Quel avenir pour les groupes de rock de la Fédération Wallonie-Bruxelles?
A l'approche des dix ans d'existence de la radio Pure FM et à la veille du festival ProPulse, l'émission Holy Drugstore diffusée dimanche soir proposait un débat conduit par l'animateur Sylvestre Defontaine autour de la question volontairement provocatrice: "le rock belge francophone est-il voué à piétiner?" Extraits choisis parmi les éléments de réponses avancés par les invités.
Dans le sillage du succès du groupe flamand dEUS, l'initiative marketing "sacrés belges!", lancée en novembre 2002 par plusieurs labels dont Bang! autour de groupes émergents comme Jeronimo, apparaissait comme la première tentative de "labellisation" de la scène pop-rock en Fédération Wallonie-Bruxelles, se sont entendus différents intervenants, avant d'évoquer la professionnalisation progressive du secteur musical et l'évolution de la politique culturelle comme des éléments favorables au développement de cette scène. Mais où en est-elle aujourd'hui et qu'en est-il de son avenir? Quels sont ses liens avec la scène pop-rock en Flandre et ses espoirs d'exportation?
Curiosité
"Quand on compare les chiffres de vente et les résultats de Roscoe (groupe wallon, ndlr) et Balthazar" (groupe flamand), qui ont connu une exposition médiatique quasi identique dans leur communauté respective et qui ont été bien accueillis dans les médias de l'autre côté de la frontière linguistique, "il n'y a pas photo", a avoué Damien Waselle, promotion et marketing manager chez PIAS et co-fondateur de Bang!. "On parle d'un ratio d'un pour cinq", a-t-il indiqué. "Je suis parfois un peu découragé, je n'ai pas l'impression que le public (francophone) est aussi curieux que le public flamand peut l'être. Je ne voudrais surtout pas communautariser le débat (...), c'est une réalité: il y a un plus grand atavisme culturel de la part des gens du Nord pour leurs artistes que chez nous", a-t-il estimé. "Ce n'est pas si simple que ça d'intéresser le public à nos projets", a-t-il ajouté.
Contraste
"Constat totalement objectif, polaroïd de l'année 2012... L'Ultratop des ventes de CD et en téléchargement légal pour la Flandre pour l'année 2012, ça donne en tête de liste et en vrac, je ne connais pas le classement précis, mais le peloton de tête, c'est: Balthazar, Triggerfinger, Selah Sue, Gotye -qui du coup a été adoubé comme un artiste flamand. Et puis, du côté francophone du pays, en numéro 1, ça, je m'en souviens parce que j'étais quand même assez frappé: c'est l'album-compilation hommage à Pierre Rapsat, et puis, très près derrière, on a l'album du Grand Jojo (...) Tout ça, c'est la faute à qui, au bout du compte?", s'est interrogé Rudy Léonet, directeur de Pure FM.
Affiche
"Je pense que la Flandre a une culture plus anglo-saxonne que la Wallonie", a avancé Pierre Adam, conseiller de la ministre de la Culture et de l'Audiovisuel Fadila Laanan. "On peut mettre en place toutes les stratégies culturelles que l'on veut, organisez un concert de Sharko en province, vous ferez 200 personnes payantes, organisez un concert de je ne sais quel artiste populaire, vous remplirez les salles", a-t-il observé.
Médias
"Je pense qu'en Flandre, il y a un certain protectionnisme de toute leur culture", a jugé Christophe Waeytens, manager et co-fondateur de Bang!. "A l'époque, quand on a sorti cet album de dEUS, on sortait en même temps un album de Venus, on arrive chez TéléMoustique, TéléMoustique nous fait une chronique et puis une interview de Venus, on arrive chez Humo, sur dEUS, je pense qu'on va avoir quinze ou vingt fois sur une année de l'exposition: on va d'abord avoir un teaser, ils vont parler d'un petit maxi de dEUS, et puis une chronique de l'album, et puis une interview, et puis une interview croisée avec un autre artiste flamand, et puis de la place dans les télés, et comme l'artiste participe à une télé, il y a de nouveau de la presse qui en parle, qui annonce la télé du soir, qu'on regarde, et donc petit à petit, les artistes flamands, en Flandre, sont beaucoup plus 'starisés', alors que chez nous, on a beaucoup moins, on a de la place, on a beaucoup d'exposition, mais beaucoup moins qu'en Flandre", a-t-il développé.
Conquête
"L'airplay est très important", a prolongé Gilbert Lederman, responsable du département francophone chez Universal Music Belgium. "C'est vrai que, pour un groupe francophone, entrer dans les playlists de Studio Brussel est vraiment une difficulté. Il y en a très peu, de manière générale", a-t-il relevé. "La Flandre, tu peux l'ouvrir quand tu ouvres l'Europe", a complété Christophe Waeytens à ce sujet. "Quand tu tournes partout et que tu repasses en Flandre, ça se passe bien. Girls in Hawaii a vendu un peu de disques en Flandre parce que ça a un peu tourné en Angleterre, aux Pays-Bas, en Allemagne, en Italie, et donc, fatalement, en Flandre aussi", a-t-il illustré.
