Un mélange des genres qui pose question: pourquoi la prestation de Stromae au JT de TF1 dérange

Dimanche soir sur le plateau du 20 Heures de TF1. Après une interview de sept minutes, et une dernière question d’Anne-Claire Coudray, Stromae brise le quatrième mur et interprète son nouveau titre, “L’enfer”, face caméra. Une claque pour les téléspectateurs et un coup de com’ rapidement salué. Mais une fois passés les cris au génie, les premières critiques se font entendre. Avec cette séquence, le divertissement se mêle à l’information, poussant encore plus loin un mélange des genres souvent critiqué.

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L’Obs qualifie ainsi le happening de Stromae de “franchement embarrassant". “On s’attend presque à ce que, comme les danseurs multicolores des ‘Demoiselles de Rochefort’, Anne-Claire Coudray bondisse sur la table et entame une petite choré”, écrivent les journalistes Sophie Delassein et Arnaud Gonzague. “Mais, mais, mais... Nous ne sommes pas devant ‘Les Parapluies de Cherbourg’! Nous sommes censés assister au 20-heures de TF1, présenté par une consœur dotée d’une carte de presse”.

L'écrivain Nicolas Mathieu lui aussi s'interroge. “La grand-messe journalistique achève ici sa fusion avec le spectacle”, écrit-il notamment sur Instagram.

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Questionnée sur le sujet par le magazine Télépro, Claire Chazal tempère. “Il faut être très souple. Le dimanche soir, on donne la parole à des artistes, c’est très important”, explique l’ancienne présentatrice du JT de TF1. “Stromae a accepté de dévoiler quelque chose, que la forme soit originale, sorte du cadre du JT et nous emmène dans la chanson ne pose pas problème. Il faut pouvoir se donner cette liberté-là”. 

“Je me souviens de quelques séquences spéciales avec Jamel Debouzze, Alain Chabat ou Kad Merad. Certes, c’est une promotion, mais pourquoi pas...", ajoute la journaliste.

Chez nous, on se souvient de Jamel Debbouze, Kev’ Adams ou encore Gad Elmaleh venus retourner le plateau du JT de RTL après avoir parlé de leurs dernières actualités. Un peu de spectacle (calculé ou improvisé) après l’information. Qu'on soit fan de ce genre de séquences ou non, posent-elles problème?

Le débat est vieux comme le monde. Partout, tout le temps, des artistes viennent présenter leurs nouvelles créations dans les colonnes de différents médias, et parfois même au journal télévisé. Le support partage une information avec son public et l’artiste en tire une certaine visibilité. En présentant sa nouvelle chanson, et en se prêtant à l’exercice de l’interview, Stromae offre une information au JT et donc aux téléspectateurs. Certes, il fait le buzz. Mais un buzz qui lui rapporte autant à lui qu’aux équipes de TF1, finalement, puisque la séquence a rassemblé 7,3 millions de spectateurs sur la chaîne et 2,7 millions de vues sur YouTube (et ça monte encore).

Avec cette prestation, le chanteur suscite également une émotion chez le spectateur. Il se confie sur sa longue traversée du désert. Il avoue, en détournant le regard, qu’il a parfois eu des pensées suicidaires. Un message personnel et difficile, qui parle à beaucoup. Il interroge, il interpelle et il bouleverse.

Dans ce genre d’exercice, le cadre et les intentions doivent être clairs. Mais est-ce qu’une interprétation, évidemment préparée en amont, remet en question toute la sincérité du message? Et la préparation, avec son accompagnement musical et ce jeu avec la caméra qui ne revient jamais sur le visage de la journaliste, n’était-elle pas évidente? En fin de JT, un dimanche soir, case traditionnellement dédiée aux sujets plus légers ou à la promotion, Stromae a quitté l'interview le temps de trois minutes pour transitionner vers la chanson. Coup de maître.

Ce détail durant l’interview de Stromae a bluffé les téléspectateurs de TF1: “Quel artiste respecte encore ce code?”

Stromae dévoile en exclusivité un morceau de son prochain album au JT de TF1