Pourquoi la tendance “clean girl”, aux milliards de vues sur la toile, pose problème

Sur TikTok, le hashtag “clean girl” comptabilise à lui seul plus de deux milliards de vues. Un phénomène qui ne cesse de prendre de l’ampleur. À travers différentes vidéos publiées sur les réseaux sociaux, les internautes donnent des conseils à leurs consœurs pour adopter au mieux cette tendance “bien-être”, également surnommée “that girl”. Et cela passe autant par le maquillage, la coiffure et les vêtements que par l’alimentation, le sport ou encore les habitudes quotidiennes.

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Pour résumer, la “clean girl” a le teint lumineux, les lèvres pulpeuses, les cheveux parfaitement attachés et un style vestimentaire minimaliste et efficace. Elle se lève le matin entre 5h et 6h pour rentabiliser sa matinée, elle mange de manière saine, va au sport au moins 5x par semaine et ne se couche pas sans avoir appliqué une tonne de crème de nuit sur son visage. La “clean girl” est productive, optimiste et reconnaissante. Elle dort 8 heures par nuit, fait du journaling (écriture quotidienne de ses pensées, sentiments et états d’âme dans un petit cahier, ndlr) et préfère ses livres aux séries Netflix.

Adopter la tendance “clean girl”, c’est devenir la meilleure version de soi-même, peut-on lire sur les réseaux sociaux. Elle vous motive à prendre de meilleures habitudes, vous donne des conseils pour prendre soin de votre peau, vous livre des astuces pour votre maquillage ou encore votre coiffure. Oui, mais ce n’est pas aussi simple. Certes, ce mouvement peut être une source d'inspiration et de motivation pour de nombreuses jeunes femmes, mais poussé à son extrême, il devient problématique. De nombreux médias ont d’ailleurs pointé du doigt les dérives toxiques de la tendance “clean girl”, à commencer par une certaine culpabilisation qui émane de cette tendance.

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À force de regarder des vidéos d’internautes qui adoptent le mode de vie “clean girl”, on peut commencer à se sentir mal. On se demande pourquoi notre peau n’est pas aussi belle que la leur, pourquoi on n’arrive pas à se lever tous les jours à 6 heures du matin et pourquoi on ne boit pas nos deux litres d’eau chaque jour. Pourtant, dans la vraie vie, derrière les écrans, c’est tout à fait normal de ne pas réussir à être sur tous les fronts. La tendance “clean girl” nous fait croire que la vie et le physique “parfaits” existent, mais ce n’est pas le cas. D’ailleurs, plusieurs influenceuses ont rappelé à leurs abonnées que ce qu’elles montrent dans leurs vidéos n’est pas toujours leur propre réalité. Il s’agit surtout d'inspirer les autres. Mais bien souvent, la “clean girl” nous culpabilise et nous fait croire que nous ne sommes pas assez bien.

Le deuxième gros problème de la “clean girl": elle n’est pas inclusive. Lorsque le mouvement est né sur les réseaux sociaux, il était principalement représenté par des jeunes femmes blanches, minces et dont le physique correspond aux “standards de beauté” de notre société européenne. En gros, au départ, cette tendance excluait les femmes noires, métisses, latines ou encore asiatiques. De nombreuses internautes lui reprochent également d’être grossophobe, raciste et de faire l’apologie de normes de beauté hiérarchiques.

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Dans les colonnes du magazine i-D, Rian Phin, commentatrice sociale, auteure et productrice vidéo basée à New York, déclare à ce sujet: “L’esthétique de la ‘clean girl’ me conforte dans l’idée que nous, en tant que société, cherchons encore des moyens de renforcer les hiérarchies et de créer des formes d’exclusion dans l’univers de la beauté.” Elle ajoute ensuite: “Elle est intrinsèquement exclusive, mais existe comme un amalgame de la culture des filles blanches BCBG et de l’esthétique des populations noires et latines des années 1990.”

Le manque d'inclusivité n’est donc pas le seul problème. Certains dénoncent également une forme d’appropriation culturelle dans la tendance “clean girl”. En effet, lorsqu’elle se coiffe avec un chignon bien serré et les cheveux plaqués, la “clean girl” oublie de dire que cette coiffure est issue de la culture afro-latine. “Cet héritage de chignons gominés, de créoles dorées et de peau crémée a maintenant été récupéré et réduit à une simple tendance incarnée par des femmes blanches”, écrit notamment le magazine i-D.

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Enfin, dernier problème de ce mouvement “clean girl”: l’appellation de cette tendance. En effet, en utilisant le terme “clean”, soit “propre” en français, on laisse supposer que les jeunes femmes qui ne rempliraient pas tous les critères de la “clean girl” sont “sales”. “L’expression ‘fille propre’ implique qu’il existe aussi une esthétique de ‘fille sale’”, déplore la journaliste Chelsea Candelario dans un article publié sur PureWow en juillet dernier. De son côté, Rian Phin ajoute: “Il est troublant de noter que vous ne serez jamais une ‘clean girl’ si vous souffrez d’acné kystique, qu’importe si vous ne portez pas de maquillage du tout, ou même un maquillage no make-up.”

Mais alors, la “clean girl” a-t-elle tout faux? Pas forcément. Il faut surtout retenir que cette tendance est née pour inspirer les jeunes femmes et les motiver à prendre soin d’elles et de leur corps. Mais dans la vraie vie, la fille parfaite n’existe pas. La tendance parfaite non plus. S'il n’y a aucun mal à glaner quelques conseils auprès d’influenceuses pour améliorer son mode de vie, cela ne doit pas virer à l’obsession. Les extrêmes ne sont jamais bons, même lorsqu'on parle de bien-être et de “meilleure version de soi-même”. Prenez du recul, gardez votre esprit critique et ne laissez pas la “clean girl” vous faire perdre confiance en vous.

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