Quotas
Le contrat de gestion de Pure FM, qui a été récemment resigné pour cinq ans avec la RTBF, "prévoit de façon très précise, très claire, que la mission d'une chaîne comme Pure FM est de diffuser -et c'est le cas depuis le démarrage de la chaîne et ce sera encore le cas pour les cinq ans à venir (...)- 10% de groupes de la Communauté Wallonie-Bruxelles", a précisé le directeur Rudy Léonet. "Ce ne sont pas des quotas bidons, parce qu'ils sont monitorés, donc vérifiés, par tranches de huit heures. Donc on est obligés de tenir le quota sur une période mensuelle, hebdomadaire, journalière, mais aussi à l'intérieur d'une tranche de huit heures", a-t-il expliqué. "Ca évite de réaliser ce que parfois certaines radios à l'étranger réalisent, c'est de placer tout leur quota entre minuit et six heures du matin", a-t-il glissé. "Je me souviens, on me disait: 'je ne sais pas comment tu vas faire, c'est un peu galère'. Et en fait, on est arrivés assez vite, assez facilement, sans faire forcément de concessions (...), à 12,5 ou 15%, je dirais les doigts dans le nez, sans trop se forcer. Donc, ce qui était au départ peut-être considéré par certains comme un handicap ou en tout cas un critère handicapant à l'existence de Pure FM est très vite devenu pour nous un atout", a raconté Rudy Léonet.
Stratégies
"Ce que je trouve assez intéressant aujourd'hui, c'est que tout est possible", a lancé Damien Waselle, du label PIAS. "Chaque projet a une stratégie qui peut être adaptée (...) Il y a un truc que j'aime bien aussi, c'est qu'il y a un relatif retour à un artisanat assumé, dans le bon sens du terme (...) On oublie aussi qu'aujourd'hui, pour les groupes que nous produisons, 15 à 20% des ventes se font en sortie de scène (c'est-à-dire sur le lieu de concert, ndlr), c'est énorme, c'est même devenu essentiel (...) Les nouveaux magasins d'aujourd'hui, c'est la scène. BRNS, c'est vraiment le bon exemple: je pense qu'on a dû vendre quelques centaines d'EP à l'heure qu'il est, ce qui est peu par rapport au buzz qu'il y a autour du groupe, eux ont dû en vendre beaucoup plus sur scène", a-t-il jaugé. "Je pense qu'aujourd'hui, il y a beaucoup de gens qui vont trop vite au disque, qui voient ça tout de suite comme une finalité, et je pense qu'on doit aller moins vite au disque, qu'on doit utiliser mieux encore les nouveaux médias, on ne doit pas être pressé", a-t-il analysé.
Dynamique
"Il faut tout le temps réinventer la dynamique", a confirmé Paul-Henri Wauters, directeur et programmateur du Botanique. "Nous, en tant que salle (...), c'est un bonheur de bosser avec des gens où on sent vraiment qu'il y a une réflexion dynamique sur l'évolution du groupe (...) Ce qui est pour nous important, c'est la motivation, mais surtout travailler avec des gens qui, par rapport à leur artiste, acceptent de dire: 'le succès, ce n'est pas forcément l'Ultratop, c'est défendre des bons concerts, vendre en fin de concert', et moi, je crois beaucoup plus dans un groupe qui dit: je fais de la bonne musique pour 200 personnes, et je fais plein de concerts, et je me débrouille pour aller là, et là, et là, avec des choses convaincantes. Après effectivement, pour nous qui sommes des relais chacun à notre niveau, c'est un bonheur un groupe qui non seulement a de la qualité, mais sait où il va, sait comment il va se développer et est cohérent dans sa démarche de développement", a-t-il témoigné.
Global Vs. local
"Je suis intimement convaincu -et ça, c'est ma conviction personnelle à moi, ici et maintenant- que l'avenir est forcément dans le développement des groupes locaux", a finalement affirmé Rudy Léonet, après un chapitre sur la mutation en cours de Pure FM. "Ce n'est pas juste l'avenir d'une radio comme Pure FM, c'est l'avenir aussi du Botanique, c'est aussi l'avenir -éventuellement- d'Universal Music Belgique -je dis bien Belgique... Un ancrage profond local. C'est l'avenir évidemment de PIAS, c'est évidemment l'avenir -c'est déjà le présent- du (collectif) Jaune Orange. C'est qu'aujourd'hui, les groupes qui sont globalisés -on a parlé de Depeche Mode, c'était Muse juste avant et encore avant c'était Coldplay (...)-, ces gens sont de plus en plus inatteignables, intouchables, surtout pour un petit pays comme la Belgique et pour un petit territoire comme la Fédération Wallonie-Bruxelles en Belgique (...) Par contre, les groupes qui viendront toujours, et qu'on a intérêt à développer, et à faire exister et à faire vivre, et des groupes qui vont aussi faire rêver, des groupes pour lesquels les gens ne viendront pas en donnant une PAF pour entrer (...) mais ils viendront parce qu'il y aura un vrai billet d'entrée, il y aura un vrai concert, avec un vrai investissement de la part du spectateur et du groupe qui va livrer une prestation qui vaut le ticket d'entrée qu'on a demandé. Et ce groupe restera encore et toujours disponible pour les médias locaux", a-t-il conclu.
"On sort de Groningen, c'était il y a quinze jours, c'est le grand marché Eurosonic, avec tous les groupes européens", a enchaîné Paul-Henri Wauters. "Comme dit Rudy, il y a quand même une tendance intéressante au local -s'il n'y a pas de local, il n'y a pas d'export, il n'y a pas d'import (...)-, la Belgique là-dedans, il y avait vingt groupes à Groeningen (...), je peux témoigner que beaucoup de gens partout reconnaissent la qualité du travail des groupes belges. L'idée qui est de se dire 'est-ce qu'on est condamnés à piétiner?', moi, je dis 'non'", a tranché le directeur du Bota.
Retrouvez notre playlist Spotify "Festival ProPulse 2013".
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