Des médecins tirés au sort à Charleroi, “le week-end a été explosif”
InterviewsEn moyenne, 267 nouvelles admissions quotidiennes à l’hôpital en raison du coronavirus ont été enregistrées en Belgique entre le 13 et 19 octobre derniers (+95%), ressort-il des chiffres publiés sur le site info-coronavirus.be mardi. À Charleroi, la tendance à la hausse suit une courbe exponentielle.
Les trois hôpitaux les plus importants de Charleroi font tous le même constat. Le nombre d’admissions pour cause de coronavirus grimpe en flèche. “Le week-end a été explosif et l’augmentation est continue” s’inquiète le responsable du service Presse et Communication à l’Intercommunale de Santé Publique du Pays de Charleroi (ISPPC), Frédéric Dubois. “Nous avons d’ores et déjà atteint le pic de l’épidémie rencontré durant les mois de mars et avril derniers. Et à l’époque, cela faisait 15 jours que le confinement avait été décrété. Ici, à part le secteur de l’Horeca, toutes les activités continuent de fonctionner normalement.”
À l’heure actuelle, 15 patients touchés par le Covid-19 séjournent aux soins intensifs des hôpitaux de l’ISPPC, 66 ont intégré les unités Covid-19 et cinq sont en attente des résultats de leurs frottis. En tout, cela fait 86 patients. Deux unités Covid-19 ont été ouvertes depuis début octobre et une est en passe de l’être.
“Nous avons déjà dû suspendre jusque fin octobre toutes les consultations non-urgentes. Cela nous permet de décharger certains staffs de leurs fonctions de base pour s’occuper des patients atteints du coronavirus. Et en fonction du nombre restant de travailleurs disponibles pour les autres tâches, nous reprogrammons les rendez-vous. Mais toutes les personnes impactées par ces mesures sont averties par SMS.”
Phase 2B “impraticable”
Actuellement l’ISPPC est en phase 1B. Cela signifie que la moitié des lits en soins intensifs sont réservés aux patients atteints du coronavirus. Mais l’intercommunale s’apprête à passer à la phase 2A: “Cela veut dire que 40 de nos 54 lits en soins intensifs seront réservés aux malades qui souffrent du Covid-19. Et sur le reste de notre capacité hospitalière, nous devrions accorder 160 de nos 218 lits aux autres patients Covid-19.”
La phase suivante, c’est la phase 2B. “Mais elle est impraticable” prévient Frédéric Dubois. “Nous n’avons pas de personnel suffisant pour passer ce palier. Si nous en arrivons là, nous devrons faire des choix parmi les patients.”
“Des claques dans la gueule”
Bref, les perspectives sont peu réjouissantes. Le personnel hospitalier est soumis à plus rude épreuve que lors de la première vague: “Nos employés sont complètement démoralisés. Ils ne ressentent plus le soutien de la population. Ils ne reçoivent plus des applaudissements, mais des claques dans la gueule (sic). Les gens ne veulent plus respecter les mesures et notamment le port du masque. Ils le portent dans les couloirs avant de l’enlever près de leurs proches hospitalisés. C’est pour cette raison que nous avons décidé de supprimer les visites. À côté de ça, le nombre de tests a augmenté. Forcément, le nombre de cas positifs parmi les membres du personnel aussi. Davantage de travailleurs asymptomatiques sont en quarantaine dans l’attente des résultats de leurs tests. Pour l’instant, nous savons nous débrouiller sans eux, mais jusqu’à quand? Nous savons que nous allons au devant d’une vague plus longue et plus compliquée à gérer que la première.”
Tirage au sort
Du côté du Grand Hôpital de Charleroi (GHdC), deux nouvelles unités dédiées au Covid-19 sont désormais ouvertes. Ce qui en fait six au total. Interrogé par Bel RTL, le directeur médical, Manfredi Ventura, explique qu’il faut faire appel au personnel d’autres services pour pouvoir répondre aux besoins imminents suscités par la crise sanitaire: “La semaine passée, nous avons procédé à un tirage au sort de médecins dans les autres services pour pouvoir prêter main forte dans les unités Covid. Ce sont des médecins qui sont sortis du cadre de leurs spécialités pour participer à l’effort (...) Chaque unité Covid est gérée par un ‘médecin-expert’ qui a connu la première vague et un autre médecin.”
