La crise économique, terreau de la folie meurtrière aux Etats-Unis

La crise économique a coïncidé aux Etats-Unis avec une résurgence des actes de folie meurtrière tournant parfois au massacre, un phénomène de violence qui ne doit rien au hasard, selon des spécialistes.

Lien réel entre économie et agressions mortelles
Il existe un lien réel entre l'économie et le nombre d'agressions mortelles, assure le criminologue Jack Levin, car "le tueur de masse est presque toujours quelqu'un qui a subi une perte terrible", qu'il s'agisse d'un emploi, d'une importante somme d'argent ou d'une relation amoureuse. Une série de tueries survenues ces dernières semaines aux Etats-Unis semble illustrer ce phénomène.

La semaine dernière, un homme lourdement armé a tué huit personnes dans une maison de retraite de Caroline du Nord (sud-est) et six personnes ont été tuées par balles dans une maison d'un quartier huppé de la Silicon Valley en Californie (ouest).

Massacres en série
Samedi, une scène d'épouvante était découverte dans une maison de Boston (Massachusetts, nord-est): un homme avait tué à coups de couteau sa soeur de 17 ans, décapité son autre soeur de 5 ans et commençait à poignarder la troisième lorsque la police l'a abattu.

Tout récemment, un homme a semé la mort en Alabama (sud), tuant neuf personnes dont sa mère et sa grand-mère avant de se suicider. Les enquêteurs ont retrouvé chez lui une liste de factures impayées, un carnet recensant ses griefs envers ses collègues et une lettre annonçant le licenciement de sa mère.

Inspiration, catalyseur
"De graves pertes servent d'inspiration ou de catalyseur", et en cas de crise économique, un plus grand nombre de personnes en sont victimes, explique à l'AFP Jack Levin, qui enseigne la criminologie à la Northeastern University de Boston.

La liste des faits divers sanglants de ces derniers mois est impressionnante: en janvier, un père de famille apparemment accablé par la perte de son emploi a tué sa femme et cinq enfants avant de se donner la mort; trois mois plus tôt, un homme en proie à des difficultés financières avait tué son épouse, sa belle-mère et trois enfants, avant, là aussi, de retourner l'arme contre lui.

"Joyeux noël", dit la crise
Dans l'un des faits divers les plus choquants de cette série sordide, le soir du 24 décembre 2008, un homme déguisé en père Noël a fait irruption dans la maison où était réunie la famille de son ex-femme et a ouvert le feu, faisant neuf morts avant de se suicider.

Si les tueries augmentent en période de crise, c'est aussi le cas des violences domestiques, souligne Jack Levine, car "des pères, des maris dévoués perdent leur emploi et ont l'impression qu'ils ne contrôleront plus jamais leur famille".

Violences domestiques
Cindy Southworth, du Réseau national contre les violences domestiques, ne va pas aussi loin. "Une économie mal en point ne provoque pas la violence domestique, pas plus qu'une économie florissante ne la guérit", dit-elle à l'AFP. Mais, reconnaît-elle, un mari violent qui a perdu son emploi "se retrouve à la maison toute la journée" et "les périodes de risque augmentent".

Pour Chitra Raghavan, professeur de psychologie et experte de la violence conjugale au John Jay College of Criminal Justice de New York, la récession a un impact. Les auteurs de violences, presque toujours des hommes, se retrouvent "coincés dans un cercle vicieux: sans emploi, humiliés, soupçonneux, désespérés", dit-elle. Surtout lorsque la femme travaille, "une colère ancienne peut alors exploser".

Et parce que les cordons de la bourse sont aussi plus serrés de la part des donateurs, les centres qui accueillent les victimes ont de moins en moins de moyens alors même que plus de personnes en détresse auraient besoin d'y trouver refuge. (belga/th)