“Je n’ai pas le choix”: les livreurs chinois obligés de braver le confinement pour survivre

Soucieux de ne pas perdre son revenu journalier de près de 250 yuans (34 euros), il a enfreint les règles du confinement. “Je n’ai pas le choix. Si je ne gagne pas d’argent, je ne peux pas payer le loyer”, a expliqué le jeune homme âgé de 20 ans, originaire de la province industrielle du Shanxi, dans le nord de la Chine.

Sa résidence a été bouclée le 7 novembre après la découverte de deux cas de Covid. Alors le jeune livreur a escaladé une clôture pour assurer ses livraisons passées auprès du géant de la vente en ligne Meituan, avant de rentrer discrètement chez lui à la faveur de l’obscurité.

“Beaucoup de livreurs n’ont nulle part où habiter en ce moment”, a-t-il rapporté la semaine dernière à l’AFP à l’extérieur d’un immeuble de bureaux dans le froid de l’hiver. “Je ne suis vraiment pas satisfait du gouvernement chinois parce que d’autres pays ne sont plus aussi stricts vis-à-vis du Covid”, a-t-il fustigé. “Nous nous donnons beaucoup de mal (...) je ne pense pas que ce soit nécessaire, parce que personne n’en meurt”, assure-t-il.

L’AFP a choisi de ne pas divulguer le nom de famille de Wang afin de le protéger d’éventuelles représailles pour avoir enfreint le confinement et critiqué l’Etat chinois.

Certes, le durcissement des restrictions sanitaires a fait grimper la demande. Pour s’approvisionner en plats à emporter ou continuer à faire leurs courses, des millions de citadins se sont tournés vers une armada de coursiers mal payés, principalement originaires d’autres provinces. Mais les restrictions sanitaires se sont immiscées, elles aussi, dans les lieux où résident les livreurs, contraignant nombre d’entre eux à rester enfermés sans percevoir de revenus.

La semaine dernière, lorsque la menace d’un confinement s’est abattue sur la résidence de Gu Qiang, le livreur de Meituan a pris la décision de dormir dans sa voiture. “Dépenser 30 yuans (4 euros) pour faire tourner le moteur toute la nuit est toujours moins cher que de prendre (une chambre d’hôtel)”, a jugé l’homme originaire du nord-est de la Chine. “Plusieurs de mes amis vivent dehors, ils n’osent pas rentrer chez eux”, témoigne-t-il.

À propos de ces dernières semaines, des coursiers interviewés par l’AFP ont décrit des charges de travail importantes, les entreprises s’étant retrouvées à court de main-d'œuvre en raison des confinements. Si certains se sont dits ravis d’accepter des commandes supplémentaires pour gagner davantage, la plupart ont affirmé avoir enduré un temps de travail plus long, un surcroît de stress et des interactions plus négatives avec les clients.

Ils ont également expliqué ne recevoir aucun soutien supplémentaire de la part de Meituan ou des sous-traitants auxquels ont été confiées les livraisons.

En 2021, les autorités ont ouvert une enquête sur les plateformes de livraison, après des témoignages sur des pratiques d’exploitation au travail, notamment à propos d’algorithmes qui contraindraient les coursiers à conduire dangereusement pour respecter des délais de livraison serrés. Sollicité par l’AFP, Meituan n’a pas répondu.

L’entreprise a cependant affirmé la semaine dernière au média d’Etat China Daily qu’elle avait payé des chambres d’hôtel pour des travailleurs en détresse et répondu aux appels à l’aide de coursiers.

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