Cet expert y croit, l’été et les festivals nous tendent les bras: “Les jeunes le méritent après une telle année”
Les nouvelles du front de la vaccination sont “bonnes”: la Belgique ambitionne d’avoir pu vacciner “tout le monde” (lisez: tous ceux qui le souhaitent) d’ici fin septembre, et les mineurs d’âge font déjà partie du plan. Comment relever ce défi? Le vaccinologue Pierre Van Damme, qui fait partie intégrante de la task force belge de vaccination, répond à dix questions essentielles.
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Tous ceux qui le veulent devraient finalement être vaccinés pour septembre. Pourquoi la procédure semble-t-elle soudain s’accélérer de la sorte?
Pierre Van Damme: “Ce qui nous a surtout aidés, c’est la garantie de Pfizer et BioNTech que les livraisons suivront à temps. Cela nous évitera de mettre des doses de vaccin de côté afin de veiller à ce que la deuxième injection soit faite dans les délais. Et puis il y a désormais aussi le vaccin de Moderna qui s’ajoute, et on peut compter sur une nouvelle livraison importante en février. Fin du mois, on aura déjà une première livraison, plus limitée.
L’autre bonne nouvelle, c’est que Pfizer effectuera de nouvelles livraisons en avril, mai et juin. Mais on ne sait pas encore quelle proportion des 300 millions de doses européennes seront pour notre pays. Enfin, le vaccin d’Oxford/AstraZeneca est imminent, avec une validation vraisemblable courant février”.
Le schéma de vaccination a changé, et on remarque par exemple que les groupes à risques plus jeunes seront finalement vaccinés plus tôt. Quelles sont les pathologies qui donnent droit à une vaccination prioritaire?
“Au moment où je vous parle, on travaille encore d’arrache-pied à l’élaboration de cette liste, qu'on espère terminer ce week-end. Dès qu’elle sera finalisée, des listes de patients pourront être dressées via les généralistes et les dossiers médicaux globaux. Il va de soi que cela doit se faire dans le respect total de la vie privée. Ce n’est qu’à ce moment-là qu'on pourra savoir de combien de patients de 45 à 65 ans il s’agit.
On travaille aussi encore à la liste exacte des métiers essentiels vaccinés en priorité, qui sont planifiés pour avril. Et oui, cela fait déjà un moment que c’est en cours. Je ne suis moi-même pas impliqué dans ce processus, mais j’imagine que la définition des professions essentielles n’est pas la même pour tout le monde, certainement à l’ère de la pandémie. Le but est d’avoir une approche méticuleuse et en concertation avec les secteurs concernés”.
“Le retour à la liberté est en vue”, a promis Frank Vandenbroucke hier. Le Premier ministre affirme, lui, que la nouvelle stratégie de vaccination changera la donne. Êtes-vous aussi optimiste?
“Absolument. Je sais qu’on peut le faire, c’est un vrai ‘Yes, we can’. Il nous appartient à nous et à nous seuls de rendre cela possible. Car ce plan de vaccination forcera beaucoup d’entre nous à nous retrousser les manches. Pas seulement au niveau des pouvoirs locaux, mais aussi grâce aux volontaires et au bon vouloir de la population de se faire vacciner. Entre-temps, la prudence reste de mise: sans des courbes épidémiologiques rassurantes, le schéma sera mis sous pression. Il est donc très important de nous tenir encore tous aux règles durant un moment”.
Donc nous ne devons pas espérer d’assouplissement à la fin du mois?
“Le vaccin n’aura pas encore d’impact sur les chiffres maintenant, or c’est sur base de ces chiffres qu'on peut envisager d’assouplir. Nous nous en sortons relativement bien pour le moment, mais nous ne pouvons pas nous reposer sur cette position favorable par rapport aux pays voisins. C’est la meilleure garantie de réussir la campagne de vaccination. Car s’il faut la réaliser au milieu d'une troisième vague, on peut faire une croix dessus. Pour l'instant, la méfiance me semble donc de rigueur. Il y aura un nouveau Comité de concertation le 22 janvier prochain”.
Est-ce que chaque vaccin qui arrivera dans notre pays sera immédiatement utilisé plutôt que d’être stocké inutilement dans des congélateurs?
“Oui, il était question d'un départ en douceur, mais il s’agissait plutôt d'un point de départ. Cette semaine, nous aurons vacciné dans 41 des 820 maisons de repos et de soins, mais la semaine prochaine, on sera déjà à 400 et le reste suivra rapidement. À ce stade, il n’y aura presque plus rien dans les congélateurs, et il faudra attendre la nouvelle livraison. Et cette nouvelle livraison, les fabricants nous l’ont garantie.
