide d'exiler l'embarrassant personnage à Oakland, loin de Los Angeles. 

"PD"
Mais chez les Athletics, la situation empire, son entraîneur le traîte de "PD" dans les vestiaires, un "surnom" qui lui collera désormais à la peau. Glenn Burke trouvera refuge de l'autre côté de la baie de San Francisco, dans le quartier homosexuel de Castro. Il arrête le baseball en 1980 et devient l'une des icônes de la communauté: le "High Five" s'impose alors comme le symbole de la Gay Pride, relate le magazine Priceonomics. 

Sida
En 1987, un accident le prive de l'usage de sa jambe droite. Le début de la fin. La dépression l'attend au tournant, la cocaïne, la mauvaise vie et la prison également. Le Sida, qu'il confie avoir contracté à 23 ans déjà, l'achève en 1995. Un documentaire (à découvrir ci-dessus) raconte la genèse de son geste, clin d'oeil ironique à son destin: une tape amicale légendaire, inlassablement rejouée chaque jour pour partager la joie.