Ce mardi, 13 patients atteints par le coronavirus ont intégré les soins intensifs du GHdC. 49 autres sont hospitalisés au sein des unités spéciales réservées au virus. 31 personnes sont suspectées d’être infectées et risquent de venir s’ajouter à la liste.
Inquiétudes
Contactée par nos soins, la responsable du service Communication du GHdC, Marie Ludwigs, ne veut pas dramatiser: “Pour l’instant, c’est gérable. Mais nous avons dû diminuer notre programme opératoire de moitié.”
Par contre, la pilule a du mal à passer auprès du personnel hospitalier: “Il est fatigué, stressé et inquiet de savoir que ça reprend. En plus, certains membres sont infectés et écartés temporairement. Contrairement à la première vague, il est vrai que nos employés savent maintenant à quoi s’attendre. Mais la progression actuelle de la pandémie est rapide.” Plus rapide qu’aux mois de mars et d’avril? “En tout cas, cela grimpe très vite.”
Une seule unité Covid-19
À la Clinique Notre-Dame de Grâce (CNDG), on ne peut qu’aboutir à la même conclusion. Trois patients affectés par le Covid-19 y sont aux soins intensifs. Une vingtaine d’autres séjournent dans l’unité Covid-19 mise en place et un dernier est en attente de résultat. “Il n’y a qu’une seule unité Covid-19 car notre hôpital est de taille plus modeste que nos deux grands frères” se justifie la Directrice Générale, Sylvie Brichard.
Mais par rapport à ses capacités, ces chiffres sont tout de même conséquents: “C’est très lourd. Nous espérons pouvoir continuer à combiner nos activités non-Covid-19 avec les autres. Mais la résurgence du virus est rapide.”
Un contaminé sur deux
Pour y faire face, une organisation est indispensable: “Nous avons établi une planification complète pour la prise en charge des personnes infectées par le coronavirus. Un spécialiste compétent supervise l’unité Covid-19 en permanence. Nous effectuons une rotation afin que tous les spécialistes de médecine interne s’y collent. Des assistants en médecine viennent les épauler.”
Mais le CNDG est confronté à un problème majeur: “Ce n’est pas le nombre de lits qui pose souci. C’est l’absentéisme. Beaucoup de membres du personnel sont en quarantaine. C’est difficile de fonctionner dans ces conditions. Les centres de testing ont un taux de positivité jamais atteint. Dans certains d’entre eux, un individu sur deux est déclaré contaminé. C’est nettement plus qu’au printemps dernier. Si on ajoute à cela, les travailleurs qui sont indisponibles à cause des autres maladies qui font leur réapparition en cette période de l’année, cela fait beaucoup.”
Décès
Du coup, des unités de soins ont déjà dû fermer. C’est le cas de la chirurgie, par exemple: “Toutes les interventions chirurgicales non-urgentes ont été postposées. Il s’agit, par exemple, des interventions esthétiques, des circoncisions pour raisons non-médicales, des prothèses non-urgentes... C’est le genre d’opérations qui peuvent se dérouler trois mois plus tard. Mais si la situation épidémique empire davantage, nous devrons envisager dans un premier temps de reporter les interventions qui peuvent l’être endéans quelques semaines. Ce qui aboutira à, au moins, un gros inconfort pour le patient. Car nous ne savons pas combien de temps cette deuxième vague va durer.”
Depuis le début du mois d’octobre, 33 décès ont été enregistrés dans les hôpitaux de Charleroi. 14 l’ont été au sein de l’ISPPC, 17 au sein du GHdC et deux au CNDG.
Retrouvez, ici, toute l’actualité de Charleroi et de sa région.
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