Dès le 25 janvier, ce sera au tour des travailleurs du secteur des soins de santé, un groupe où la demande est très forte. Et je peux vous l’assurer, ça avancera à une bonne cadence. Cela vaut aussi pour les soins de première ligne, qui seront vaccinés dès février. Il y aura toujours un petit stock tampon en réserve, et c’est nécessaire”.
Comment assurer les dizaines de milliers d’injections par jour nécessaires pour s’en tenir au schéma?
“Je l’admets, c’est ambitieux de vouloir vacciner 7 à 8 millions de personnes d’ici la fin de l’été. Mais si nous nous attaquons à tous les plus de 65 ans en mars, cela se fera via les zones de première ligne. Par zone, il faudra compter deux centres de vaccination et cela en fait 120 pour toute la Flandre (200 à l’échelle de la Belgique, N.D.L.R.)
Chaque poste administrera au moins 1.000 à 1.200 vaccins par jour: cela revient à 36.000 injections par mois, en travaillant 7 jours sur 7. Et ça, c’est ce que l’on pourra réaliser au minimum. Mais il faudra faire preuve de créativité et de flexibilité partout, avec par exemple des horaires de vaccination étendus, voire nocturnes, parfois.
Il faudra naturellement des bras. Mais mon ordinateur croule actuellement sous les propositions de docteurs, infirmières, pharmaciens qui veulent donner un coup de main, ce sont pour beaucoup des pensionnés ou des personnes actuellement pas activité. Je les renvoie volontiers vers les centres de leurs régions respectives. Mais ce serait bien de déjà dresser des listes locales de volontaires. Chaque bénévole est le bienvenu. Et il faudra aussi des gens pour se charger de l’accueil, de l’administration,...”
Soudain, on nous apprend qu’on peut en réalité tirer 6 et pas 5 doses d'un flacon de vaccin. Pourquoi?
“Alors non, ce n’est pas que l'on va administrer moins de vaccin à chaque personne. Ces 20% de doses supplémentaires soudain disponibles par flacon sont en fait liés au matériel utilisé. À chaque injection, il y a normalement une perte de liquide car une petite partie ne peut être expulsé par la seringue. Mais avec celles que nous allons utiliser pour vacciner, cet ‘espace mort’ est fort réduit et cela nous permet d’extraire 6 et non 5 doses par flapule. C’est du pur profit. C’est un constat que nous avons dressé - ainsi que quelques autres pays - entre Noël et Nouvel an. Le fabricant a donc aussi adapté sa notice”.
Reportera-t-on aussi la seconde dose du vaccin de Pfizer de 3 semaines comme en France ou au Danemark et au Royaume-Uni, afin d’administrer déjà plus de premières doses à plus de monde?
“Non, nous nous en tenons pour l’instant à notre plan: la seconde dose de Pfizer est injectée 21 jours après la première, et 28 jours après la première pour le Moderna. Les notices laissent effectivement un peu plus de marge, avec un seconde injection jusqu’à 42 jours après la première, ce qui permet donc de ne pas respecter les 21 jours trop précisément. Cela permettra donc malgré tout que l’on se mette moins de pression, par exemple en maison de repos ou dans les centres de vaccination, si on ne se tient pas parfaitement aux délais de 3 semaines d’écart”.
Les mineurs d’âge figurent aussi sur la nouvelle campagne de vaccination.
“Oui, lorsque tous les adultes auront pu être vaccinés, les mineurs pourront le faire à leur tour. Mais il faudra d’abord que le vaccin soit testé sur des jeunes. Nous espérons les résultats des études pédiatriques (par exemple quelle sera la dose à administrer aux 6-12 ans, N.D.L.R.) vers avril ou mai. Mais si cela se déroule bien, ils pourront eux aussi être vaccinés à la fin de la campagne”.
Cela signifie qu’en juillet ou août, les festivals pourront avoir lieu?
“Pourquoi pas? Je pense qu'il faut être assez ambitieux pour donner cette perspective aux jeunes. Ils le méritent après tout, après l’année qu’ils ont endurée. À compter qu'on en soit à notre cadence maximale en juin, 24 heures sur 24, 7 jours sur 7, on aura vacciné une grande partie des adultes et donc les 70% nécessaires pour atteindre l’immunité de groupe. Peut-être qu'il faudra envisager des festivals à un peu plus petite échelle, éventuellement sans les visiteurs étrangers et avec un centre de dépistage rapide pour les moins de 18 ans à l’entrée”.
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