“Primo”, la cuisine italienne hors des sentiers battus

La spécialité de la maison s’affiche fièrement en vitrine: des pâtes fraiches, artisanales, préparées chaque jour sous les yeux des clients et des passants. Une rigueur qui annonce la couleur: si la base est aussi méticuleuse, la suite ne peut qu’enchanter. Le décor est soigné. Trois pièces en enfilade dans une combinaison minimaliste de mobilier moderne, de tables de bistro et de banquettes en velours aux tons chatoyants. La longue terrasse à l’arrière promet de belles soirées d’été. Il faudra forcément patienter. 

La cuisine italienne traditionnelle sert ici évidemment d’inspiration mais les jeunes chefs Mario, Daniele et Giorgio s’en éloignent subtilement. Ils l’exploitent avec talent, comme tremplin, et la détournent joyeusement pour en proposer une version décalée et singulière. Tous les ingrédients sont là mais pas dans l’ordre et l’agencement habituels. L’art du contrepied, de l’inattendu et de la surprise. Une réinvention. La carte illustre à merveille cet appétit créatif, véritable appel à une gourmandise incontrôlée. Douze entrées, douze plats de pâtes et même quatre “focaccine” (petites focaccias). L’embarras du choix. 

Notre attention se porte sur deux “piatti sociali” pour débuter, autrement dit des plats à partager. La “Milky Way” consiste en une burrata au pesto frais et tomates confites, au crumble de taralli (biscuits salés des Pouilles) - complètement bluffant ! - aromatisé au citron vert et à la poudre de tomates déshydratées. Le fromage crémeux du Sud est ici sublimé par un accompagnement inédit: recommandation absolue! Pour poursuivre, les “Polpettine”, des petites boulettes d’aubergine à la ricotta salée, à la menthe et au pesto de pistaches. Un choix tout aussi judicieux, frais et parfumé. Hautement conseillé pour varier les plaisirs. 

En plat principal, la “Carbonera" était précédée de sa réputation. Version apocryphe de son quasi-homonyme? Une recette déroutante qui prend nettement ses distances avec la classique... qui mais séduit tout autant: crème de céleri rave, truffe noire, guanciale, champignons portobello, romarin, poutargue de jaune d’oeuf, grana padano et pecorino. L’assiette est originale, riche et, fait rare, copieuse. Conséquence, sans doute, de l’utilisation de pâte fraîche mais certainement aussi de la générosité de la maison. D’ailleurs chez “Primo”, comme son nom l’indique, on peut tout aussi bien se contenter de quelques “primi” à partager, sans forcément enchaîner avec le “secondo”. Plusieurs scénarios sont possibles.

La carte des vins vaut également le détour avec une large sélection éclectique et raffinée issue de diverses régions de la Péninsule. À prix doux et souvent proposée au verre, dont le très abordable Mandrarossa (cépage grecanico, blanc, Sicile) ou encore le Dolianova (cépage vermentino, blanc, Sardaigne), valeur sûre. Bonus non négligeable, “Primo” manie aussi l’art du cocktail. Une suggestion parmi les nombreuses créations: le très maîtrisé “Bergamotto” à la liqueur de bergamote, yuzu, au prosecco et au pamplemousse.